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Torah écrite (pentateuque) » Genèse (Berechit)

Chapitre 29

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29,1
Jacob se remit en chemin et alla vers la terre des enfants de l'Orient.
Ya’aqov se mit en chemin (littéralement : « souleva ses pieds »)

Lorsqu’il a reçu la bonne nouvelle qui lui annonçait la protection divine, son cœur a comme soulevé ses pieds et il lui a été facile de marcher. C’est ce que l’on explique dans Beréchith raba (70, 8)

29,2
II vit un puits dans les champs et là, trois troupeaux de menu bétail étaient couchés à l’entour, car ce puits servait à abreuver les troupeaux. Or la pierre, sur la margelle du puits, était grosse.
Ils abreuvaient les troupeaux

Les bergers abreuvaient les troupeaux. Le texte s’exprime de manière elliptique

29,3
Quand tous les troupeaux y étaient réunis, on faisait glisser la pierre de dessus la margelle du puits et l'on abreuvait le bétail, puis on replaçait la pierre sur la margelle du puits.
On y réunissait

Ils avaient l’habitude de se réunir, parce que la pierre était grande

On roulait

Le Targoum traduit par un verbe au présent : « ils roulent ». Une action au présent s’exprime parfois par un futur, parfois par un passé, car si elle se renouvelle constamment elle a été et elle sera

Et on remettait

Le Targoum traduit par un verbe au présent : « ils remettent »

29,4
Jacob leur dit: "Mes frères, d'où êtes vous?" Ils répondirent: "Nous sommes de Haran."
29,5
II leur dit: "Connaissez-vous Laban, fils de Nahor?" Ils répondirent: "Nous le connaissons."
29,6
Il leur dit: "Est-il en paix?" Et ils répondirent: "En paix; et voici Rachel, sa fille, qui vient avec son troupeau."
Vient avec le bétail

L’accent tonique est mis sur la dernière syllabe, et le Targoum traduit par un verbe au présent. Plus loin, dans : « Ra‘hel vint » (verset 9), l’accent est mis sur la première syllabe, et le Targoum traduit par un verbe au passé. Dans le premier cas, l’action est en cours, dans le second elle a déjà eu lieu

29,7
"Mais," reprit-il, "le jour est encore long, il n'est pas l'heure de faire rentrer le bétail: abreuvez les brebis et les menez paître."
Il est encore grand jour

Comme il avait vu que le bétail était couché, il pensait que les bergers voulaient le rassembler pour le faire rentrer, et mettre ainsi fin à leur pâture. C’est pourquoi il leur a dit : « il est encore grand jour », c’est-à-dire : « Si vous êtes rémunérés à la journée, vous n’avez pas achevé votre tâche. Et même si ces bêtes vous appartiennent, alors malgré tout, “il n’est pas temps de rassembler le bétail...” » (Beréchith raba 70, 11)

29,8
Ils dirent: "Nous ne saurions, jusqu'à ce que tous les troupeaux soient rassemblés: on déplacera alors la pierre qui couvre l'orifice du puits et nous ferons boire les brebis."
Nous ne le pourrons pas

Les abreuver, parce que la pierre est trop grande

On roulera

[Même mot qu’au verset 3], que le Targoum traduit ici par un verbe au futur : « ils rouleront »

29,9
Comme il s’entretenait avec eux, Rachel vint avec le troupeau de son père car elle était bergère.
29,10
Lorsque Jacob vit Rachel, fille de Laban, frère de sa mère et les brebis de ce dernier, il s'avança, fit glisser la pierre de dessus la margelle du puits et fit boire les brebis de Laban, frère de sa mère.
Ya’aqov s’approcha

Comme quelqu’un qui retire le bouchon de l’ouverture d’une bouteille, cela pour te faire savoir que sa force était grande (Beréchith raba 70, 12)

