On a souvent entendu ces dernières semaines que les atrocités commises à Sim'hat Torah nous ramènent malheureusement à celles subies par les Juifs à l’époque de la Shoah. J’aimerais signaler un autre point de ressemblance : dans leur lutte pour la survie, les Juifs ont été constamment confrontés à des choix dramatiques et cruels : partir ou rester ? Confier les enfants à des familles ou institutions chrétiennes ? Laisser des parents âgés, afin de soi-même tenter d’échapper au danger ? Obéir aux ordres des Allemands ? Chabbath, Cacheroute… ? Etc.
Le drame de Sim'hat Torah et la capture effrayante de quelque 230 otages nous mettent à nouveau face à un terrible dilemme : à quoi sommes-nous tenus dans le cadre de la Mitsva du rachat des captifs ? Devons-nous nous soumettre aux exigences des terroristes pour sauver à tout prix ces Juifs de tous âges, dont les visages nous hantent ? Le débat Halakhique est complexe, les choix de nos responsables politiques et militaires ne le sont pas moins. On rêve bien entendu d’une nouvelle opération Entebbé.
On se souvient moins d’une des grandes figures de l’histoire du peuple juif :
Rabbi Méïr de Rothenbourg, l’un des plus grands maîtres de son temps, élève de Rabbi Yé’hiel de Paris, maître de Rabbi Ya’akov ben Acher, le Roch.
Les rois et princes de son temps, souvent à court d’argent, rançonnaient fréquemment les communautés juives en emprisonnant leurs rabbins. Voulant épargner ce sort à sa communauté, déjà appauvrie par les taxes et impôts, Rabbi Méïr chercha en 1286 à s’enfuir avec sa famille vers Erets Israël. Arrêté en chemin, il fut emprisonné sur ordre de l’empereur Rodolphe 1er dans la forteresse d’Ensisheim en Alsace. Il y mourut sept ans après, non sans avoir formellement interdit de payer l’énorme rançon exigée pour sa libération. Un Juif fortuné paya finalement cette rançon, 14 ans après son décès, exigeant seulement d’être enterré à ses côtés. Leurs deux tombes se dressent encore côte à côte à l’entrée du vieux cimetière juif de Worms, en Allemagne, miraculeusement épargné par les nazis…
Une note d’espoir, pour finir ? Ou comment la Providence divine peut à tout moment nous faire mériter miracles et prodiges ?
Nous sommes à Lyon, en 1944. La grande synagogue de la ville est restée ouverte et des Juifs, peu nombreux, font preuve d’un incroyable dévouement pour venir y prier, notamment le Chabbath.
Des militants du parti fasciste et collaborateur PPF s’en offusquent et décident d’y commettre un attentat, pour semer encore plus la terreur parmi les Juifs. Ils se présentent donc à la synagogue un vendredi soir, armés de revolvers et de grenades. Ils ferment derrière eux la grille, menacent le gardien dans sa loge, coupent le téléphone, prennent position dans la cour pour empêcher que quiconque prenne la fuite. Leur chef pousse alors la porte de la synagogue, juste au moment où l’office de Kabbalat Chabbath vient de commencer. Il porte plusieurs grenades qu’il compte jeter sur le petit groupe de fidèles (parmi eux, le futur Grand-Rabbin de France, Jacob Kaplan) qu’il entend chanter Lékha Dodi. Il pousse la porte d’un coup de pied sec, mais s’arrête frappé de stupeur : à ce moment précis, les Juifs se sont soudainement et comme un seul homme tournés vers lui, les bras levés, pour proclamer "Boï Kala, Boï Kala !", et accueillir la reine Chabbath ! Se croyant découvert et menacé, il jette de côté ses grenades (quelques blessés légers) et prend la fuite avec ses compagnons. Allez maintenant savoir quel mérite aura fait pencher la balance, et miraculeusement sauvé ces Juifs menacés d’une fin atroce ?
Puissions-nous, nous aussi, avec tout le peuple d’Israël, mériter miracles et prodiges et voir au plus vite, le retour de tous nos otages sains et saufs, en même temps que seront épargnés tous les soldats partis au combat contre l’'Amalek de notre temps !