Commençons une étude en plusieurs parties, liée au vol. Selon une analyse superficielle, nous pourrions croire que les lois liées au vol ne nous concernent pas ; nous sommes persuadés de n’avoir jamais volé personne. Le Talmud nous confronte avec une accusation surprenante : il affirme que la majorité des individus trébuchent dans le domaine du vol[1]!
Comment cela peut-il être le cas ? Il semblerait que la raison pour laquelle ils ne volent pas tient à la définition très étroite qu’ils ont de la signification du vol. Néanmoins la Torah, dans sa sagesse infinie, définit le vol de manière très différente. Selon la conception de la Torah, il est bien plus aisé de trébucher dans le domaine du vol que l’on pourrait s’imaginer.
De quelle manière notre définition du vol diffère tant de celle de la Torah ? Nous avons tendance à considérer le vol comme le fait de dérober de manière flagrante un objet à quelqu’un d‘autre. De nombreuses personnes ne trébuchent pas dans cette forme de vol. Le Talmud considère néanmoins le vol dans un sens bien plus large. Il voit le vol comme un moyen injustifié de priver notre prochain de ce qui lui appartient de manière légitime. En voici quelques exemples ; employer l’objet d’autrui sans sa permission expresse ; prendre l’objet de quelqu’un d’autre pour faire une plaisanterie ; emporter sans permission un objet peu onéreux, comme un échantillon de ketchup d’un restaurant, ou une serviette d’un hôtel. Les prochains mois, nous allons aborder en détail les nombreux aspects des lois liées au vol et développer un sens bien plus sophistiqué du respect de la propriété, de l’argent et de la vie privée de notre prochain.
Un certain nombre de Mitsvot de la Torah sont liées au vol. La source la plus connue se trouve dans les Dix Commandements ; la Torah nous prescrit : « Tu ne voleras point » (Lo Tignov)[2]. Il est moins connu que dans la Paracha Kédochim, la Torah nous prescrit aussi « Tu ne voleras point »[3]. Le Talmud explique que la Torah nous enseigne deux formes différentes de vol ; le vol dont il est question dans les Dix Commandements se réfère en réalité au kidnapping d’un individu[4]. Or, le vol mentionné dans la Paracha de Kédochim se réfère au vol d’un bien ou d’argent de quelqu’un autre. Les Rabbanim expliquent que le terme hébraïque employé pour le vol dans ce verset (la racine du terme est « Gonev ») fait référence à une forme spécifique de vol : le vol en secret, lorsque personne n’est présent.[5]Un exemple : lorsqu’un homme commet un cambriolage dans un logement où tout le monde est absent.
Deux versets plus tard, la Torah nous enjoint à nouveau de ne pas voler (Lo Tigzol).[6] Or, à cette occurrence, elle a recours à un autre mot hébraïque, dont la racine est « Guézel ». Les rabbins nous expliquent que ce terme décrit le vol en public. Par exemple, un homme qui vole une banque en présence d’autres personnes est coupable de Guézel.
Si on interroge quelqu’un sur la forme la plus grave de vol, le vol en secret ou le vol en public, il répondra certainement que voler publiquement est plus grave. Or, les Sages nous enseignent que voler en secret est plus répréhensible, pourquoi ? Ils expliquent qu’un voleur affiche un mépris flagrant pour la volonté de Hachem, car il bafoue ostensiblement le précepte de ne pas voler. Lorsque ce voleur vole en public, il indique de la même manière qu’il n’a aucune considération pour l’opinion des autres. Il ne redoute pas d’être considéré à leurs yeux de manière dégradante. Au contraire, un voleur qui vole uniquement en secret indique qu’il craint l’opinion des autres.
En conséquence, il fait preuve d’hypocrisie : il craint l’opinion des autres, mais n’a aucune considération pour l’avis de Hachem. Le voleur qui vole au grand jour est au moins cohérent dans son mépris de l’avis de Hachem et des autres sur lui.
La dernière forme de vol décrite dans la Torah se nomme « Ochek » qui se traduit par tricher vis-à-vis des autres. Cela se réfère à un homme qui refuser de payer à celui qui lui a prêté de l’argent, ou qui lui a donné des services en marchandise. Ochek est considéré moins sévèrement qu’un vol actif d’un objet appartenant à notre prochain.
[1] Baba Batra, 165a.
[2] Parachat Yitro, 20:13
[3] Kédochim, 19:11.
[4] Sanhédrin 86a - voir pour un développement de l’interdit de kidnapper et pour une explication sur comment les rabbins sont parvenus à la conclusion que le vol ici ne se réfère qu’au kidnapping.
[5] Baba Kama 79b.
[6] Kédochim, 19:13.