« Ces bougies que nous allumons, pour les miracles, les prodiges, les sauvetages que Tu as accomplis en faveur de Tes saints Cohanim. » (Extrait du texte Hanérot Halalou)
« À l’époque de Matityahou, le fils de Yo’hanan, le Cohen Gadol, le Hasmonéen et ses fils… » (Extrait du texte 'Al Hanissim)
Les Kohanim jouèrent un rôle prépondérant dans la rébellion contre la puissante armée grecque. Ce n’est pas un hasard si c’est précisément les descendants de Lévi qui furent le plus à même de défier cet empire.
On trouve une allusion à cette force exceptionnelle des ‘Hachmonaïm, plusieurs siècles avant l’histoire de ’Hanouka. Quand Moché Rabbénou bénit la tribu de Lévi (« Bénis, Hachem son armée et Tu agréeras l’activité de ses mains »[1]), Rachi explique qu’il s’agit de l’armée des ’Hachmonaïm qui combattront les oppresseurs grecs[2]. Cela signifie que Moché pria pour le succès des Léviim dans cette bataille. Le Midrach Tan’houma compare les Léviim aux Grecs : « La tribu de Lévi est la troisième et la Grèce correspond au troisième [exil] ; Lévi s’écrit avec trois lettres et Yavan (la Grèce) également ; les Cohanim offraient les veaux [en Korbanot] et les Grecs décrétèrent d’écrire sur les cornes des bœufs[3] ; les Grecs étaient nombreux et les Cohanim en petit nombre. »[4]
Toutes ces comparaisons soulèvent une question : pourquoi est-ce précisément Lévi qui eut cette force de contrecarrer celle de l’empire grec ? Une meilleure analyse nous permettra de déceler un point commun entre ces deux protagonistes de l’histoire de ’Hanouka. Il s’agit d’un trait de caractère que les Grecs utilisèrent de manière négative, et que les Cohanim employèrent à bon escient ; la Azout, que l’on traduit généralement par « effronterie, impudence ».
Le prophète Daniel annonça que quatre royaumes allaient exiler le peuple juif. Le troisième, représenté par le léopard, correspond à l’exil grec[5]. Le léopard est connu pour son impudence, comme le prouve la Michna qui nous exhorte à être effrontés comme le léopard, dans notre service divin[6]. Le roi Névoukhadnétsar, dans son rêve, vit une statue composée de quatre parties – qui font également allusion aux quatre exils. Chaque partie était faite d’un métal différent et la troisième était en cuivre, qui est également assimilé à la Azout, comme l’affirme le verset : « Car je savais que tu es opiniâtre… que ton front est d’airain »[7].
Pour comprendre le dénominateur commun entre la Grèce, le léopard et le cuivre, il nous faut définir exactement ce qu’est la Azout. L’effronté se comporte souvent avec insolence vis-à-vis d’une personne plus importante, plus grande ; il n’a pas peur de s’opposer ou de lutter contre d’autres, quand bien même ils seraient plus forts ou plus nombreux ; son attitude ne sied pas vraiment à son statut. L’effronté se croit donc plus grand que ce qu’il est réellement et il agit comme s’il était hiérarchiquement supérieur. Aussi, le léopard est Az (effronté), parce qu’il ne craint pas les animaux plus forts que lui et se montre prêt à agir d’une manière qui ne reflète pas vraiment ses forces. Le cuivre a également cet aspect « effronté » dans le sens où sa couleur orangée le fait ressembler à l’or, qui est un métal ben plus précieux que lui !
Les Grecs se présentaient comme bien plus respectables et sages qu’ils ne l’étaient réellement ; ils étaient moralement très imparfaits (au bas mot !). De plus, ils rejetaient l’idée d’une Force Suprême et pensaient que l’intellect humain pouvait, à lui seul, comprendre et résoudre tous les problèmes – l’effronterie par excellence ! D’autant qu’en tant qu’armée également, ils étaient beaucoup moins puissants qu’ils ne le laissaient paraître, c’est leur impudence qui leur permit de dominer le monde de cette façon et non leur réelle force militaire.
La Azout peut cependant s’avérer positive dans la 'Avodat Hachem. Quand la Michna nous enjoint d’être « Az Kanamer – effronté comme le léopard », cela signifie qu’il ne faut pas redouter les moqueries des uns et des autres devant notre service d’Hachem, même s’ils sont bien plus nombreux. Il ne faut pas non plus avoir peur de s’opposer à ceux qui bafouent le respect de la Torah et qui menacent le bien-être spirituel du peuple juif, même s’ils sont plus forts et plus nombreux. La Azout se traduirait alors par « audace ». Ainsi, quand on parle de la Azout de Lévi, cela fait référence à la destruction de la ville de Chekhem après l’enlèvement de sa sœur Dina. Il n’eut pas peur de combattre une ville entière. Ya'acov critiqua cet acte, parce qu’il provenait d’un sentiment de colère malsaine, mais il l’évoque tout de même lors de ses bénédictions aux tribus, pour montrer qu’en étant bien utilisé, ce trait de caractère peut être bénéfique, il constitue une qualité.
Par la suite, les descendants de Lévi firent preuve de Azout lors de la faute du veau d’or et c’est également cette qualité qui démarqua Pin’has, quand il défendit l’honneur d’Hachem en tuant Zimri et qu’il sauva ainsi l’ensemble du peuple juif.
Plusieurs siècles après l’incident avec Dina, les Grecs décrétèrent que toute jeune fille devait s’unir avec un officier grec avant son mariage. Le Midrach Tan’houma raconte qu’avant le mariage d’une sœur d’un ’Hachmonaï, celle-ci supplia ses frères de l’épargner d’une telle souillure. Les frères exaucèrent son souhait et tuèrent l’officier grec. C’est ainsi que commença leur rébellion contre l’armée grecque.
Les Léviim nous enseignent donc comment utiliser la Azout dans la 'Avodat Hachem. Parallèlement, les Grecs montrent les dangers de ce défaut.
[1] Dévarim 33,11.
[2] Ibid.
[3] Selon ce décret, les Juifs devaient inscrire sur les cornes de bœuf qu’ils n’étaient pas liés au D. d’Israël (Béréchit Raba 2,4).
[4] Midrach Tan’houma, Vayé’hi 14.
[5] Daniel 7,6.
[6] Avot 5,23.
[7] Yéchaya 48,4. Cette comparaison est faite dans d’autres endroits de la Torah.