J’ai de la peine à respirer. A bout de souffle, je quitte la pharmacie où je suis resté cinq minutes pour monter dans la voiture. Je n’en crois pas mes yeux : un policier est debout à côté de ma voiture et rédige un PV !
Je m’adresse à lui en l’implorant : « Cher policier, j’ai un père qui est très malade depuis des années, il avait absolument besoin d’un médicament d’urgence, et il n’est disponible que dans cette pharmacie du centre ville. J’ai cherché une place pendant une demi-heure - payante ou gratuite - et je n’ai pas trouvé ! J’étais pressé, et en désespoir de cause, j’ai été forcé de garer ma voiture ici. »
Mes implorations sont tombées dans l’oreille d’un sourd. Mes excuses ne l’intéressent pas, même si je n’ai garé ma voiture que pour quelques minutes. C’est très simple, ça ne l’intéresse pas du tout ! Il s’endurcit encore plus. « C’est une place réservée aux handicapés. Imagine qu’un handicapé arrive et veuille se garer ici, et il ne trouve pas de place. Pourquoi ? Car toi, qui es agile, mais pressé, tu lui as pris sa place de parking ! »
Je baisse la tête, confus, je me suis en effet garé ici faute de mieux, et tout ceci dans le but d’accomplir le mieux possible la Mitsva de respect des parents en achetant un médicament pour mon père malade, que D.ieu lui envoie une guérison complète. Le policier m’adresse encore quelques propos assez peu sympathiques, et quitte les lieux, en me laissant un beau cadeau sur la vitre de la voiture : une contravention d’un montant de 1000 shékels. Rien de moins !
J’ai l’impression qu’on vient de me jeter un seau d’eau froide au visage. Nous sommes à la veille des grandes fêtes, les dépenses sont nombreuses, et je dois désormais débourser un telle somme pour une contravention…
D’un autre côté, il faut que je me renforce : en effet, rien n’arrive à des émissaires chargés d’une Mitsva, et l’observance du commandement de respect des parents me sera certainement comptée comme un mérite. Je m’adresse à un ami de longue date, David, qui occupe une fonction importante à la municipalité de Jérusalem. Je lui raconte en détail l’incident, j’attends ses conseils, voire son aide pour alléger le montant de la dette.
Mon ami réfléchit quelques instants, puis me demande d’écrire une lettre détaillée à la municipalité de Jérusalem. « Il faudra décrire tout l’enchaînement des événements, me prévient mon ami, et peut-être, ajoute-t-il, auras-tu la chance de tomber sur un fonctionnaire dont la sensibilité juive s’éveillera en lisant le récit sur ton père ».
« Pendant ce temps, je vais moi-même parler à quelques-uns d’entre eux », me promet-il. C’est la vérité. J’apprends par la suite qu’il ne baisse pas les bras et tente par tous les moyens de me venir en aide, dans le but d’alléger la somme de la contravention ou d’obtenir des facilités de paiement.
Au cours de ses nombreuses tentatives, il rencontre la procureure de la municipalité de Jérusalem : celle-ci lit très attentivement le courrier que j’ai rédigé, expliquant que tous mes gestes n’étaient motivés que par mon désir d’accomplir la Mitsva de respect des parents. La procureure, très à l’écoute, me promet de réfléchir à la question et de donner rapidement une réponse à mon ami.
Quelques jours plus tard, je reçois une longue lettre de la procureure, exposant que le fait de se garer à une place d’handicapé, même pour une durée minime, est une grave infraction et de ce fait, l’amende est majorée et s’élève désormais à 1500 shekels ! Puisse ceci servir de leçon.
Mon ami n’en revient pas ! Il n’a jamais rencontré, dans toutes ses années de travail à la municipalité, une réaction aussi extrême. Il me demande néanmoins d’écrire une nouvelle lettre et d’implorer qu’au minimum, l’amende reste à son niveau original, sans la majoration…
Je suis un homme très croyant, lorsque ce genre d’histoires m’arrive, je pense automatiquement : qu’est-ce que cette histoire vient m’enseigner ? Il y a un élément trouble ici. Et c’est sans doute un signe du ciel. Il me faut réfléchir : pourquoi cela m’est-il arrivé et comment dois-je agir ? J’entre dans ma chambre et je commence tout simplement à parler à D.ieu, à Lui raconter mon histoire. « Je ne sais pas ce que Tu voulais me transmettre par là, Lui dis-je. Je suis allé… Tu sais que tous mes actes étaient motivés dans le but d’accomplir une Mitsva. Alors, j’aimerais bien comprendre, de grâce : que veux-Tu me communiquer par là ? J’étais entièrement occupé à un acte de bonté, de respect dû à mon père. »
« Dis-moi, est-ce que tu t’entends parler ? » J’entends soudain une voix intérieure. « Quelle pagaille as-tu fait ! Combien de fois as-tu mentionné cette immense Mitsva pour laquelle tu as investi tellement d’efforts. »
Un instant ! Peut-être que le secret réside ici. Mes pensées se succèdent les unes après les autres. Je revis les événements de ce jour-là, lorsque je cherchais une place de parking, je parlais à mon frère au téléphone. Je tenais absolument à insister sur le fait que je me donnais tant de peine pour mon père. Après, à la pharmacie, j’ai demandé à prendre la place d’un enfant dans la file, je lui ai expliqué pourquoi, je ne me suis pas garé à une place d’handicapé pour rien, j’avais une bonne raison. Mon père, etc…
« Regardez comme je suis Tsadik, tout le monde, observez-moi, j’accomplis la Mitsva de respect des parents. »
J’ai soudain compris ce que venait m’enseigner la contravention rehaussée.
J’achève la conversation et je vois que mon ami David m’a appelé. Il m’a laissé un message émouvant sur le répondeur : il vient de sortir du bureau de la procureure, qui a accepté de renoncer à l’amende. « Apparemment, m’explique-t-il, j’ai bénéficié d’un moment de faveur divine. »
« Oui, un réel moment de faveur. Un moment où j‘ai compris ce qu’on voulait m’enseigner dans le Ciel », pensais-je.
Nous ne vivons pas tous les jours des histoires comme celle-là, mais il est clair que chaque événement que nous vivons vient nous enseigner une leçon, un enseignement. Ainsi, à partir de là, nous pouvons progresser vers un horizon plus pur et plus éclairé.