Être parent est sans aucun doute un grand privilège. Mais il s’agit en même temps d’une grande responsabilité ! Un enfant est en effet appelé Pikadone (dépôt) dans la Torah : il s’agit donc d’un précieux cadeau qu’Hachem nous a confié.
Suite à une expérience vécue récemment avec l’un de mes enfants, j’ai réalisé qu’avec une bonne approche et surtout beaucoup de Téfilot de notre part, rien n’est jamais perdu !
Éducateurs : rien n’est entre nos mains !
Qui dit dépôt dit que l’objet ne nous appartient pas ; qui dit cadeau dit attention particulière…
Effectivement, nous veillons sur nos enfants jour et nuit (surtout quand ils sont petits), nous investissons une énergie sans borne dans leur éducation, nous versons tant de larmes pour supplier Hachem de nous accorder la réussite dans leur éducation…
Combien d’énergie ne dépensons-nous pas dans cette noble tâche ? Pourtant, ce qu’il nous faut garder en tête, c’est que malgré toute notre bonne volonté et nos Téfilot, le résultat final ne dépend pas uniquement de nous ! Hachem, le Maître du monde, décide du destin de chacun d’entre nous, et surtout, chacun possède son propre libre arbitre. En tant que parents, nous avons certes une marge de manœuvre éducative très importante ainsi qu’un grand travail à fournir, mais comprenons que c’est Hachem qui gère le monde et non nous !
Preuve en est les milliers de parents de par le monde qui, tout en s’étant appliqués à prodiguer une bonne éducation à leurs enfants, voient ceux-ci emprunter une voie qui ne correspond pas forcément à leurs plans initiaux…
Quand les voies se séparent…
Tous les parents d’ados - ou presque - se sont retrouvés un jour ou l’autre face à un enfant qui décide de ne pas suivre la voie tracée par ses parents. Si l’on est axé sur les hautes études, il peut s’agir d’un enfant qui annonce qu’il compte arrêter d’étudier après le Bac ; si on est axé sur la carrière, il peut s’agir d’une jeune fille qui décide qu’elle ne souhaite pas travailler et préfère s’occuper de ses enfants une fois mariée ; si l’on est religieux, il peut s’agir d’un jeune qui prend la décision de quitter les bancs de la Yéchiva pour se lancer dans le business… Et alors là, le monde s’effondre !
Évidemment, et c’est bien naturel, notre première réaction en tant que parents sera de craindre pour notre image : “Que va penser la famille ?”, “Que va dire l’entourage ?”, “Comment va-t-on regarder mon mari à la synagogue ?”, etc. Certains culpabiliseront, d’autres fuiront, d’autres encore seront tentés de fuir leur sentiment d’échec en rompant tout lien avec leurs enfants…
Comment réagir de la meilleure manière lorsqu’on est confronté à ce genre de situations ? Comment éviter les dégâts et maintenir le contact avec notre enfant ?
Recherche amour désespérément
Aussi surprenant que cela puisse sembler, il faut bien comprendre que la première personne à souffrir de cette situation n’est pas nous-même, mais bien notre enfant ! Même si tout dans son comportement exprime l’inverse, c’est en réalité notre approbation et notre satisfaction qu’il est en train de rechercher.
Souvenez-vous lorsqu’il n’y a pas si longtemps, il revenait de l’école en vous montrant fièrement les quelques gribouillages qu’il avait griffonnés sur une feuille, guettant avec attention la moindre de nos réactions…
Les années ont passé, certes, mais notre enfant reste notre enfant ! Et il n’existe rien de plus précieux au monde pour lui que d’obtenir de notre part des marques d’amour et de satisfaction.
Et vice versa, combien est grande sa souffrance lorsqu’il constate que son comportement nous déplaît ! Il ressent qu’il est rejeté et qu’il n’est plus l’objet d’amour de notre part… Sa réaction, certes maladroite, sera alors bien souvent d’aller chercher à l’extérieur ce qu’il ne parvient pas à trouver à l’intérieur : il se met en quête de ce que l’on pourrait appeler des substituts d’amours… Comme l’on s’en doute, les fréquentations pas toujours adaptées, les hobbies pas en accord avec nos valeurs, ou encore la rue et ses attraits sauront ouvrir grand leurs bras à cette âme en peine…
Les vertus insoupçonnées de l’amour inconditionnel
Deux solutions s’offrent alors à nous : la plus simple, la plus destructrice aussi, consiste à nous “débarrasser” du problème en rejetant tout bonnement notre enfant. “S’il ne colle pas à nos attentes, nous n’avons plus rien à voir avec lui”, se bornent à penser certains. Ce raisonnement, s’il a “l’avantage” de flatter notre égo et de nous permettre de ne pas affronter le problème à bras le corps, est en fait le meilleur moyen de creuser encore plus le fossé qui s’est créé entre nous et notre enfant. Que les parents ne se leurrent pas : l’expérience a largement montré qu’aucun enfant n’est sensible à ce type de chantage affectif ; la chose a plutôt pour effet contraire de le radicaliser encore plus. C’est donc peine perdue et le parent avisé saura se tourner vers d’autres solutions plus adéquates…
Venons-en donc naturellement à notre seconde proposition, plus longue et difficile à mettre en œuvre, certes, mais sans aucun doute porteuse de fruits à long terme : l’amour inconditionnel.
Aimer de manière inconditionnelle son enfant, c’est l’aimer quels que soient ses traits de caractère, ses tendances, ses choix ou orientations. C’est lui faire comprendre qu’il sera toujours notre enfant et ce, quelles que soient les circonstances que l’on sera amené à rencontrer. C’est l’aimer au-delà de ce qu’il peut nous apporter en termes de fierté, de faire-valoir, de réussite sociale. C’est lui signifier que nous serons toujours ses parents, indépendamment des choix qu’il pourra faire.
Evidemment, cela ne signifie pas de ne pas proposer notre aide lorsque c’est nécessaire ; il serait faux de penser qu’un enfant n’a pas besoin du guidage de ses parents lorsqu’il se trouve à certains carrefours de son existence. Mais l’essentiel est que notre amour pour lui reste intact et ce, en dépit des fossés qui peuvent parfois nous séparer.
Ce n’est qu’alors que nous offrirons à notre enfant toutes les chances de retrouver le chemin de retour vers les valeurs que nous nous sommes appliqués à lui transmettre. Ce ne sera peut-être pas toujours le cas, mais cela aussi, il nous faudra l’accepter de bon cœur.
Le chemin sera peut-être long, mais n’abandonnons pas, car le jeu en vaut largement la chandelle !
‘Hava M., adapté par Elyssia Boukobza