Rabbi ‘Hanania ben Téradion était l’un des plus grands Tanaïm (auteur de la Michna) de l’époque de Bar Kokhba, l’un des dix martyrs, et le père de Brouria (la femme de Rabbi Méir).
Il fut Roch-Yéchiva et était décrit comme un fidèle aumônier, à tel point qu’il devint un symbole d’intégrité et de sagesse.
Une élogieuse réputation s’était dûment établie à son sujet.
Il représentait par excellence celui qui trouvait grâce aux yeux d’Hachem ainsi que de Ses créatures. Il n’eut jamais recours à des propos incisifs afin de blâmer la conduite d’autrui.
Une fin 'al kiddouch hachem
Lors de la mise en place du décret visant à proscrire l’étude de la Torah par César, Rabbi ‘Hanania adopta une conduite inverse. Rassemblant les diverses communautés, il continua à dispenser ses enseignements. Assis dans les rues de Rome, il n’hésitait pas à afficher sa dévotion totale pour la Torah d’Hachem, s’astreignant avec assiduité à l’étude de longues heures durant. César l’arrêta et décréta son exécution. Il ordonna que son corps soit enveloppé d’un Séfer Torah puis jeté aux flammes. Afin de prolonger ses souffrances et de ralentir sa mort, on le recouvrit d’éponges de laines préalablement trempées dans de l’eau.
Assistant à cette effroyable scène, sa fille s’écria : « Malheur à moi mon père, car mes yeux ont été témoins de ton humiliation ! » « Bien au contraire ma fille, répondit Rabbi ‘Hanania, c’est une bonne chose qu’il t’ait été donné d’assister à mes derniers instants ! »
Ses disciples, présents à ses côtés, l’interrogèrent : « Maître ! Que vois-tu en ce moment même ? » « Des parchemins se consument et les lettres qu’ils renferment se dispersent dans les airs. » Reprit dans un dernier souffle Rabbi ‘Hanania. (Cette réponse comporte un sens caché : le corps des Sages se consume certes, mais leur âme s’élève vers les cieux.)
S’efforçant de maîtriser son émotion, il se mit soudain à sangloter. Ses disciples demandèrent la raison de ces larmes. Dans un effort ultime, il répondit : « Que l’on brûle mon corps m’importe peu, mais à présent, il s’agit d’un Séfer Torah qui se consume avec moi ! »
Ses disciples, qui voulaient à tout prix soulager sa douleur, lui suggérèrent : « Maître ouvre donc ta bouche, cela permettra aux flammes de s’y engouffrer et de mettre fin à ton supplice. »
Rabbi ‘Hanania repoussa cette suggestion et déclara : « Il est préférable que Celui qui m’a insufflé la vie me l’ôte Lui-même et non qu’il s’agisse de ma propre initiative. » Ce sacrifice total de soi envers le Créateur et Sa Torah impressionna profondément son bourreau qui lui déclara aussitôt : « Maître, si j’ôte ces éponges de ton corps me promets-tu la félicité éternelle ? » Rabbi ‘Hanania répondit par l’affirmative sans hésiter. Le bourreau le pressa malgré tout de jurer, ce à quoi Rabbi ‘Hanania consentit également.
Aussitôt, le bourreau augmenta la flamme du bûcher et ôta les éponges de son corps. Rabbi ‘Hanania rendit à cet instant son dernier souffle de vie.
Sans la moindre hésitation, le bourreau se jeta à travers le brasier ardent qui consuma son corps. Une voix céleste déclara alors : « Rabbi ‘Hanania et son bourreau sont conviés à prendre part au monde futur ! »
A ce sujet, Rabbi Yéhouda Hanassi formula avec douleur : « Il y a celui qui a acquis son monde futur en un instant, à l’image du bourreau de Rabbi ‘Hanania, et il y a celui qui sert son Créateur durant toute son existence et qui malgré tout perd sa part au monde futur en un instant, à l’instar de Rabbi Yéhochoua’ Cohen Gadol, qui au terme de 80 années de service au titre de Cohen Gadol, renia son Créateur et devint Tsdouki ».