« Quelle est la voie de rectitude (Dérekh Hayachar) que l’homme doit adopter ? Tout ce qui l’honore (Tiféret) à ses propres yeux et l’honore aux yeux d’autrui. »
Quelle est la question ?
La première Michna du chapitre 2 des Pirké Avot commence par une question et une réponse énigmatique. La Michna demande : quelle est la voie de la rectitude que l’homme doit choisir ? Avant de nous intéresser à la réponse, il faut comprendre le fond de la question.
La première question à se demander est la suivante : pourquoi la Michna prend-elle la peine de poser cette question : il va de soi que la voie de la rectitude est de respecter la Torah et les Mitsvot, c’est évident !
Nous relevons trois approches possibles pour traiter ce problème :
1. La Michna ne traite pas de l’observance des Mitsvot, mais elle se concentre plutôt sur les Midot, les traits de caractère et se demande comment un homme peut suivre cette voie de la rectitude au niveau de ses Midot.
2. La Michna évoque l’observance des Mitsvot, mais il existe divers types de Mitsvot et de manières de les accomplir. Par exemple, on peut réaliser une Mitsva d’une manière qui donne un bon sentiment à celui qui l’effectue, mais en revanche, ne donne pas une bonne impression aux observateurs (nous y reviendrons dans une prochaine section). Alternativement, on peut faire une Mitsva et impressionner les passants, mais nos propres motivations peuvent être impures. Donc la Michna se demande comment obtenir le bon équilibre dans l’observance des commandements.
3. La Michna traite des zones de Réchout: des domaines qui ne sont ni des Mitsvot, ni des Avérot (fautes), mais plutôt des activités neutres comme la consommation de nourriture, le sommeil et les loisirs. Même dans ces domaines, il existe des moyens convenants et inconvenants de se conduire.
Dans les prochaines sections, ces trois catégories apparaîtront dans les interprétations de la Michna.
Qu’est-ce que Tiféret ?
Au niveau littéral, Tiféret vient du mot Péer, qui signifie beauté ou splendeur. En conséquence, la Michna nous explique que les actions de l’individu doivent apparaître splendides à ses yeux et au regard des autres. A un niveau plus profond, la Tiféret est l’une des Midot des Séfirot (sphères), qui incarne le mélange harmonieux des Midot. Il représente donc un équilibre des autres Midot : les deux Séfirot précédentes sont le ‘Hessed et la Guévoura, que l’on traduit par la bonté et la force. Ces deux Midot peuvent être mises à profit de manière positive, mais également utilisées à mauvais escient, si l’une est utilisée de manière démesurée par rapport à l’autre.
La Tiféret est la combinaison adéquate de ces deux Midot. Elle est également représentée par Ya’acov Avinou. Contrairement à Avraham, qui représente le ‘Hessed et Its’hak, qui correspond à la Guévoura, Yaakov n’a pas de descendants imparfaits. Le sens réel du ‘Hessed est l’absence de limites, et sur le plan positif, il se manifeste sous forme de bonté. Mais un ‘Hessed excessif peut être négatif, sachant qu’il n’a pas de limites. Cette tendance s’est manifestée chez Ichmaël, qui représente les aspects négatifs du ‘Hessed.
La Guévoura est la force, et est liée à la Midat Hadin, l’attribut de Rigueur. La Guévoura est illustrée par des limites. Dans un sens positif, cela implique une maîtrise de soi, mais si on l’applique de manière négative, cela peut mener à la domination des autres et à la cruauté. Cette caractéristique se retrouve chez Essav.
Tiféret, d’un autre côté, ne peut être mal employé. Il est également comparé au Emet, la vérité : il ne peut jamais y avoir un excès de vérité. Ya’acov, qui représente le Tiféret et le Emet, n’a eu aucun descendant imparfait, tous ses fils ont été des Tsadikim.
Après avoir passé en revue le sens du Tiféret, nous voyons d’après la Michna que la « voie de la rectitude » apparaît harmonieuse et équilibrée à la fois pour la personne qui la suit et pour les observateurs. Dans les articles suivants, nous aborderons plus en détails comment ce principe s’applique dans notre vie quotidienne.