Il est l’aventurier incarné. Il va le premier explorer le Groenland et, pendant un an, vivre sur les terres de glace des Inuits, plus couramment appelés « Esquimaux ».
Né au début du siècle, dans une famille d’industriels aisés d’origine d’Europe centrale, il est juif par ses deux parents.
Son père, Erich Heinrich Victor Steinschneider, se débarrassera carrément de son nom de famille, le remplaçant par son troisième prénom, Victor. En effet, la consonance allemande de son patronyme est mal perçue dans la France d’après la défaite de 1870. Sa mère, Laure, s’est convertie au catholicisme et les véritables racines familiales ne seront pas dévoilées aux enfants, Paul et Lily, par souci d’intégration et de “protection” dans un climat longtemps très hostile aux populations germaniques et juives.
Paul-Émile Victor organise de façon magistrale et inédite la médiatisation de ses expéditions, parallèlement à une démarche scientifique profondément respectueuse des peuples autochtones. Les multiples conférences, publications et films qu’il produit permettent à la fois de nourrir l’intérêt du public et de financer les missions suivantes.
En 1942, il s'engage dans l’US Air Force comme GI, avant de devenir lieutenant-instructeur, pilote et parachutiste. Grâce à sa connaissance du milieu polaire, il prend par la suite le commandement d'une des escadrilles « recherche et sauvetage » de pilotes perdus en Alaska, au Canada et au Groenland et obtient, à ce titre, la double nationalité française et américaine.
Écolo avant l’heure, à partir de 1962, il se passionne pour la défense de l'homme et de son environnement et devient, en 1968, délégué général de la Fondation pour la Sauvegarde de la Nature.
Est-ce les non-dits de la famille, les secrets si bien cachés de ses origines, qui font que le jeune Paul-Émile cherchera au loin, sur les horizons de glace, à percer les secrets de terres et de populations inconnues ?
Chaque fois que l’on apprend qu’un grand homme, pétri d’humanisme et d’amour de la planète et de ses habitants, a méconnu ses propres racines, on laisse malgré nous échapper un soupir.
Et l’aventure du judaïsme dans tout cela ? Et les terres immenses, morales, éthiques, philosophiques, d’une richesse inouïe, malheureusement laissées en friche… Qui a dit qu’on ne peut pas porter des Téfillin au pôle Nord, ou lire le Messilat Yécharim, dans une tente, à la lumière des fantastiques aubes boréales ?
L’un n’aurait pas exclu l’autre.
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