Nous aspirons tous au bonheur et le monde entier cherche les clefs qui vont y mener. Des forums en discutent, des sociologues et des philosophes se penchent sur la question, des milliers de livres ont été écrits sur le sujet, sans parvenir à apporter de vraies réponses.
Si le dicton populaire nous dit que l’argent ne fait pas le bonheur, ils n’en reste pas moins que nombreux sont ceux qui pensent que la voie royale qui y mène, passe par la richesse. L’aisance matérielle, personne ne peut le nier, règle beaucoup de soucis de ce monde, amène la respectabilité, parfois même le pouvoir et permet l’accès à de nombreux plaisirs. En hébreu, les mots "Ocher" (le bonheur) et "‘Ocher" (la richesse) se prononcent presque de la même façon, la différence ne tenant qu’à un son guttural – comme pour créer la confusion.
Chaque année en Israël, le Bitoua’h Léoumi (équivalent de la Sécurité sociale en France) publie des données sur la situation économique du pays et de ses habitants. Les derniers chiffres indiquent que 1/5 de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, pourcentage élevé pour un pays qui se porte bien économiquement. Les villes les plus touchées sont celles où vit la population orthodoxe (‘Harédim), comme Bné Brak où les revenus sont bas et les familles nombreuses.
Parallèlement à ces données, une enquête a été menée par l’Etat hébreu pour évaluer le niveau de bonheur des habitants. On a questionné les Israéliens sur leur sentiments de stress, d’angoisse, de solitude et de tristesse, mais également sur leur ressenti de sécurité, de sérénité, d’espoir en l’avenir et de satisfaction de la vie en général, en leur demandant également de préciser leur niveau de religiosité. Et là, surprise ! Ce même public ‘Harédi apparait comme le plus heureux du pays. Voici à priori des données contradictoires où pauvreté et bonheur semblent faire bon ménage dans une même population.
Le journaliste israélien Samy Perets du journal économique "The Marker" explique le phénomène en y donnant deux raisons : premièrement les religieux sont heureux de leur sort et deuxièmement, il existe dans ce public une entraide exceptionnelle. La famille, les voisins, les connaissances forment un tissu social solide qui apportera son soutien dans les moments difficiles et sera présent lors des joies. Chacun participe selon ses moyens à la Tsédaka et jamais une famille n’est abandonnée dans la détresse. Les organismes d’aide aux nécessiteux et aux malades sont très nombreux, sans compter les initiatives personnelles d’un public qui est en éveil et sait reconnaitre le désarroi chez son prochain. Ces deux éléments sont les clefs du bonheur et se confirment sur le terrain.
La Paracha de Térouma rapporte l’empressement des Bné Israël à participer par des dons à la construction du Tabernacle, jusqu'à ce que Moché leur demande d’arrêter leur contribution. D’autre part, nos Sages rapportent (Yébamot 79a) qu’un des trois traits par lequel un Juif se distingue est Guémilout ‘Hassadim (aide à son prochain). Le fait de donner est une qualité que nous a transmise notre ancêtre Avraham, qui excellait dans cet attribut. Le bonheur en découle pour le bénéficiaire bien sûr, mais surtout pour le donneur, sachant que la vraie entrave au bonheur est l’égoïsme et le repli sur soi.
Rav Daniel Scemama