S’il y a une Mitsva difficile à accomplir, c’est bien la Téfila (prière). On y consacre plus d’une heure par jour, en répétant les mêmes textes et en cherchant désespérément la ferveur et la communion avec D.ieu. Pour le Ba’al Téchouva, on peut rajouter à cette liste le fait qu’il s’agit d’une pratique inhabituelle, complexe dans sa structure et exprimée en langue étrangère qu’il ne saisit pas toujours.

Le Ram’hal (Rabbi Yossef ‘Haïm Luzzato) écrit dans son livre “Derekh Hachem” que D.ieu, dans Sa bonté, a prévu un moyen pour l’homme de ne pas se perdre dans les dédales de ses préoccupations matérielles : la prière, moment privilégié dans lequel il va se détacher de ses affaires pour s’adresser à son Créateur et s’élever. 

Et c’est là que se trouve notre véritable problème : depuis longtemps, nous avons oublié qu’il existe un Créateur qui observe les actes de chaque individu, qui est parfait dans Sa bonté, que toutes les clés de la réussite dépendent de Sa volonté et qu’Il prête attention à toutes nos demandes. La réalité dans laquelle nous vivons aujourd’hui nous éloigne de la Emouna. Affairés et accaparés, il nous est difficile de trouver du temps libre. De plus, la société dans laquelle nous vivons a prévu toutes sortes de protections sociales et médicales qui font que face à une difficulté, on se tourne naturellement vers le corps qui devrait pouvoir nous apporter la solution, et non vers D.ieu. Enfin la vie urbaine, loin de la nature, la technologie moderne et le mode de vie adapté malgré nous comme référence universelle, tous ceux-là éteignent en nous tout sentiment qui nous amènerait au divin, à une dépendance à Lui. Quand avons-nous pour la dernière fois observé un coucher de soleil, prêté attention au gazouillement des oiseaux, observé une fleur ou contemplé un beau paysage ? Trouvons-nous encore intérêt à marcher dans une forêt, à respirer de l’air pur, ou à visiter une ferme ?

Un des commentateurs du ‘Houmach, le Kli Yakar, relève un détail intéressant concernant Moché Rabbénou : il était un berger, comme le furent aussi nos Patriarches et la plupart de nos Prophètes. Pourtant il existait à l’époque d’autres métiers possibles et on peut s’interroger sur ce choix de garder des troupeaux. Le Kli Yakar répond qu’être berger, c’est vivre dans la nature, sous le ciel et les étoiles qui réveillent la Emouna, tout en ayant beaucoup de temps libre pour méditer. Nos prophètes, avec à leur tête Moché, surent profiter de leur situation pour rechercher D.ieu intensément et parvenir à des niveaux de spiritualité qui leur a même donné accès à la prophétie.

Nos grands maîtres du Moussar et de la ‘Hassidout encouragent la Hitbodédout, à savoir s’isoler - si possible justement dans la nature, propice à ce genre d’expérience - et parler à Dieu comme on le ferait avec son père ou son ami : Lui raconter ses soucis, Lui faire partager ses joies et ses peines, Lui demander de l’aide et décharger son cœur de tout ce qui nous pèse ; profiter de ces moments d’évasion pour réfléchir à notre vie, au sens à donner à l’existence et pour chercher à améliorer notre relation avec nos proches et notre Créateur.

Si on persévère dans ces “rendez-vous” avec l’Eternel, la Emouna va véritablement entrer en nous et faire partie de notre paysage, et nos prières vont prendre une toute autre dimension.