La lecture de la Torah semaine après semaine a vocation notamment à enseigner aux femmes et aux hommes des leçons de vie fondamentales. Elles peuvent être apprises par l’étude du comportement des patriarches et des matriarches, par une attention particulière aux exhortations de l’Eternel adressées aux hommes, mais aussi en s’inspirant de la manière « d’agir » de l’Eternel vis-à-vis des hommes.
Si le texte biblique a recours aux anthropomorphismes qui désignent parfois D.ieu par un langage qui s’applique aux hommes, c’est précisément pour que nous puissions nouer une relation émotionnelle avec l’Eternel et que nous puissions tenter de nous inspirer de Son exemple.
La Paracha nous fournit un exemple des égards avec lesquels D.ieu a agit envers Yossef Hatsadik lorsqu’il a été vendu comme esclave. La situation est certes tragique, mais nos Sages ont relevé un détail a priori étonnant : Yossef a été vendu à « des marchands d’aromates, de baume et de lotus » (Béréchit 37, 25). Et Rachi d’expliquer « Pourquoi ces précisions quant à leur chargement ? C’est pour nous faire connaître la faveur accordée aux justes. Les Arabes ne transportent, d’habitude, que du naphte et du pétrole, dont les relents sont nauséabonds. Mais il s’est agi ici de parfums, afin que Yossef ne soit pas incommodé par de mauvaises odeurs (Béréchit Rabba 84, 17). »
Le Rav 'Haïm Schmoulevitch comment cet épisode en soulignant que cette sollicitude inattendue de l’Eternel dans un moment aussi effroyable a été vécu par Yossef comme une marque d’espoir afin de lui témoigner que même dans l’adversité dans laquelle il était plongé, Hachem ne l’avait pas abandonné mais continuait de l’accompagner. Ce détail apparemment insignifiant revêtait en réalité une force symbolique capitale (Si'hot Moussar, Rav H. Schmoulevitch, traduit par le Pr. F. H. Lumbroso).
Rav Schmoulevitch souligne ainsi que bien souvent dans la relation entre les parents et les enfants, ou bien entre les époux, l’essentiel ne se loge pas dans les grandes choses mais dans les détails. Lorsqu’un parent est en colère contre un enfant, il continuera à le loger, le vêtir, à le nourrir, mais il témoignera son mécontentement en s’abstenant des petites marques de tendresse qui sont en réalité essentielles.
Une parabole peut ainsi illustrer cet exemple. Une famille se transmettait de génération en génération un diamant de grande valeur, mais voici que ce diamant a été perdu. Chaque membre de la famille ressent avec force cette perte et soudain, un jeune enfant le retrouve. La famille est infiniment rassurée, heureuse d’avoir conservé ce diamant si précieux. Et le père dépose un baiser sur le front de ce fils. Ce sera précisément cette marque d’affection qui restera gravé dans l’esprit de l’enfant, plus que le diamant qui pourtant représentait l’enjeu matériel essentiel.
Il s’agit là d’un enjeu important auquel il importe de réfléchir afin d’être en mesure de transmettre par des gestes et des attentions qui peuvent parfois sembler superflus un amour et une confiance en soi qui accompagneront durablement les enfants dans leur parcours de vie.
Rav Schmoulevitch décline également cette réflexion sur la fête de Hanouka. En effet, à travers l’allumage de la 'Hanoukia, nous commémorons le miracle de cette fiole d’huile qui a duré huit jours et non seul jour, permettant de créer à nouveau de l’huile pure pour la Temple. Ce miracle est grand, mais 'Hanouka commémore également un autre miracle, déterminant pour la survie du peuple Juif, la victoire des 'Hachmonaïm, des Juifs sur les Grecs, la plus grande puissance de l’époque, une victoire des faibles sur les forts, d’un peuple « peu nombreux » sur un peuple « très nombreux » qui menaçait leur survie. Et pourtant, ce que nous avons retenu dans l’allumage de la Menora c’est le miracle de la fiole d’huile (Traité Chabbath 21a). Ce dernier n’était pas déterminant pour la survie du peuple mais il témoignait de l’affection infinie et de la complicité du Tout-Puissant qui a rendu possible la volonté de Le servir dignement alors que les conditions matérielles ne semblaient pas le permettre.
L’auteur du Petit Prince avait cette belle formule « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux ».
A l’image de l’Eternel qui manifeste son affection pour Ses enfants non seulement dans les grandes choses, à commencer par la vie qu’il nous octroie, mais aussi dans des petites choses qui revêtent une intense symbolique spirituelle, puissions-nous également vis-à-vis de nos enfants, de nos conjoints, de tous ceux que l’on aime être capables non seulement de leur donner l’essentiel mais aussi d’aller au-delà en leur témoignant notre affection authentique dans les petites choses de la vie qui signifient beaucoup.
Et, bien sûr, puissions-nous avoir la même attitude vis-à-vis de l’Eternel en accomplissant Sa volonté non seulement dans la lettre mais aussi dans l’esprit.