Est-il vraiment possible de changer ? Cette question revient souvent avant ainsi qu’après les fêtes de Tichri. En effet, nous avons parfois l’impression que les années se suivent et nous laissent le goût amer de la médiocrité. Nous avons alors la terrible impression de faire du sur-place. Mais ce n’est pas le pire. Le sentiment de stagnation est si puissant qu’il peut nous décourager. Nous renonçons tout simplement. Nous n’osons plus changer. Nous préférons un servage perpétuel à l’instar de l’esclave juif de la Torah, le ‘Eved ‘Ivri. Nous consentons à servir nos passions et notre mauvais penchant plutôt que d’oser changer. Ce phénomène n’est pas nouveau. La Torah nous raconte que seul un cinquième du peuple d’Israël est sorti d’Égypte. Le reste a péri durant la plaie de l’obscurité parce qu’il ne voulait pas sortir. La plupart de nous feignent de ne pas comprendre l’attitude de ces « récalcitrants ». On demande alors d’un ton énergique : « Pourquoi 4/5 du peuple hébreu refusèrent de quitter le lieu de leur servitude ? »
La question se répète dans le cas de l’esclave juif : pourquoi préfère-t-il la servitude à la liberté ? La peur du changement est la réponse à cette question. Ceci ressemble à deux frères qui décident de parcourir le monde à la recherche d’un business rentable. Ils finissent dans la ville de Miami. Là, ils se lancent dans l’immobilier. Le succès et la fortune sont au rendez-vous. Les frères profitent de cette situation durant plusieurs années. L’un d’eux déclare : « Cet endroit est merveilleux. Je ne le quitterai pour rien au monde. » L’autre de répondre : « Je resterai ici tant que nos affaires seront florissantes. » Après cela, la crise frappe leurs affaires. Les recettes diminuent pour finalement disparaître. L’un des frères propose de quitter le pays, mais l’autre refuse en lui disant : « Partir pour aller où ? Et pour faire quoi ? »
La peur du changement le tenaille tellement qu’il préfère rester dans sa misère. Car le changement est une avancée dans l’inconnu. Lorsque Moché Rabbénou proposa au peuple d’Israël de quitter l’Égypte, il les invita à un changement radical. Ceci impliquait de cheminer vers l’inconnu comme Jérémie le prophétisa : « Ainsi parle l’Éternel : je te garde le souvenir de l’affection de ta jeunesse, de ton amour au temps de tes fiançailles, quand tu me suivais dans le désert, dans une région inculte. »
Les 4/5 du peuple d’Israël n’étaient pas prêts pour ce changement. Ils préféraient le « confort » de l’Égypte. Un vrai changement suppose une avancée vers l’inconnu. Il suppose du courage et de l’audace. C’est l’abandon de nos vieilles habitudes pour un avenir incertain. C’est un défi que beaucoup parmi nous refusent. La misère, même la plus amère, paraît souvent plus douce que l’inconnu. On se justifie alors en disant : « Changer pour aller où ? Et pour faire quoi ? » L’appréhension n’est malheureusement pas le plus grand obstacle au changement.
Le changement est un combat pour être
La Torah nous raconte comment le patriarche Jacob est devenu Israël. C’est à l’issue d’une longue lutte contre l’ange d’Essav que Jacob est devenu Israël, comme il est écrit : « Jacob étant resté seul, un homme lutta avec lui, jusqu’au lever de l’aube. Voyant qu’il ne pouvait le vaincre, il lui pressa la cuisse ; et la cuisse de Jacob se luxa tandis qu’il luttait avec lui. Il dit : "Laisse-moi partir, car l’aube est venue." Il répondit : "Je ne te laisserai point, que tu ne m’aies béni." Il lui dit alors : "Quel est ton nom ?" Il répondit : "Jacob." Il reprit : "Jacob ne sera plus désormais ton nom, mais bien Israël ; car tu as jouté contre des puissances célestes et humaines et tu es resté fort."
Jacob mena un combat solitaire contre une créature spirituelle. Nos sages nous enseignent qu’il s’agit du Yester Hara, le mauvais penchant. Cette lutte contre le Yetser Hara a métamorphosé Jacob. Elle l’a changé. Il est devenu Israël, la dimension la plus accomplie de son être. Changer d’habitudes, changer de vie nécessite un long combat solitaire contre notre Yetser Hara. Le Messilat Yecharim décrit la vie comme une vie de lutte. Hachem a mis la Néchama, l’âme dans un corps physique afin de lui permettre de gagner le ‘Olam Haba, le monde à venir grâce à ses efforts pour vaincre le Yetser Hara. C’est cette lutte qui élève une personne et lui permet d’atteindre l’objectif ultime de réaliser le monde à venir. Rav Israël Salanter avait l’habitude de dire qu’il faut toute une vie pour modifier un trait de caractère. Il signifiait par cela que le changement est une lutte où rien n’est acquis. On peut être patient durant une semaine et finalement sombrer dans la colère. Cette guerre interminable terrorise beaucoup d’entre nous. La peur nous amène alors à l’inertie. Nous rendons les armes plutôt que de lutter pour changer. Que faire, me direz-vous ?
La confiance en Hachem, une clé du changement
Le roi David dit dans l’un de ses psaumes : « Le méchant fait le guet pour perdre le juste, il cherche à lui donner la mort. L’Éternel ne l’abandonne pas entre ses mains. »
Nos sages nous enseignent que le méchant dont parle le roi David n’est autre que le Yetser Hara. Ils nous enseignent également que le roi David est parvenu à terrasser son Yetser Hara. Cet authentique champion nous apprend qu’Hachem nous accompagne dans notre lutte contre le mauvais penchant. Plus encore, Il nous en sauve. Dans un autre de ses psaumes, le roi David s’adresse aux défaitistes et aux lâches en ces termes : « Dussé-je suivre la sombre vallée de la mort, je ne craindrais aucun mal, car Tu serais avec moi ; Ton soutien et Ton appui seraient ma consolation. » Nous n’avons rien à craindre, car Hachem nous soutient. La confiance en Lui est la principale clé du changement. Durant le mois d’Eloul, nos maîtres nous ont rappelé les paroles du prophète, l’interprétation de nos sages (Is. 55, 6) : « Cherchez le Seigneur pendant qu’il est accessible ! Appelez-le tandis qu’il est proche ! » Certes Hachem est plus accessible durant le mois d’Eloul, et pendant les dix jours de pénitences (entre Roch Hachana et Yom Kippour), néanmoins les paroles du roi David s’appliquent à toute l’année. C’est pourquoi nous devons placer notre confiance en Hachem et oser changer, même si cela suppose une lutte longue et difficile.
Qu’Hachem nous permette à tous de changer pour le bien.