Rav Its’hak Zemmel qui fut proche du Rav Ya’acov Edelstein au cours de ses dernières années de vie, rapporte au Yated Nééman de merveilleuses histoires sur le Rav.
Un amour sincère pour chaque membre du peuple d’Israël
« Il y a des histoires de prodiges indescriptibles, déclare le Rav Zemmel en guise d’introduction. Toutefois, le plus grand prodige a été d’avoir le mérite d’être témoin, de mes propres yeux, de la relation personnelle que le Rav entretenait avec chaque Juif en lui vouant un amour sincère, en se dévouant et en se souciant sérieusement pour chacun. Le Rav priait, conseillait, répandait ses bénédictions qui émanaient de son grand cœur, du cœur de tout le peuple d’Israël.
Lorsque les gens lui demandaient en quoi ils devaient se renforcer, le Rav avait souvent l’habitude de répondre dans tel ou tel domaine. Les gens en étaient stupéfaits, car le Rav ciblait précisément leur point faible, le sujet qui, chez eux, nécessitait d’être amélioré », poursuivit le Rav Zemmel.
Les premiers mots énoncés après deux mois de silence : « Je Te remercie, Roi vivant et éternel »
« Laissez-moi vous donner un exemple qui m’a fait frissonner, aussi bien moi que les médecins qui se trouvaient avec moi à son chevet », raconte le fervent disciple du Rav. « Cela faisait près d’un an que le Rav avait subi une opération au cours de laquelle la faculté de parler lui avait été retirée, et, depuis, il pouvait uniquement s'exprimer par écrit (en écrivant de sa propre main). Il est évidemment inutile de préciser la difficulté que cela représente pour un homme normal qui a toujours eu l’habitude de parler. Néanmoins, le Rav s’est adapté sans difficulté à cette situation et il a commencé à noter sur papier tous ses souhaits et tout ce dont il avait besoin.
Au terme de deux mois, lorsqu’il était en état de convalescence et de rétablissement, les médecins décidèrent qu’il était temps d’effectuer un test pour vérifier s’il réussirait à parler à travers un canal artificiel particulier qui lui avait été inséré lors de l’intervention. Peut-être qu’il pourrait se remettre à parler, et je me réfère à cet instant précis où les professeurs prirent la décision de faire l’essai.
Le chef de service et les professeurs pénétrèrent dans la chambre du Rav, refermèrent la porte derrière eux, et s’installèrent près du Rav. Puis, ils lui expliquèrent ce qu’il devait faire et s'adressèrent à lui en lui disant : "Que le Rav se mette à parler", mais il n’était pas prêt à cela, et les traits de son visage exprimaient son étonnement. Ensuite, ils lui dirent : "Que le Rav appuie avec son doigt sur la gorge, et ensuite, il pourra commencer à parler". J’étais présent dans la pièce et je réfléchissais, comme tout le monde, au premier mot que le Rav ferait sortir de sa bouche après deux mois au cours desquels il n’avait pu émettre le moindre son. Connaissant le Rav, nous pensions tous qu’il s’adresserait aux médecins pour leur dire merci.
L’émotion dans la pièce du Rav était palpable. Le Rav posa sa main sur la prothèse et commença à réciter, d’une voix tout émue « Modé Ani Léfanékha Mélekh ‘Haï Vékayam (…) Rabba Emounatékha ».
C’était une véritable scène de Kiddouch Hachem (sanctification du Nom Divin). Tout ce qu’il avait à dire, après deux mois de mutisme, n’était autre qu’un remerciement adressé à Hachem pour lui avoir rendu son âme. »
En hébreu, en anglais et en russe : « Vous étiez comme des anges, avec toutes sortes de blouses »
« Il faut savoir que la relation que le Rav entretenait avec les médecins et toutes les infirmières est un concept duquel nous devons nous inspirer, et c’est un Kiddouch Hachem grandiose », dit le Rav Zemmel avant de faire référence à un événement qui lui revient à l’esprit. « Après l’une des interventions complexes, le Rav fut hospitalisé en soins intensifs. Puis, il m’a appelé et a écrit, en dépit de sa grande faiblesse, "Merci beaucoup à toute l’équipe médicale et aux infirmières, vous avez été comme des anges vêtus de toutes sortes de blouses".
Le Rav, sachant qu’il y avait, au sein du corps médical, des anglophones et des Russes, avait écrit la même phrase en anglais et en russe à côté de celle qu’il avait écrite en hébreu. Il m’avait alors demandé que je fasse photocopier ces phrases inscrites sur son petit tableau et que je m’adresse au bureau de l’équipe du service de convalescence pour la leur montrer, pour leur manifester sa gratitude pour le dévouement dont ils avaient fait preuve à son égard.
Les médecins et les infirmières en furent si touchés qu’ils ne croyaient pas à ce qu’ils voyaient. Pour le Rav, alors qu’il était extrêmement faible et qu’il se trouvait dans un état critique, ce qui lui importait le plus était de les remercier et de leur envoyer ce message pour qu’ils voient que c’était lui-même qui l’avait écrit… Ceci fit couler de nombreuses larmes. »
« Je me trouve dans un paradis magnifique de Tel Hachomer »
« L’attitude que le Rav adoptait après l’opération complexe qu’il avait subie était qu’Hachem lui avait donné un cadeau - le jeûne de la parole -, et, pour cela, il devait Le remercier. Il a même exprimé cela dans un petit papier qu’il avait écrit : "Je me trouve dans un merveilleux paradis de Tel Hachomer [nom de l’hôpital]". En dépit des souffrances terribles qu’il endurait, il avait une façon particulière de considérer chaque situation comme stimulant pour s’élever spirituellement.