29,11
Et Jacob embrassa Rachel et il éleva la voix en pleurant.
Il pleura

Car il a su à ce moment sous l’inspiration de l’esprit saint qu’elle ne partagerait pas sa tombe [dans le caveau de Makhpéla]. Autre explication : Parce qu’il était arrivé les mains vides. Il s’est dit : « Eli’èzer, le serviteur de mon grand-père, avait apporté des anneaux, des bracelets et autres présents, et moi, je n’ai rien dans les mains ! ». Elifaz, le fils de ‘Essaw, l’avait en effet poursuivi, sur l’ordre de son père, pour le tuer, et il l’avait rattrapé. Mais comme Elifaz avait grandi « dans le giron » de Yits‘haq (Devarim raba 2, 13), il avait renoncé à son projet meurtrier. Il lui avait dit : « Comment vais-je faire pour obéir à mon père ? » Ya’aqov lui avait répondu : « Prends tout ce que je possède car, comme dit le dicton (Nedarim 64b, Beréchith raba 71, 6), “le pauvre est considéré comme mort” »

29,12
Et Jacob apprit à Rachel qu'il était parent de son père, qu'il était le fils de Rébecca. Elle courut l'annoncer à son père.
Qu’il était frère de son père

Un proche parent de son père, comme dans : « car nous [Avram et Lot] sommes frères » (supra 13, 8). Et selon le midrach : s’il se comporte avec ruse, je saurai moi aussi être son « frère » en ruse. Et si c’est un homme honnête, je le serai aussi, car je suis le fils de Rivqa, sa sœur, qui est une femme honnête (Baba Batra 123a, Beréchith raba 70, 13)

Le raconter à son père

Comme sa mère était morte, elle ne pouvait le raconter qu’à lui seul (Beréchith raba 70, 13)

29,13
Aussitôt que Laban eut appris l'arrivée de Jacob, le fils de sa sœur, il courut au devant de lui, il l'embrassa, le couvrit de baisers et l'emmena dans sa demeure. Jacob raconta à Laban tous ces événements.
Il courut à sa rencontre

Il pensait que Ya’aqov était chargé d’argent, puisque le serviteur de la maison était venu autrefois au même endroit accompagné de dix chameaux chargés de cadeaux

Il l’étreignit

Lorsqu’il a vu qu’il n’avait rien, il s’est dit : « Peut-être a-t-il apporté des pièces d’or et les porte-t-il sur lui ? »

Il l’embrassa

Il s’est dit : « Peut-être a-t-il apporté des pierres précieuses et les porte-t-il dans sa bouche ? »

Il raconta à Lavan

Qu’il n’était venu que parce qu’on l’y avait forcé, étant menacé par son frère, et qu’on l’avait dépossédé de ses biens

29,14
Laban lui dit: "Tu n'es rien moins que mon corps et ma chair!" Et il demeura avec lui un mois durant.
Mais tu es mon corps et ma chair

Je n’ai plus de raison, désormais, de t’accueillir chez moi, puisque tu n’as rien. Cependant, eu égard à notre parenté, je t’hébergerai pendant un mois. Et c’est ce qu’il a fait, mais pas gratuitement, car Ya’aqov gardait ses troupeaux

29,15
Alors Laban dit à Jacob: "Quoi! parce que tu es mon parent, tu me servirais gratuitement? Déclare moi quel doit être ton salaire."
Est-ce parce que tu es mon frère

C’est une interrogation

Que tu me serviras gratuitement

Le verbe est au passé précédé du waw conversif. C’est ainsi que tout verbe au passé, auquel on a ajouté un waw comme préfixe, se transforme en futur

29,16
Or, Laban avait deux filles: le nom de l'aînée était Léa, celui de la cadette Rachel.
29,17
Léa avait les yeux faibles; Rachel était belle de taille et belle de visage.
Ternes

Parce qu’elle se croyait destinée à ‘Essaw, et elle en pleurait. Tout le monde disait : « Rivqa a deux fils, et Lavan deux filles. L’aînée sera pour l’aîné, et la cadette pour le cadet » (Beréchith raba 70, 16)

De taille (torr)

