Découvrez la course-poursuite palpitante de Sophie en quête de son héritage, au cœur d'une enquête qui lui fera découvrir la beauté du judaïsme. Suspens, humour et sentiments... à suivre chaque mercredi !
Dans l’épisode précédent : Sophie et sa fille Léa voyagent pour la première fois en Israël pour l’enterrement de la vieille tante Ida que Sophie a peu connue. En triant les affaires de sa tante, elle tombe sur une lettre qu’elle avait écrite pour dénoncer un vol. Mais de quoi s’agit-il ?
Léa était occupée à chercher du réseau pour échanger photos et vidéos avec ses amis restés à Paris. Ça captait mal dans la résidence, donc elle faisait les 100 pas, les bras en l’air en agitant son téléphone en espérant capter les ondes.
“Léa, quand tu auras fini ta danse de la 3G, si ça t’intéresse, j’ai trouvé une vieille boîte avec des lettres et des dessins dedans.
Dans un soupir de découragement, Léa lâcha son téléphone sur le vieux lit et rejoint sa mère . Penchée par-dessus son épaule, elle se mit à la lire et s’arrêta net.
‘Tiens elle parlait français tante Ida ? demanda Léa.
- Peut-être, je n’arrive pas bien à me souvenir.”
En même temps elle n’avait vu sa tante que lors d’une ou deux visites à sa mère et elle ne se souvenait pas de sorties familiales dans les rues de Paris.
“T’as vu, c’est marqué ‘inconnu à cette adresse’, c’était vraiment nul avant, on pouvait même pas suivre comme les commandes Amazon. Pff, je ne sais vraiment pas comment vous avez réussi à survivre dans cette époque préhistorique !”
Sophie sentait venir une migraine. Elle se souvint qu’il était près de 14 heures et qu’elles n’avaient toujours pas déjeuné. Voilà une bonne excuse pour faire une pause.
Quelques bouchées de falafel plus tard, mère et fille terminaient leur repas en silence (Sophie se demandait si “oui”, “non” ou “c’est lourd”... était l’unique mode de communication des ados de 17 ans).
Et dire que petite fille, Sophie avait prié tous les soirs dans son lit pour avoir un frère ou une sœur avec qui jouer. Elle priait D.ieu, sans savoir vraiment qui Il était et ce qu’Il pouvait faire pour elle. Mais elle sentait qu’On l’entendait et qu’On lisait dans son cœur. Jusqu’à ce qu’elle constate qu’aucune sœur n’avait intégré la famille et que, de toutes façons, personne ne parlait jamais de D.ieu. Sophie finit par se résigner à l’idée de devenir une grande sœur mais aussi sur le fait que ses prières pouvaient être entendues. Alors à la place, elle pria pour devenir une bonne mère. Sauf que là, assise à 4000 km de Paris, face à une ado qui ne détachait pas ses yeux de son téléphone, elle se disait qu’elle avait bien fait d’arrêter de prier !
Après le déjeuner, retour à la maison de retraite, où elles croisèrent à l’entrée Ronit Malka, la responsable. Sophie décida de lui montrer la vieille lettre trouvée dans les affaires de sa tante, tout en la lui traduisant en anglais.
“Est-ce que quelqu'un de la résidence aurait volé des affaires ou de l’argent à ma tante ? questionna Sophie.
- Non, impossible, répondit Ronit avec fermeté. Nous faisons très attention à ce genre de choses. Jamais Ida ne nous a signalé un vol.
- Mais maman, t’as vu comme la lettre est vieille et sale ? Ça se trouve, elle a été écrite il y a des années, genre avant même que je sois née !
- Oui… tu as raison Léa. Alors dans ce cas, on n’a aucune chance d’en savoir plus ! Impossible de savoir à qui elle a été écrite...
Léa regarda une nouvelle fois l’enveloppe.
“Regardez, c’est écrit sur le tampon que ça été envoyé en juin 1984, waw ! C’était il y a presque quarante ans, truc de fou !
- Ça me fait penser, reprit Ronit, je me souviens que votre tante a vécu dans un kibboutz près de Netanya, quand elle est arrivée en Israël. Si j’ai bonne mémoire, Ida racontait qu’elle y vivait avec d’autres amies d’enfance, des survivantes elles aussi. Peut-être qu’elles étaient au courant de cette histoire de vol ? Vous savez, le kibboutz n’est pas loin, il n’est qu’à 1 heure 30 de bus d’ici.
- Euh, je ne sais pas, bredouilla Sophie. On n’avait pas prévu de quitter la ville. Je vais y réfléchir.”
Quelques heures plus tard, Sophie et Léa étaient de retour à l’hôtel. La plupart des affaires avaient été triées et grâce à l’aide de Ronit, l’ensemble de son mobilier et de ses vêtements serait donné un à Gma’h, une sorte de dépôt-vente spécialement conçu par les juifs religieux à destination de tous les nécessiteux.
