Les deux sections hebdomadaires qui seront lues cette semaine sont particulièrement riches en enseignement. Parmi les recommandations éthiques qui sont adressées aux hommes, certaines concernent naturellement les liens familiaux.
Un verset bien connu de la Paracha de Kédochim mentionne ainsi le respect des parents « Un homme, sa mère et son père ils craindront » (Lévitique 19.3). Les Sages se sont interrogés sur la syntaxe étonnante de ce verset qui passe du singulier « un homme » au pluriel « ils craindront » et qui évoque la mère avant le père, alors que dans les 10 commandements, c’est l’inverse « Tu respecteras ton père et ta mère ».
Parmi les différentes explications données à ces versets, les Maîtres de notre tradition souligne que ces préséances données une fois à la mère et une fois au père ont vocation à mettre les deux parents sur un même pied d’égalité et à éviter les écueils dans lesquels la nature humaine pourrait tomber. En effet, un homme est naturellement porté à « craindre » son père qui incarne une figure d’autorité, aussi la Torah a mentionné la mère en premier pour rappeler aux hommes qu’ils doivent tout autant craindre leur mère que leur père. Inversement, la nature humaine est spontanément portée à « respecter » la mère, qui incarne la douceur et la sollicitude à l’égard de ses enfants, aussi la Torah nous rappelle de respecter de la même manière notre père en le mettant en premier dans le verset évoquant le « respect » des parents.
Il est par ailleurs très significatif que le respect des parents figure dans le décalogue parmi les cinq premiers commandements de la Torah qui sont supposés incarner les relations entre « l’homme et son Créateur », et non dans les cinq suivants qui sont dédiés aux relations entre « l’homme et son prochain ». La Torah nous rappelle ainsi que le respect des parents est directement lié au respect que l’homme éprouve à l’égard du Maître du monde.
De très beaux développements du Traité Kidouchin du Talmud de Babylone (pages 30 et suivantes) sont consacrés au respect des parents. Et nos Maîtres de nous dire que trois associés sont à l’œuvre dans la naissance d’un enfant : le père, la mère et le Maître du monde. Aussi, l’Eternel observe tout particulièrement le respect qu’un homme manifeste à ses parents car il traduit sa conscience de la dette qu’il a à l’égard de ses parents. L’homme ignore bien souvent toute la bonté, les efforts, et l’énergie que ses parents ont déployés pour lui lorsqu’il était enfant ; de même, à une échelle différente, mais l’effort de gratitude est de la même nature, l’homme ignore tout de la sollicitude et des miracles permanents que l’Eternel accomplit pour lui. Seuls des efforts constants, réguliers pour se remémorer l’abnégation et le dévouement des parents permettent à l’homme de ne pas sombrer dans l’ingratitude ; de même, pourrait-on dire, l’homme doit éveiller en permanence en lui-même les sentiments de reconnaissance et de gratitude à l’égard du Maître du monde.
Cette démarche de gratitude ne consiste pas seulement à « remercier » l’Eternel mais, en outre, à porter un regard neuf et positif sur la vie et le monde. En effet, en faisant l’effort régulier de se remémorer les bontés innombrables de D.ieu à notre égard, l’homme ancre dans sa conscience la conviction qu’il n’est pas seul aux commandes de sa vie mais qu’il est accompagné en toutes choses par la providence divine. Il peut alors porter un regard optimiste sur sa vie, s’affranchir des limites et des barrières que lui imposent la réalité matériel du monde, et pénétrer plus profondément dans toutes les richesses que le Maître du monde a mises en lui.
Enfin, c’est au contact des parents que l’homme apprend en premier la nécessité de l’obéissance et à se soumettre à une autorité extérieure. Or, c’est précisément grâce à cette maîtrise de soi, cette capacité à contraindre son désir pour se soumettre à un ordre extérieur, que l’homme peut prétendre progresser dans le chemin de la « Kédoucha », de la « sainteté ».
Aussi était-il nécessaire que cette Sidra consacrée à la « sainteté » évoque le « respect des parents ».
Puisse l’Eternel nous permettre de progresser dans le respect de cette Mitsva, et nous permettre de nous rapprocher de Lui en décillant nos yeux et en nous permettant de voir toutes Ses bontés.