Ce sont les traits du visage, comme dans : « Il la dessine (yethaaréhou) à la craie... et la proportionne (yethaaréhou) au compas » (Yecha’ya 44, 13). En français médiéval : « conpas »

De visage

C’est l’éclat du visage

29,18
Jacob avait conçu de l'amour pour Rachel. II dit: "Je te servirai sept ans pour Rachel, ta plus jeune fille."
Je te servirai sept ans

Ce sont les quelques jours dont lui avait parlé sa mère (Beréchith raba 70, 17) : « tu demeureras avec lui quelques jours » (supra 27, 44). Et il en a été effectivement ainsi, puisqu’il est écrit : « elles furent à ses yeux comme “quelques jours” » (verset 20)

Pour Ra‘hel

Pourquoi toutes ces précisions ? Parce qu’il savait que Lavan était rusé. Il lui a dit : « je te servirai... pour Ra‘hel ». Peut-être prétendras-tu qu’il s’agit d’une autre Ra‘hel en ville. Aussi le texte fixe-t-il : « ta fille ». Et si tu devais décider de changer le nom de Léa et de la nommer Ra‘hel, le texte précise : « la petite ». Et tout cela ne lui a servi à rien, puisque Lavan l’a néanmoins trompé

29,19
Laban répondit: "J'aime mieux te la donner que de la donner à un autre époux: demeure avec moi."
29,20
Jacob servit, pour obtenir Rachel, sept années et elles furent à ses yeux comme quelques jours, tant il l'aimait.
29,21
Jacob dit à Laban: "Donne-moi ma femme, car mon temps est accompli et je veux m'unir à elle."
Car mes jours sont accomplis

Le temps que m’avait dit ma mère. Et aussi mon temps est arrivé, puisque j’ai quatre-vingt-quatre ans. Quand donc donnerai-je naissance aux douze tribus ? C’est pourquoi il est écrit : « je viendrai vers elle ». Et pourtant le plus dévergondé des hommes ne parle pas ainsi ! S’il l’a fait, c’est par impatience de donner naissance à sa descendance (Beréchith raba 70, 18)

29,22
Laban réunit tous les habitants du lieu et donna un festin.
29,23
Mais, le soir venu, il prit Léa sa fille et la lui amena et Jacob s'unit à elle.
29,24
Laban avait aussi donné Zilpa, son esclave, à Léa, sa fille, comme esclave.
29,25
Or, le matin, il se trouva que c'était Léa; et il dit à Laban: "Que m'as-tu fait là! N'est ce pas pour Rachel que j'ai servi chez toi? Et pourquoi m'as-tu trompé?"
Ce fut

Mais pendant la nuit, elle n’était pas Léa, car Ya‘aqov avait donné à Ra‘hel des signes de reconnaissance. Lorsque celle-ci a vu qu’on lui amenait Léa, elle s’est dit : « Ma sœur va subir une humiliation ! ». Elle lui a donc transmis ces signes (Meguila 13b)

29,26
Laban répondit: "Ce n'est pas l'usage, dans notre pays, de marier la cadette avant l'aînée.
29,27
Achève la semaine de celle ci et nous te donnerons également celle là en échange du service que tu feras encore chez moi pendant sept autres années."
Remplis la semaine de celle-ci

Le mot chevou‘a (« semaine ») est à l’état construit, car le chin est ponctué d’un cheva : « la semaine de celle-ci ». Ce sont les sept jours que dure une noce (Yerouchalmi Mo‘èd qatan 1, 7). Et l’on ne peut pas dire que l’expression signifie : « cette semaine-là », car si tel était le cas, le chin aurait dû être ponctué d’un qamats (chavou‘a). De plus, le nom chevou‘a est masculin, ainsi qu’il est écrit : « puis tu compteras sept (chiv’a, et non chéva’) semaines » (Devarim 16, 9), [de sorte que l’on aurait dû avoir ici : chevou‘a zè, et non : chevou‘a zoth]. C’est pourquoi le mot chevou‘a signifie ici une période effective de sept jours. En français médiéval : « septaine » »

