À la fin de la Paracha précédente, Aharon et ses fils reçurent l’ordre de rester dans le Ohel Mo'èd (la Tente d’assignation) durant sept jours complets, tandis que Moché inaugurait le service. Durant cette semaine, Moché érigeait le Michkan quotidiennement, effectuait lui-même le Service, puis démolissait le Tabernacle. Pendant ces sept jours, la Chékhina n’y résida pas du tout et tout ce que fit Moché était donc une sorte de préparation au fonctionnement du Michkan. La Paracha de cette semaine commence par parler du jour où la Chékhina résida et le décrit comme « le huitième jour », impliquant une continuation avec les sept précédents.
Rav David Feinstein demande pourquoi la Torah considère cette occurrence comme « le huitième jour ». Les sept premiers jours ne furent qu’un simple préliminaire. Il aurait donc été plus logique de parler du « premier jour » du Michkan et d’évoquer la semaine qui précéda comme une autre entité. Or, la Torah tient à associer les sept jours passés, au point de nommer cette Paracha « Chémini » (huitième). Quel message veut-elle nous véhiculer ?
Rav Feinstein affirme que la leçon que l’on en tire est fondamentale. Dans le domaine spirituel, la préparation est presque aussi importante que l’acte lui-même. Si la Torah l’avait appelé « premier jour » et non « huitième jour », elle aurait laissé sous-entendre que la préparation est assez futile et qu’elle n’est pas intrinsèquement liée à l’acte. Or, elle nous enseigne que la préparation est cruciale, surtout dans la spiritualité. Elle place la Mitsva dans la bonne perspective et permet à l’individu de l’effectuer de manière optimale. Sans préparatifs, l’acte est défaillant. La Torah souligne donc que ce jour fut une suite directe des sept précédents et non une entité indépendante. La préparation aide la personne à se mettre dans un état d’esprit qui lui permettra d’accomplir la Mitsva avec les bonnes intentions.
Cette idée a des répercussions dans la Halakha, concernant la prière. La Michna[1] raconte que les ’Hassidim Harichonim se préparaient pendant une heure avant de prier. C’est bien sûr, trop long pour la plupart des gens, mais le Choul’han Aroukh[2] statue qu’il faut se préparer un peu avant la prière. L’objectif est de libérer l’esprit de l’homme de tout ce qui le préoccupe, afin qu’il puisse se focaliser entièrement sur la prière et tourner ses pensées vers la Chékhina.
Le Néfech Ha’haïm évoque la même idée, quant à l’attitude de la personne avant l’étude la Torah. « Dès lors que l’on se prépare à étudier, il convient de consacrer, ne serait-ce qu’un petit moment, à éveiller notre crainte d’Hachem, d’un cœur pur. »[3] Il estime même que de temps en temps, la personne doit faire une petite pause durant son étude pour raviver sa Yirat Chamaïm, ce qui peut servir de préparation pour le reste de son temps d’étude.[4]
La préparation s’avère nécessaire, voire indispensable, dans plusieurs domaines de la vie. Par exemple, dans le couple ou pour l’éducation des enfants. Si une personne entreprend ces projets totalement nouveaux sans aucun préparatif, il lui sera probablement très difficile de s’adapter aux nouvelles circonstances et aux défis qu’elles présentent. Il est vivement conseillé de se faire guider avant de se lancer dans de telles entreprises.[5]
De plus, ces deux domaines sont d’excellents tests pour vérifier les traits de caractère de l’individu. Ainsi, si une personne n’a pas travaillé sur ses Midot avant de se marier et d’avoir des enfants, elle sera souvent éprouvée et aura du mal à passer ces tests. À ce propos, on raconte qu’après avoir eu un bébé, un jeune couple se rendit chez un Gadol pour lui demander quand les parents devaient se préparer à l’éducation. Il leur répondit qu’ils avaient vingt ans de retard ! Il voulait leur montrer que toute sa vie durant, l’homme doit se travailler, pour le présent, mais aussi pour l’avenir, pour sa vie de couple et de parent. Inutile de préciser que même avec les meilleures dispositions, le vrai test est effectué au moment où il faut surmonter la difficulté, mais cela n’enlève rien au fait que la préparation soit un élément essentiel à la réussite dans ces domaines.
Puissions-nous tous mériter de nous préparer au mieux et de réussir à bien agir au moment où la Mitsva se présente, au moment où l’action doit être effectuée.
[1] Brakhot 30b.
[2] Ora’h ’Haïm, Siman 98, Sé'if 1.
[3] Néfech Ha’haïm 4,6.
[4] Ibid. 4,7.
[5] Par exemple, en assistant à des cours, en lisant des livres qui traitent de ces sujets ou en prenant conseil auprès d’une personne expérimentée. Il est très répandu qu’avant leur union, les futurs époux se fassent guider quant à l’approche de la Torah sur le mariage.