L’intervention divine dans l’Histoire est évidente. Tous les événements qui se déroulent dans le monde sont, assurément, influencés par la Providence céleste. Il y a cependant des circonstances dans l’histoire individuelle de chacun, ou dans les faits généraux de l’Histoire, où cette intervention providentielle apparaît de façon plus évidente. Il suffit qu’un voyageur, arrivé à l’aéroport, s’aperçoive qu’il a oublié son passeport, rentre chez lui le chercher, retourne à l’aéroport et… rate l’avion qui vient de partir ! Si cet avion tombe dans la mer, avec ses 200 passagers, la prise de conscience de l’intervention de la Hachga’ha (providence) est assurée ! Qui oserait parler ici de hasard ?! Ce n’est certes pas par hasard que le passeport ait été oublié !
En réalité, en deçà de l’exemple présenté ici, il y a divers aspects à distinguer dans l’intervention du Créateur dans la création. Il est certain que, ayant créé le monde et les lois de la nature, Il ne saurait s’en désintéresser, et tout dépend de Sa direction. Mais, au niveau de l’humain, on peut percevoir trois niveaux d’action de la Providence : il y a d’abord le miracle, qui implique un changement dans l’ordre naturel des choses : c’est la sortie d’Egypte, le passage de la Mer Rouge, l’eau transformée en huile, ou l’huile prévue pour un jour qui dure huit jours. Un deuxième aspect est la coïncidence entre deux faits, que l’on peut considérer comme un hasard, mais qui apparaissent comme menant à la même conséquence. C’est l’exemple énoncé plus haut avec le passeport oublié. C’est aussi ce qui s’est passé il y a quelques jours à Michméreth, lorsque des missiles palestiniens ont détruit deux maisons et plusieurs personnes ont été blessées, mais miraculeusement, personne n’a été tué. Sans cette « apparente » coïncidence, les conséquences auraient pu être beaucoup plus graves. C’est le 2ème aspect du miracle. Mais il y a un 3ème aspect, encore plus significatif, c’est quand il ne se passe rien, et qu’il convient seulement de « lire » les faits, et de les lier entre eux. C’est le cas des événements de Pourim. Il n’y a pas ici « coïncidence » entre les faits, mais qui sait lire, voit les conséquences des faits. C’est ainsi que les ‘Hazal expliquent la réponse d’Hachem à Moché Rabbénou, à sa question sur la contradiction entre le malheur du juste et le bonheur des méchants : « Ma face n’est pas visible, mais seulement par derrière tu Me verras » (L’exode 33.21).
Apprenons à lire, à voir clair, au-delà du naturel, qui est en réalité un mystère. Cela est résumé dans le terme “’Olam” (univers, temps), de la racine de “Né'élam” – mystérieux. Dans cette théorie du D.ieu caché apparaît la notion du miracle.
Ainsi qu’on l’a montré précédemment, les trois aspects du miracle résultent évidemment de la même source : la foi en un Créateur, dont le miracle – l’apparence inhabituelle – prouve à l’homme Son existence. Le philosophe Rosenzweig définit ainsi le miracle : « Il s’agit [par le miracle] de réinsérer dans le concept de la Création la Révélation elle-même… qui la relie au ferme espoir, en la venue du royaume éthique de l’ultime Rédemption » (L’Etoile de la Rédemption, p. 126, Edition du Seuil).
Ainsi, si les missiles palestiniens n’ont eu qu’un faible impact – miracle évident – c’est un élément de la Révélation lié à l’espoir de la venue du Royaume messianique. Les ‘Hazal (les sages, de mémoire bénie) expliquent cette idée par le terme « Ness » (miracle) qui implique quelque chose qui dépasse l’ordre habituel des lois de la nature (le terme « Ness » implique une idée de « dépassement »). Il est possible d’être aveugle, de refuser de voir les faits objectifs, mais le croyant garde l’espoir, et donc « voit plus clair ». L’histoire miraculeuse de la survie du peuple juif n’est-elle pas aujourd’hui une preuve tangible de l’intervention d’une transcendance éternelle qui dépasse l’instant, et donc la vie éphémère de la créature ? Apprenons à comprendre et à lire les faits, affirmons notre espérance en la venue prochaine du Royaume.