À l’approche du moment culminant de Yom Kippour, durant la prière de Min’ha, nous lisons le livre de Yona. L’évocation de la Téchouva dans ce récit est certainement le lien le plus marqué que l’on peut trouver entre ce Livre et cette journée. Mais en plus de l’accent mis sur le repentir, on peut tirer d’autres leçons importantes du comportement de Yona, qui pourront approfondir notre compréhension de la Torah en général et de la Téchouva en particulier.

Le Rav de Brisk discutait de la situation difficile que traversait le peuple juif en Erets Israël à son époque. Son interlocuteur mit la faute sur les juifs non pratiquants du pays. Le Rav de Brisk réprouva cette attitude, basant son argument sur un incident du Livre de Yona et soulignant que le fait qu’on le lise à Yom Kippour n’est pas une coïncidence. Yona quitta Erets Israël et prit le large, pour éviter d’avoir à avertir les habitants de Ninvé de se repentir. Lors de son voyage, une terrible tempête fit rage et les marins idolâtres demandèrent à Yona quoi faire. Il leur répondit qu’ils devaient le jeter par-dessus bord, « car je reconnais que c’est à cause de moi que cette tempête s’abat sur vous. »[1] Yona était prophète. Certes, il commit l’erreur de penser pouvoir échapper à sa mission, mais il était tout de même un grand Tsadik. Tous les autres étaient idolâtres. Dans sa situation, il aurait facilement pu blâmer les marins de la catastrophe qui survenait. Mais telle ne fut pas sa réaction. Il comprit qu’il était en faute et il en assuma la responsabilité. Le Rav de Brisk ajouta : « C’est la raison pour laquelle nous lisons l’histoire de Yona pendant Kippour. Nous sommes entourés de gens que nous pouvons accuser d’être à l’origine de la tempête et ce serait très facile de le faire. Mais Yona nous apprend qu’il convient de reconnaitre notre rôle dans cette histoire, de se concentrer sur ce que nous pouvons améliorer. »[2]

La leçon est claire. Quand les choses ne se passent pas bien autour de nous, il est toujours plus simple d’imputer la faute aux autres, et il se peut qu’ils en soient un peu responsables, à un certain niveau. Mais le Rav de Brisk nous montre que ce n’est pas notre Avoda. Nous devons nous focaliser sur notre part de responsabilité dans la situation donnée, plutôt que sur la critique à formuler sur notre entourage. C’est un élément primordial de la Téchouva, car si on ne tire pas leçon des événements qui surviennent, on ne comprendra jamais les messages qu’Hachem nous transmet.

On raconte qu’un jour, le Rav de Brisk demanda à quelqu’un : « Que fais-tu ? » Pensant que le Rav lui demandait quelle était son activité professionnelle, l’homme l’en informa. Mais le Rav reposa la même question. Pensant qu’il avait du mal à entendre, l’homme réitéra sa réponse. Quand le Rav l’interrogea pour la troisième fois, l’homme comprit qu’il ne s’agissait pas d’un problème auditif. Le Rav expliqua qu’il ne demandait pas quel était le métier de l’homme, mais ce pour quoi il vivait. Il précisa que la vraie réponse est celle du prophète Yona. Quand on lui demanda quel était son métier, il répondit : « Je suis Hébreu et je crains Hachem »[3]. Peu importe les activités de la personne, elles ne sont pas sa raison d’être, son objectif dans la vie. Notre but doit être de craindre Hachem et d’accomplir Sa volonté.

Rav Immanouel Bernstein[4] ajoute une note intéressante. Il précise que Yona devait répondre à plusieurs questions posées par les marins : « Dis-nous, à cause de qui ce malheur nous frappe-t-il ? Quelle est ta profession et d’où viens-tu ? Quel est ton pays et à quel peuple appartiens-tu ? »[5] Alors comment la réponse de Yona suffit-elle à résoudre toutes leurs demandes ? Rav Bernstein explique : « Nous apprenons d’ici un enseignement fondamental : la réponse à la plupart des questions dans la vie, concernant notre façon de réagir à une situation donnée, est l’affirmation de notre identité. Une fois qu’elle est claire et précise, les autres réponses découlent naturellement »[6]

C’est un concept central durant le jour de Kippour. Tout d’abord, nous devons savoir qui nous sommes et quelles actions effectuées dans le passé marquent notre identité. Cela aura un effet notoire sur notre façon d’agir à l’avenir, même une fois que l’inspiration des Jours Redoutables déclinera. Si nous nous souvenons de l’idée du « Ivri Anokhi – Je suis Hébreu », quand nous sommes confrontés aux nombreuses difficultés de la vie, il nous sera beaucoup plus facile d’être clair et ferme et de réagir correctement face aux défis qui se présenteront.

 

[1] Yona, 1:12.

[2] Rapporté dans Téchouva, p. 256-257, du Rav Immanouel Bernstein.

[3] Yona, 1:9.

[4] Téchouva, p. 257-258.

[5] Yona, 1:8.

[6] Téchouva, p. 257-258.