Comment choisir son Rav ? Comment identifier les vrais Tsadikim des diseurs de bonne aventure ? Et que se passa-t-il le jour où un riche homme d’affaires offrit un million de dollars à Baba Elé’azar en signe de reconnaissance pour sa Brakha ? Le point avec Rav Ouri Lévy, qui nous rapporte l’opinion du Rav Ya’akov Hillel.

Le Rav Ya’akov Moché Hillel est l’un des plus grands kabbalistes de notre génération. Reconnu en tant que tel par l’ensemble des Grands d’Israël, il dirige entre autres institutions l'une des plus célèbres Yéchivot de kabbalistes d’Erets Israël, Ahavat Chalom à Jérusalem et est l’auteur de très nombreux ouvrages de Kabbale.

Parmi ses livres, Le Rav Hillel a rédigé un essai intitulé Tamim Tihyé ("Intègre tu seras") qui est une analyse approfondie de la Mitsva de consacrer une foi pleine et simple en Hachem, et de l’impératif de fuir les faux kabbalistes et diseurs d'avenir qui éloignent l’homme de la Émouna authentique. Un sujet qui tient à cœur au Rav, souvent confronté à ce type de questions et qui doit donc s’employer à mettre le public en garde contre ces déviations, hélas devenues monnaie courante.

Il y a une quinzaine d’années, le Rav Ouri Lévy a accompagné Rav Hillel lors d’un passage en France auprès de plusieurs communautés. Le but de ce voyage ? Mettre en garde le public français contre les faux "babas" et autres marabouts qui pullulent un peu partout et sèment la destruction sur leur passage, que ce soit en France ou ailleurs. 

Rav Lévy a accepté de nous rapporter l’opinion du Rav Hillel et de faire le point sur ces questions pour Torah-Box Magazine.

Quel est le mode d’action de ces imposteurs ?

Sous couvert de mysticisme, certains personnages distribuent des bénédictions et prétendent prédire l’avenir, moyennant paiement évidemment. Ils profitent de la détresse et de la naïveté de certaines personnes afin d’arriver à leurs fins. Ils utilisent leur logique, leur intuition et leur esprit de déduction pour détecter les faiblesses de leurs interlocuteurs et mieux les manipuler. On a aussi souvent eu vent de cas d’abus physiques sur des femmes, en plus de l’emprise psychologique, ce qui est bien sûr d’une gravité extrême. 

Il faut savoir qu’en Israël, ces personnages sont relativement assez rapidement démasqués, ce qui n’est hélas pas le cas en France où ils peuvent causer d’immenses dégâts, dans la mesure où les gens ont peut-être tendance à accorder plus facilement leur confiance à toute personne qui a l’aspect religieux.

On pourrait légitimement se demander : comment expliquer que des gens sensés se laissent si facilement duper ?

La première raison est que lorsque les gens sont plongés dans la détresse, ils sont hélas prêts à se fier à n’importe quelle personne qui leur promet un soulagement rapide de leurs souffrances. Impuissants, ils espèrent trouver un réconfort facile auprès de ces personnes charismatiques qui semblent s’intéresser sincèrement à leur sort et semblent capables de leur prédire l'avenir. 

Une autre raison réside dans la nature même de la Kabbala : il s’agit d’une science cachée, qui se transmet dans la discrétion de maître à élève, peu connue. Or cette zone d’ombre est aisément exploitable par des personnes peu scrupuleuses. Ainsi, même lorsqu’un comportement chez le "Rav" ne trouve pas d’explication rationnelle, on le justifiera par notre incompétence dans cette discipline plutôt que d’y déceler quelque chose d’anormal.

Une personne souhaite s’attacher à un maître. Comment être sûr qu’elle a affaire à quelqu’un de fiable et non à un charlatan ?

Tout d’abord le lien de maître à élève se doit d’être basé sur une approche rationnelle, une conduite normative. Il faut également que le Rav en question soit connu et reconnu dans la communauté rabbinique ; on s’éloignera donc des outsiders et autres personnages qui font soudainement leur apparition dans le monde rabbinique et kabbalistique. Il faut aussi savoir que les vrais Tsadikim ne réclament pas d’argent en échange de leurs Brakhot

En conclusion de cette mise au point du Rav Lévy, rapportons l'anecdote suivante : on raconte que Baba Elé’azar, de mémoire bénie, reçut un jour un Juif accompagné d’un riche homme d’affaires non-juif venu spécialement d’Inde afin de recevoir la bénédiction du Tsadik, après de longues années où lui et son épouse n’avaient pas pu avoir d’enfant. 

L’ayant reçu avec affabilité, Baba Elé’azar lui affirma que lui et sa femme ne souffraient d’aucun problème de santé particulier à même d’expliquer leur stérilité. Il conseilla à l’homme de renforcer sa foi en un D.ieu unique, Créateur de l’univers et le bénit que par ce mérite, sa femme puisse rapidement enfanter. 

Or un an plus tard, le miracle se produisit : sa femme mit au monde un merveilleux bébé ! L’Indien vint à nouveau rendre visite à Baba Elé’azar, pour le remercier cette fois. Pour ce faire, il vint avec une mallette contenant la somme… d’un million de dollars (!), qu’il souhaitait offrir au Rav en guise de reconnaissance. 

Savez-vous ce que fit Baba Elé’zar ? Il déclina gentiment le don de l’homme d’affaires et lui déclara plutôt : "Dans votre village natal, il n’y a pas de dispensaire [d’où le Rav le savait-il… ?] ; avec cet argent, offrez à la population un accès décent aux soins médicaux", ce que l’homme accepta finalement de faire…

Propos recueillis par Rav D. Scemama,
rédigé par E. Boukobza