‘Hanouka est l’une des fêtes juives les plus célébrées — tout le monde prend plaisir à allumer de belles ‘hanoukiot (candélabres à huit branches utilisés à ‘Hanouka) et à manger beaucoup de beignets ! Mais au-delà de ce souvenir agréable de la victoire des ‘hachmonaïm sur les puissants Grecs, se cache une bataille idéologique fondamentale, qui fait encore rage à notre époque. Les idéologies juives et grecques représentent deux conceptions opposées du but de la vie.
Un midrach nous raconte qu’un chef romain demanda à Rabbi Akiva quelle était la meilleure création : celle d’Hachem ou bien celle de l’homme. Étonnamment, Rabbi Akiva répondit que la création humaine était préférable. Ceci, parce qu’Hachem fait pousser des produits immangeables comme les grains de blé, qui ne servent à rien [à l’état brut], tandis que l’homme récolte ce grain et, par son travail, le transforme en pain.
Le midrach nous informe que Rabbi Akiva savait que le Romain s’attendait à ce qu’il réponde que la création d’Hachem est plus remarquable, et qu’il comptait demander ensuite pourquoi l’homme a besoin de pratiquer la brit mila, c’est-à-dire de retirer une partie du corps humain, comme si l’on voulait améliorer l’œuvre d’Hachem.
Rabbi Akiva évita donc cette question en affirmant que la création de l’homme était en réalité plus élevée. [1] Comment comprendre ce midrach ? Ce que fait Hachem est certainement bien plus prestigieux que ce que fait l’homme !
Le désaccord qui se cache derrière cette discussion est en fait bien plus profond. Ce Romain et l’idéologie gréco-romaine en général, mettent l’accent sur la perfection de l’homme. Les Grecs adulaient le corps et l’intellect humains ; l’homme était, selon eux, naturellement parfait. Les Romains adoptaient également cette philosophie. Par conséquent, la pratique juive de la brit mila était particulièrement abhorrée et odieuse à leurs yeux ; elle impliquait la transformation de quelque chose de parfait et son endommagement.
Rabbi Akiva incarnait la conception de la Thora selon laquelle Hachem a délibérément créé le monde de manière imparfaite afin que l’homme puisse le parfaire et se parfaire. C’est la raison pour laquelle Il créa des grains de blé « inutiles » ; bien évidemment, Hachem est infiniment plus grand que l’être humain, mais Il souhaite que l’homme transforme ce grain de blé en un produit meilleur.
C’est aussi ce que symbolise la brit mila : l’homme n’est pas parfait de naissance. Il doit travailler dur, en particulier pour exploiter et maîtriser ses tendances naturelles et les utiliser pour grandir et s’améliorer. La vie est une véritable opportunité de combattre tous nos penchants naturels. [2]
Cela dit, le fait que les Grecs aient voulu proscrire la mitsva de brit mila ne nous surprend pas. Ils voulaient supprimer l’idée d’un homme imparfait, d’une vie qui doit être utilisée pour perfectionner sa personnalité, pour essayer d’éradiquer nos défauts et de développer nos qualités.
Les Juifs luttèrent contre cet interdit de toutes leurs forces et finirent par triompher des Grecs. De même, nous avons survécu aux Romains et à toutes les philosophies qui promeuvent la perfection innée de l’être humain. Toutefois, la bataille continue. Nous vivons dans une société qui ne met quasiment pas l’accent, voire même qui ignore complètement le progrès personnel ; elle prône plutôt la jouissance des plaisirs physiques.
Nous savons pourtant que la réelle satisfaction s’obtient quand on s’élève, quand on devient une personne meilleure, plus spirituelle, un conjoint plus gentil et attentionné, un parent plus attentif et dévoué, et, surtout, un meilleur serviteur d’Hachem.
[1] Midrach Tan’houma, Tazria7.
[2] Entendu du rav Yaacov Hillel chlita.