Le Rav Chalom Eidelman, l’un des plus anciens délégués ‘Habad au monde, depuis 61 ans au Maroc, est décédé à l’âge de 84 ans le 16 Nissan 5780, le 10 avril, le deuxième jour de Yom Tov Pessa’h en dehors d’Israël, après avoir été infecté par le Coronavirus Covid-19.
Après avoir fui la Russie soviétique à la toute fin de la seconde guerre mondiale alors qu’il avait à peine 9 ans, la famille Eidelman s’est installée en France. Le jeune Chalom étudia à la Yéchiva Loubavitch Tom’hei Temimim de Brunoy dans le département de l’Essonne en Île-de-France. Encore jeune marié en 1959 et à la demande de l'Admour Rabbi Mena’hem Mendel Schneerson, le Rabbi de Loubavitch, il prit la direction du Maroc, où il fut Chalia’h à Casablanca. Très jeune, il prit en charge des cours, avant de s’occuper du Collel. Le Rabbi de Loubavitch lui adressa au bout de quelques mois seulement une lettre de félicitations, soulignant la qualité de son adaptation, marquée notamment par le respect des Rabbanim du Maroc. Et quels Rabbanim ! Rav Berdugo, Rav Toledano, Rav Messas, Rav Malka, Rav Obadia, Rav Hazan, Rav Aben Danan… Son influence s'étendit rapidement dans tout le pays. Il fonda un Collel d’une très grande importance au Maroc, formant nombre de Rabbanim, Dayanim (juges rabbiniques) et Cho’hatim (abatteurs rituels). Il fut l’enseignant de Rav Chlomo Amar, actuel grand-rabbin de Jérusalem et ancien Richone Létsion (grand-rabbin séfarade d'Israël), ainsi que de Rav David Raphaël Banon, Dayan à Montréal au Canada.
Alors que plus de 300 000 juifs vivaient au Maroc à leur arrivée, nombre d’institutions juives de première importance – écoles, synagogues, mikvaot, aide sociale – furent mises en place sous sa supervision.
Rav Eidelman, qui fut le beau-frère du Rav Hillel Pevzner zatsal, Rav de la communauté ‘Habad de France, a vécu depuis son arrivée au Maroc dans un appartement très modeste de Casablanca, rempli de livres de Kodèch.
« Rav Eidelman, la modestie même »
Rav Yaakov ‘Haviv, Dayan à Jérusalem et membre du Beth Din Ihoud Harabbanim, intervenant régulier sur Torah-Box, le connaît personnellement depuis près de 30 ans. « Je l’ai rencontré à toutes les grandes occasions chez son beau-frère le Rav Pevzner », se remémore-t-il. « Conscient de sa responsabilité, il ne quittait jamais le Maroc pendant les ‘Haguim », indique Rav ‘Haviv. En effet, Rav Eidelman ne limitait pas son action aux juifs marocains, mais à toutes les personnes qui venaient au Maroc aux périodes de fêtes et aux grands pèlerinages de Tsadikim, afin de leur offrir les meilleures prestations en termes de Cacheroute, et de vie juive au sens large (Mikvaot par exemple). « C'était un vrai Talmid ‘Ha’ham, un ‘Hassid en puissance ». Pour Rav ‘Haviv, cette grande réussite est notamment liée à la grande finesse de ses traits de caractère. « Sa particularité était sa modestie naturelle. Il arrivait à faire passer les messages sur tous les sujets, au niveau de la Halakha comme des questions de Cacheroute (Che’hita et viande ‘Halak), au Maroc, auprès des bouchers ou commerçants sans jamais élever la voix, toujours avec une grande sérénité et tranquillité d’esprit ». Ces qualités exceptionnelles lui permirent, pourtant achkénaze de culture russe et de tradition ‘hassidout ‘Habad-Loubavitch, d’être un expert reconnu sur les questions culturelles de la Psika (processus décisionnel Halakhique) et des Minhaguim marocains, au point d’être régulièrement cité dans les livres de discussions des Maîtres marocains au sujet des traditions juives locales.
« Un grand homme »
Pour Rav Avraham Kadoch, Rav Eidelman était avant tout un « grand homme, un vrai ‘hassid, tout le temps le sourire aux lèvres, tout le temps disponible alors qu’il avait sur lui de très grandes responsabilités. Il s’occupait des besoins de chacun, jusqu’à la température du Mikvé les veilles de fête ».
Rav Kadoch se remémore cette anecdote sur l’importance de l’étude de la Torah pour Rav Eidelman. « A Pessa’h, il me demandait de donner des Chiourim, notamment le Chabbath. Je devais aller d’un endroit à un autre et il m’était parfois difficile de trouver un Minyan tellement il y avait de cours à dispenser. Mais c’était un homme qui savait replacer les priorités : l’étude de la Torah en tête. Il y avait 15-20 ans, il n’y avait pas beaucoup de Chiourim, c’était donc sa priorité, pour les hommes comme pour les femmes […] C’est une figure qui m’a beaucoup marqué. J’ai du mal à imaginer Casablanca sans lui », nous fait savoir Rav Kadoch.
Que son souvenir soit pour nous tous une grande bénédiction.