« Considère (Histakel) trois choses et tu n’en viendras pas être livré aux mains de la faute : sache ce qui est au-dessus de toi : un œil qui voit, une oreille qui entend, et que tous tes actes sont consignés dans un Livre. »
La dernière partie de la Michna nous prescrit de considérer trois points : au-dessus de nous, un œil voit, une oreille entend, et tous nos actes sont consignés dans un Livre. Il existe un certain nombre de questions sur cette section, mais il convient d'abord d'expliquer ce à quoi ces trois choses font références.
Selon une approche, un œil qui voit se réfère au fait que Hachem « voit » toutes les actions d'un homme, et une oreille qui entend fait allusion au fait que Hachem entend tout ce qu'il dit. La Michna nous apprend donc que nos actions, aussi bien que notre parole, sont constamment surveillées. Le troisième aspect : nos actions et propos ne sont pas seulement observés et écoutés, mais sont consignés pour l'éternité dans le livre qui rend compte de notre vie. D'après certains commentateurs, la Michna se réfère à ces livres ouverts chaque année à Roch Hachana. En méditant sur ces trois aspects, la Michna nous enseigne qu'un individu ne sera pas amené à fauter.
La question se pose : pourquoi la clause précédente de la Michna – que l'on doit calculer la perte entraînée par une faute – est-elle insuffisante pour empêcher un homme de fauter, et la Michna se doit d'ajouter cette exhortation supplémentaire ? Apparemment, ce calcul est nécessaire, mais il existe une forte probabilité que le concept de récompense et punition ne soit pas assez tangible pour l'individu et reste une idée vague. Cet aspect flottant l'empêchera peut-être de surmonter son Yétser Hara (mauvais penchant) à un moment d'épreuve. En conséquence, il est essentiel de s'efforcer de conférer plus de réalité au concept des actions surveillées. Pour y parvenir, il faut avoir recours à l'analogie de quelqu'un qui regarde ses actions, entend ses propos et enregistre tous ses faits et gestes. En réalité, avec les avancées de la technologie, il est très facile de l'envisager : les faits et gestes de tout le monde sont souvent enregistrés par divers moyens technologiques. De plus, les commentateurs relèvent l'usage du terme Histakel : ce terme est employé en divers lieux pour désigner une méditation profonde. Donc il faut méditer profondément sur l'idée que l'on est observé, entendu et enregistré. Ceci nous aidera à intérioriser le concept de responsabilité.
Autre point discuté par les commentateurs : la Michna affirme que considérer ces trois choses empêchera l'homme d'être livré littéralement « aux mains de la faute.» Pourquoi n'est-il pas dit simplement que l'homme ne fautera pas ? Réponse possible : ces termes font référence à une situation d'épreuve où l'homme est tenté de fauter – la Michna dit à l'homme que s'il médite profondément sur ces idées, il ne se mettra même pas dans des situations où il est livré « aux mains » du Yétser Hara et bien plus enclin à fauter. Cette idée est évoquée à plusieurs endroits des textes de la pensée juive. Un exemple : d'après la Halakha, un homme a l'interdiction de passer par un lieu où il verra des femmes vêtues de manière indécente s'il existe un itinéraire alternatif. De même, chaque jour dans les bénédictions du matin, nous demandons à Hachem de ne pas nous livrer « aux mains de la tentation », de peur que nous ne soyons incapables de relever l'épreuve. En conséquence, la Michna nous enseigne que si l'on intériorise correctement l'idée que toutes nos actions sont observées, entendues et enregistrées, on ne se permettra pas d'arriver à une situation de tentation.
Dernier point traité par les commentateurs : la Michna affirme que « tous nos actes sont inscrits dans un livre. » L'emploi du terme « tous » sous-entend même des actions qui ne sont ni des Mitsvot, ni des fautes, et désigne même des actions neutres, comme dormir et manger. D'où vient la nécessité d'enregistrer de telles actions neutres ? Réponse : en réalité, il n'existe pas d'action neutre – certaines actions sont nommées Divré Réchout- des actions permises, qui ne sont ni intrinsèquement des Mitsvot, ni des fautes, mais la Kavana (l'intention) que l'on a en les exécutant définit leur caractère positif ou négatif. Par exemple, si un individu mange afin de se renforcer pour pouvoir réaliser sa mission, sa consommation de nourriture se transforme alors en Mitsva. Or, s'il mange purement pour satisfaire ses désirs, sa consommation de nourriture entrera éventuellement dans la catégorie de la faute, comme celle de ne pas s'égarer après son cœur et ses yeux. En conséquence, la Michna nous rappelle que même nos actions apparemment « neutres » sont également enregistrées pour l'éternité.