Le Midrach est connu, selon lequel les Grecs ont voulu imposer aux Juifs d’écrire sur la corne de leurs bœufs « Nous n’avons aucune part dans le D.ieu d’Israël » (Midrach Rabba 2, 4). Il est assez surprenant qu’ils aient voulu forcer d’une part les Juifs à nier leur foi ; comment les obliger, car « dire » n’est pas « faire » ! De plus, que fait le bœuf ici ? Et pourquoi précisément s’agit-il d’une corne de bœuf ? Il est essentiel de comprendre ces divers points pour confronter l’hellénisme à la Torah ! De plus, il s’agit, ici précisément, de notre affrontement avec notre époque actuelle, de façon évidente, quoique non énoncée officiellement.
En premier lieu, il importe de comprendre que le déterminisme, qui s’oppose au libre choix, est l’idée essentielle de l’hellénisme : le destin conduit le monde. Il leur faut donc s’inscrire dans cette fatalité qui est à la source de la tragédie grecque. Mais au-delà du déterminisme, c’est le D.ieu d’Israël que les enfants d’Israël devaient renier, car il s’agit d’une transcendance qui dépasse le temps et l’espace. C’est pourquoi les Grecs voulaient imposer leur idéologie – adorer les forces de la nature – au peuple d’Israël.
Que vient faire le bœuf dans cette optique ? Le Rav Moché Chapira explique que pour apprécier le positif, il faut d’abord connaître le négatif. « Il fut soir, il fut matin ». Le soir permet d’apprécier le matin. Le bœuf est d’une part symbole, dans la Guemara, de l’animal qui heurte, qui crée un dommage, mais par ailleurs il est aussi le symbole de l’animal le plus noble. De même, les cornes peuvent endommager, mais elles sont aussi un élément de force, de vigueur. Le terme même de – Kérèn – exprime un capital, une valeur fondamentale, essentielle. C’est ainsi qu’il importe de comprendre qu’en réalité, l’important est l’utilisation que l’on fait de la matière, du « ’Olam Hazé ». Les Grecs peuvent exiger ce qu’ils veulent (le bœuf rappelle le bœuf Apis, idole égyptienne), mais le symbole de la corne du bœuf peut et doit être transformé.
A Hanouka, on lit toujours le Chabbath les Parachiot de la Torah qui se rapportent à Yossef, le fils de Yaacov Avinou et Rahel Iménou. On sait que c’est lui qui, par sa naissance, du fait même qu’il vient au monde, sauve sa mère d’Essav, car si elle avait été stérile, elle craignait que Yaacov la répudierait et qu’Essav l’épouserait (voir Rachi dans Beréchit 30,29). Yossef a vécu 22 ans loin de son père et est resté fidèle à la tradition. Les vêtements qu’il a portés symbolisent sa situation : heureux dans sa jeunesse, il a une tunique spéciale pour lui ; quand il souffre, cette tunique est déchirée, puis son vêtement lui est arraché par la femme de Poutiphar, et il est jeté en prison, où il revêt les habits d’un prisonnier. La Torah nous explique, en effet, qu’il doit changer d’habit avant de paraître devant Pharaon. A la fin, il devient vice-roi et reçoit des habits royaux. Yosseph HaTsadik représente le lien entre l’intériorité – souffrance ou élévation – et l’apparence extérieure, que symbolisent les habits. Le bœuf peut être symbole de « Mazik » – créer un dommage – mais aussi d’une supériorité sur les animaux, surtout grâce à ses cornes qui le protègent. C’est le sens de la bénédiction de Moché Rabbénou qui assimile les 2 cornes aux 2 fils de Yossef : Ephraïm et Menaché.
Ici, Hanouka trouve sa signification actuelle. Il n’y a pas eu de génération où l’on n’a pas tenté de convertir ou d’assimiler les Juifs. Le symbole de ce refus, c’est la lumière que nous allumons à Hanouka. C’est la réponse de la « Néchama » de ceux qui ont reçu la Révélation, il y a 1 500 ans, et continuent cette tradition. Il est facile, apparemment, d’écrire sur la corne du bœuf, mais ce dont il faut être conscient, c’est que le danger de l’assimilation existe, quelle que soit l’époque. Le Hafets Haïm avait écrit un livre, Nid’hei Israël, sur les dangers de l’assimilation aux Etats-Unis. Il importe de ne pas perdre cet objectif de notre perspective. Quand Aharon Ha-Cohen a vu, dans le désert, les 12 chefs de tribus apporter leurs offrandes au Tabernacle, il s’est senti frustré. « Mais moi, je n’apporte rien ». Et alors, HaKadoch Baroukh Hou lui a fait remarquer : « Ce que toi tu fais chaque jour, tu allumes la Menorah, tu entretiens l’encens, c’est chaque jour que tu le fais ». Et à ce commentaire de Rachi, Ramban ajoute : « Une inauguration du Temple sera faite par tes descendants, par les Asmonéens, qui étaient Cohanim. Et cette inauguration restera vivante, dans le peuple d’Israël, même quand le Temple sera détruit ». Cette inauguration, c’est la lumière de Hanouka, nous le savons, qui l’évoque. Soyons fidèles à cette tradition, en maintenant aujourd’hui la présence de la lumière divine, de la transcendance, dans le peuple d’Israël.