Ce n’est pas seulement la communauté de la rue Pavée à Paris qui a perdu une grande dame, mais le judaïsme français dans son ensemble, en la personne de la Rabbanite Rivka Rottenberg, à l’issue de Chabbath, à l’âge avancé de 90 ans. Elle a été enterrée hier en Hollande dans le cimetière familial où repose son mari. Celle qu’on appelait respectueusement ’’La Rebbetsen’’ était la veuve du Rav ’Haim Rottenberg qui fut le Rav de la communauté, « le Rouv » comme l’appelait ses élèves.
Issue elle-même d’une famille de Rabbanim, elle assista discrètement son mari en prodiguant autour d’elle, actes de ’Hessed (bontés) et Brakhot (bénédictions) innombrables. Elle laisse derrière elle une postérité nombreuse et digne de son dévouement à la Torah. Son fils le Rav Mordekhaï est à présent le Rav de la communauté et son gendre, le Rav Ist’hak Kats, le dirigeant d’institutions de Torah « Yad Mordekhai ».
Pour percevoir un aperçu de sa grandeur, voici le récit qu’elle relata lors d’un rassemblement de ’Hizouk (renforcement) où elle fut l’invité d’honneur, devant un public féminin très important :
Lors des marches de la mort à la fin de la guerre, les nazis nous ont proposé un jour de pouvoir continuer la route en montant dans un camion. Je faisais partie de ce convoi mais je refusai catégoriquement : c’était Chabbath ! Alors, ma sœur qui se trouvait avec moi, me dit : « pourquoi ne montes-tu pas ?
— parce que c’est Chabbath ! Je ne peux pas monter dans le camion pendant Chabbath !
— mais je ne te comprends pas, de toutes façons, tu le profanes en marchant au-delà du T’houm(limite de la ville) alors qu’est-ce que cela change si tu montes, cela sera plus facile !
— la différence est que monter dans le camion est une option alors que pour marcher, je suis contrainte ! »
Par la suite, nous avons appris que les nazis avait fait une proposition trompeuse pour se jouer de nous : tous ceux qui étaient montés dans le camion avait été fusillés.
Il faut préciser que d’un point de vue strictement halakhique, il n’y avait bien sûr aucun problème de monter dans un camion conduit par un non-juif (interdit rabbinique), sachant que les conditions dans les marches de la mort étaient à la limite de ce qu’on appelle Pikoua’h Néfech (danger mortel).
Mais la Rebbetsen, elle, voyait les choses avec un autre angle : elle ne POUVAIT pas monter dans le camion. C’est ce qu’on appelle Yirat Chamayim Bé’houch (crainte du Ciel palpable) et c’est ce qui l’a sauvée !
Peinture représentant son mari, Rav 'Hayyim Yaakov ROTTENBERG, surnommé "Le Rouv"