Et nous te donnerons

Le mot est au pluriel avec un hé en suffixe, comme dans : « allons, descendons, confondons » (supra 11, 7), « cuisons-les » (supra 11, 3). Ici aussi, le verbe signifie : « nous allons donner »

Egalement celle-là

Immédiatement après les sept jours de la noce, et tu me serviras après le mariage

29,28
Ainsi fit Jacob, il acheva la semaine de la première; puis Laban lui accorda Rachel, sa fille, pour épouse.
29,29
Laban donna, à Rachel sa fille, Bilha, son esclave, pour qu'elle devint la sienne.
29,30
Jacob s'unit pareillement à Rachel et persista à aimer Rachel plus que Léa; et il servit encore chez Laban sept autres années.
Encore sept autres années

« Autres » semblables aux premières. De même que Ya’aqov avait servi fidèlement pendant les premières années, de même a-t-il servi fidèlement les autres années, bien que Lavan l’eût trompé la première fois

29,31
Le Seigneur considéra que Léa était dédaignée et il rendit son sein fécond, tandis que Rachel fut stérile.
29,32
Léa conçut et enfanta un fils. Elle le nomma Ruben "parce que, dit elle, le Seigneur a vu mon humiliation, de sorte qu'à présent mon époux m'aimera."
Elle appela son nom Reouven (Reou vén)

Nos rabbins ont expliqué (Berakhoth 7b) : Elle a dit : « Voyez (reou) la différence entre (bén) mon fils et le fils de mon beau-père qui a vendu le droit d’aînesse à Ya’aqov ! Celui-ci [Reouven] ne le vendra pas à Yossef, et il ne se plaindra pas de lui, [à savoir de la préférence dont il sera l’objet]. Et non seulement il ne plaindra pas de lui, mais il s’efforcera de le faire sortir du puits ! »

29,33
Elle conçut de nouveau et enfanta un fils. Elle dit: "Parce que le Seigneur a entendu que j’étais dédaignée, il m’a accordé aussi celui là." Et elle l’appela Siméon.
29,34
Elle conçut de nouveau et enfanta un fils. Elle dit: "Ah! désormais mon époux me sera attaché, puisque je lui ai donné trois fils." C'est pourquoi on l'appela Lévi.
Cette fois mon mari m’accompagnera

Comme les matriarches étaient prophétesses, elles savaient que douze tribus naîtraient de Ya’aqov (Midrach tan‘houma Wayétsé 9). Or, il a épousé quatre femmes. Elle a donc voulu dire : « Il n’aura plus désormais à se plaindre de moi, puisque j’ai pris toute ma part en lui donnant trois fils » (Berakhoth 60a)

C’est pourquoi

Pour chacun des fils à l’occasion de la nomination duquel il est écrit : « c’est pourquoi », cette expression est l’annonce qu’il aura une descendance nombreuse, sauf pour la tribu de Léwi, chargée du transport de l’Arche Sainte, dont toute faute commise par ses membres était passible de mort (Beréchith raba 71, 4)

Il appela son nom Léwi

Le sujet du verbe « appeler » est ici au masculin (qara), alors qu’il est au féminin (watiqra ou qarea) pour les autres. Il existe un midrach dans Devarim raba : le Saint béni soit-Il a chargé l’ange Gavriel d’amener l’enfant devant Lui et c’est Lui qui lui a donné ce nom. Il lui a offert les vingt-quatre prérogatives dues aux prêtres. C’est parce qu’Il l’a accompagné (lewahou) de ces cadeaux qu’Il lui a donné le nom de Léwi (« accompagné »)

29,35
Elle conçut encore et mit au monde un fils et elle dit: "Pour le coup, je rends grâce à l’Éternel!" C’est pourquoi elle le nomma Juda. Alors elle cessa d’enfanter.
Cette fois

D’avoir pris plus que ma part. Désormais, j’ai de quoi remercier

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