Nous arrivons de nouveau à la période des trois semaines, en tant qu'adulte, il n'est déjà pas toujours facile de réaliser la grandeur du manque du Beth Hamikdach. Comment peut-on dans ce cas faire ressentir à nos enfants cette absence, leur permettre de se relier à ces jours précieux ?
Une démarche positive
Ces trois semaines viennent nous rappeler des évènements tristes et malheureux, cela ne veut pas dire que notre démarche de transmission à nos enfants doit avoir une connotation négative. Pour une démarche positive, il faut tout d'abord que nos explications et nos récits soient tournés vers l'avenir, on peut leur parler de la venue prochaine du Machia'h, de la reconstruction du Beth Hamikdach et du lien particulier avec Hachem que nous auront le mérite de vivre à ce moment là !
On peut également donner des exemples, tel que celui de Rav Pinkous : lorsqu'on arrive à un mariage, comment reconnait-on la famille de la mariée ? Les personnes qui sont les plus joyeuses sont certainement les proches. Il en est de même pour les trois semaines, nous nous sentons proches d'Hachem et comme la Présence divine n'a plus de lieu pour résider parmi nous, nous nous sentons tristes. Cette tristesse ne retire rien à la joie d'être Juif, de faire les Mitsvot, d'avoir la possibilité de réparer jour après jour ce manque et de faire partie d'un grand projet Divin. Dans la spiritualité comme dans la vie de tous les jours, on peut ressentir deux sentiments opposés sans que l'un n'annule l'autre.
Renoncer à une certaine dose de confort
Les interdictions des trois semaines (ne pas écouter de musique, ne pas fêter de mariage…) ont pour but de nous sortir de notre confort et de nous mettre en situation de deuil. Cela est suffisant pour les adultes, les enfants, en revanche, intériorisent beaucoup plus les changements dans leur quotidien, c'est donc dans ce domaine qu'il faudra agir. On peut par exemple ne pas permettre de sucreries en semaine, et n'en donner qu'à Chabbath tout au long de cette période, ou encore, manger à la cuisine (qui est un endroit moins confortable) au lieu de la salle à manger. Le but étant de rechercher des choses simples, qui marqueront les esprits.
Il est très important que cela ne soit pas vécu comme une privation ou pire, une punition, mais leur expliquer que dans la vie juive, il y a un moment pour tout, qu'elle est faite de grandes joies, mais aussi de peines et que nous voulons nous associer à tous ces moments. Les adultes devront donc également jouer le jeu car les enfants sont des radars ; s'ils nous voient vivre tout à fait normalement et remettre la sortie au parc parce qu'on veut "que la famille ressente les trois semaines" (alors que c'est une excuse pour ne pas y aller), ils sentiront qu'on joue la comédie. En revanche, si toute la famille participe, qu'ils nous voient renoncer nous aussi à un certain confort, ils vivront cela d'une toute autre façon...
Raconter des histoires
On le sait, le moyen le plus facile de réveiller la partie émotionnelle d'un enfant, ce sont les histoires et en ce qui concerne "les trois semaines", les récits ne manquent pas... Si vous n'avez pas pris cette habitude, les trois semaines sont le moment le plus opportun ! Il y a toujours un des deux parents qui est plus doué pour cette tâche et il faudra le faire de la façon la plus vivante possible. Au moment de l'histoire, on éteindra le téléphone, on prendra son temps, on essaiera de changer d'intonation selon les évènements du récit et on laissera les enfants réagir tant qu'ils veulent. Il est aussi très important qu'ils ressentent qu'on a envie d'être avec eux et qu'on passe un bon moment en leur compagnie !
Voici quelques idées d'histoires : Kamtsa et Bar Kamtsa, les évènements du règne de Nabou'hanetsah, la vie de Rabbi 'Akiva, la destruction des deux Beth Hamikdach, toutes les histoires qui mettent en relief la gravité de la haine gratuite.
Laisser une empreinte pour le futur
Notre but doit être finalement que nos enfants vivent une spiritualité complète, à l'extérieur, en appliquant les Mitsvot, mais aussi en ressentant les choses dans leur intériorité. Pour cette période comme pour le reste du calendrier juif, ce sont ces petits souvenirs d'enfance qui font la différence ! Pour que la mémoire s'imprègne d'un évènement, il faut que celui-ci ait été vécu suffisamment fortement au niveau émotionnel pour qu'il laisse une trace. Organisons-nous donc pour que notre famille vive au rythme du calendrier juif, mettons-y du cœur pour que dans 10 ans, nos enfants nous rappellent ces petits riens qui sont une grande partie de notre transmission et de l'éducation...