Étant donné qu’il avait écrit durant sa période de maladie qu’il se trouvait dans le merveilleux paradis de Tel Hachomer, je lui avais demandé à la suite de cela : "Pourquoi le Rav écrit-il qu’il se trouve dans le Gan Eden de Tel Hachomer, est-ce qu’il y aura un hôpital au Gan Eden ?" Et il m’avait alors répondu par écrit : "Au Gan Eden, il n’y aura pas d’hôpital comme Tel Hachomer, néanmoins, à Tel Hachomer, il y a un Gan Eden, un Gan Eden où il y a des hommes qui, à travers leur maladie, réparent les obstacles qui se trouvent sur la route acheminant au Gan Eden". Des mots extrêmement percutants. »
« Il faut respecter les médecins »
« On pourrait citer des centaines d’anecdotes liées à la relation particulièrement respectueuse que le Rav entretenait avec autrui », rapporte son élève, le Rav Zemmel. « J’en rapporterai une qui se produisit les derniers jours de sa vie, alors qu’il était très faible. Un médecin stagiaire entra dans la chambre d’hôpital du Rav pour effectuer un certain traitement, mais avant de procéder aux soins, le médecin donna certaines recommandations au patient pour se préparer à recevoir le traitement. Après les avoir suivies, le Rav était prêt et s’installa sur son lit, je lui annonçai alors que j’allais chercher le médecin soignant.
Mais le Rav m’en empêcha en me faisant signe de sa main et se mit à écrire : "Ne dis pas au médecin ce qu’il doit faire, il faut lui accorder du respect. Tu dois seulement lui dire que nous avons terminé de faire le nécessaire, et automatiquement, il comprendra ce qu’il lui reste à faire."
J’ai montré cela à tous les médecins et ils en étaient stupéfaits. Ils furent impressionnés de voir à quel point, même dans un tel état de santé, son esprit se penchait sur chaque petit détail, même le plus accessoire, pour que tout ce qui le concerne soit réalisé de la meilleure façon possible, de sorte à susciter l’admiration en ne portant jamais atteinte à quiconque, ne serait-ce même à un médecin débutant.
Quand sa femme était malade, il refusa de dormir dans un lit
Autre anecdote merveilleuse qui témoigne de la grande sensibilité du Rav à l’égard d’autrui : à l’époque où son épouse (de son premier mariage) était hospitalisée lorsqu’elle fut atteinte d’une maladie qui mit fin à ses jours, le Rav resta seul chez lui. Les membres de la famille voulurent lui envoyer l’un de ses petits-fils pour qu’il passe les nuits avec lui. Ainsi, au cas où le Rav aurait besoin de quoi que ce soit, il aurait quelqu’un à ses côtés pour l’aider. Néanmoins, le Rav refusa, et, bien que ses proches aient insisté, il resta sur sa position.
Mais plus tard, le secret fut dévoilé. Tout au long de la période où la femme du Rav était souffrante à l’hôpital, le Rav dormait sur un matelas à même le sol. Il n’était pas prêt à dormir normalement dans un lit parce qu’il tenait à ressentir la souffrance de son épouse et il ne voulait pas que les membres de sa famille le sachent.
« Choisis le prénom qui plaît à ta femme »
Le Rav Zemmel poursuit et raconte une histoire personnelle qui lui est arrivée : « Cela remonte à quelques années, lorsque mon fils est né Baroukh Hachem, nous avions du mal à nous décider pour le choix du prénom. Nous hésitions entre plusieurs prénoms, et ma femme voulait un certain prénom, nous étions donc allés consulter le Rav.
J’ai présenté au Rav une liste de plusieurs prénoms afin qu’il tranche, et, immédiatement, il pointa l’un des prénoms : "N’est-ce pas que ta femme aime ce prénom, alors choisis le prénom qui lui plaît". Je me suis quasiment évanoui en entendant ses propos, d’où le Rav savait-il tout cela ?
À propos de plusieurs sujets pour lesquels on venait consulter le Rav pour lui demander un conseil ou pour recevoir une bénédiction, le Rav s’informait de l’avis de l’épouse, et, à maintes reprises, il recommandait à celui qui le sollicitait : "Fais ce que ton épouse souhaite et tu réussiras". Il servait lui-même de modèle, car il vouait un respect exceptionnel à son épouse. »
Il introduisait ses discours en ces termes : « Tout a été créé par Sa parole »
Lorsque son état de santé le lui permettait et qu’il assistait à diverses cérémonies, il avait l’habitude de demander à boire avant de prendre la parole, et, ainsi, il introduisait ses propos par la bénédiction « Chéhakol Nihya Bidvaro », et souhaitait aux familles respectives que ces fiançailles / ce mariage soient aussi la réalisation de la parole divine.
Je suis le serviteur d’Hakadoch Baroukh Hou
La grandeur exceptionnelle du Rav résidait dans le fait qu’à chaque instant de sa vie, il ressentait qu’il était un serviteur se tenant devant son Créateur, et, ainsi, à tout moment, il réfléchissait à ce qu’il devait faire en tant que serviteur fidèle de son Créateur. « Lorsque le Rav se mettait à chanter "Ana Avda Dékoudcha Bérikh Hou" ("Je suis le serviteur d’Hakadoch Baroukh Hou"), on ne pouvait l’arrêter, raconte le Rav Zemmel. Il était tant ému qu’il en pleurait ! Même durant sa maladie, alors qu’il ne se sentait vraiment pas bien, lorsqu’ils se mirent à chanter ce chant, ils réalisèrent qu’il était d’une très haute dimension. Le sentiment qui l’accompagnait tout au long de sa vie était : que puis-je faire en tant que serviteur de mon Créateur !? »