Sophie avait conservé cette étrange lettre avec elle. Elle n’avait quasiment aucune chance de la décoder, mais elle n’arrivait pas à sortir ce message de la tête. Même si elle avait peu connu la tante Ida, elle se sentait comme personnellement concernée et attaquée par cette accusation. Elle avait cette curieuse sensation qu’il s’agissait de quelque chose de beaucoup plus important qu’un simple vol d’habits ou d’argent.
“Alors on fait quoi maintenant ?” demanda Léa, maintenant qu’elle avait terminé sa danse de la 3G, dans le but d’envoyer sa dizaine de selfies du jour à son groupe d’amis.
“Comment ça qu’est-ce qu’on fait ?
- Ben je sais pas. Tu as l’air d’une zombie depuis que tu as trouvé cette lettre et que la femme de la maison de retraite nous a parlé du kibboutz. Alors puisqu’on est là encore quelques jours, qu’est-ce qu’on perd d’aller là-bas ? Au pire, ça nous fera une visite du pays et moi ça me fera de nouveaux décors pour mes selfies !”
Sophie ne répondit pas. Après tout, comme disait Léa, que pouvaient-elles perdre à se rendre dans ce kibboutz ? Finalement, elles ne connaissaient rien en dehors de cette chambre d’hôtel et de la maison de retraite. Et ce n’était vraiment pas l’idée qu’elle s’était faite d’Israël.
Le lendemain tôt dans la matinée, dès qu’elles trouvèrent l’adresse exacte du kibboutz, elles se mirent en route pour Chefayim, situé au nord du pays, près de la ville de Netanya.
Elles prirent un bus depuis la gare centrale de Jérusalem et s’installèrent au fond. Léa avait les yeux scotchés sur son téléphone. Sophie, elle, assise côté fenêtre, ne pouvait qu’observer la vue. Des paysages magnifiques se dessinaient sous ses yeux. A peine après avoir quitté la capitale, les collines environnantes défilaient, bordées d’arbres. Un relief d’une verdure saisissante. Comment ce petit pays situé aux portes du désert pouvait être si fertile ? Cela dépassait toute ses connaissances. Sans vraiment comprendre pourquoi, elle ressentait un pincement au cœur en quittant Jérusalem. Mais rapidement ses pensées se concentrèrent sur le kibboutz Chefayim.
Au bout d’une heure, Léa enleva ses écouteurs et s’exclama :
“Tu te rends compte maman ? Le kibboutz où on va existe depuis 1935 et il a été fondé par des immigrés polonais ! Et genre tout le monde vivait ensemble, travaillait ensemble, bref la colo H24, ça devait être trop sympa !
- Attends, mais comment tu sais tout ça ?
- Maman !” Léa leva les yeux au ciel devant l’étonnement de sa mère. “Wikipédia, tu connais ?”
Décidément, sa fille lui réservait plein de surprises. Finalement cette idée de visiter le kibboutz était une bonne idée de sortie pour se rapprocher de sa fille.
Deux heures plus tard, à leur descente du bus, Sophie constata avec surprise que le lieu ne ressemblait en rien à ses idées de grande ferme agricole. L’endroit ressemblait plus à un grand village moderne.
Sur les conseils de Ronit Malka, Sophie demanda à rencontrer la responsable du site. Une petite dame ronde d’une soixantaine d’années aux cheveux grisonnant vint les accueillir avec un grand sourire et leur proposa de leur faire visiter les lieux.
Léa était excitée d’en apprendre plus sur l’histoire du site et surtout comment il avait été fondé par les “immigrés clandestins”. Sophie suivait docilement les explications de leur guide.
“Peu de gens le savent, mais contrairement aux idées reçues, ce kibboutz n’a pas été fondé par des communistes, mais par des Juifs religieux désireux de vivre une vie de Torah sur la Terre que D.ieu leur avait donnée. D’ailleurs, le nom même de ce kibboutz “Chefayim” vient du livre d’Isaïe et signifie “D.ieu ouvre des rivières dans les lieux saints” (NDLR : Isaïe 41,18).
- Waw ! C’est trop cool, commenta Léa subjuguée. Sa joie était communicative et même Sophie se prit à sourire.
- Aujourd’hui on a tendance à oublier que le sionisme à ses origines était mêlé d’une foi en D.ieu inébranlable. Les agriculteurs sionistes avaient l’habitude de dire : “Partout où va le laboureur juif, la présence divine l’accompagne”.
Sophie s’arrêta net. Cette phrase venait de la frapper en plein cœur. C’était donc pour ça que le pays défiait les lois d’une nature aride et poussait vert et vigoureux comme un palmier dans le désert ! C’était comme si, en quittant Jérusalem, elle avait perçu une nature extra-ordinaire. Voilà qui résonnait en elle.
Au même moment, au milieu de la route principale une groupe de vieilles dames passa à quelques mètres, quand l’une d’entre elle s’arrêta et se mit à crier en direction de Léa : “Bubbaleh, Bubbaleh !!”
Mais qui était cette inconnue et que voulait-elle à la fille de Sophie ?
La suite, la semaine prochaine...