La Parachat Yitro raconte le mémorable événement lors duquel Hachem donna la Torah au peuple juif. Nos Sages enseignent qu’avant de donner la Torah au Klal Israël, Hachem la proposa aux autres nations du monde. Le Sifri[1] affirme que lorsque Hakadoch Baroukh Hou se révéla pour donner la Torah à Israël, Il la montra d’abord à toutes les nations. Il alla voir les enfants d’Essav et Il leur dit : « Voulez-vous recevoir la Torah ? » Ils demandèrent ce qui y était écrit et Il répondit : « Ne tuez pas. » Ils refusèrent, parce que dans leur essence (et celle de leur ancêtre), ils étaient meurtriers. Hachem proposa la Torah aux enfants de Moav, qui, à leur tour, demandèrent ce qui y figurait. Il répondit : « Ne vous comportez pas de manière immorale. » Or l’essence de ce peuple est l’immoralité… Hachem se rendit chez les enfants d’Ichmaël et leur proposa la Torah. Ces derniers demandèrent ce qui était écrit dans la Torah et Hachem répondit : « Ne volez pas.» Ils dirent que leur père [Ichmaël] était un voleur invétéré. Et ainsi de suite, Hachem proposa la Torah à toutes les nations. Quand Hakadoch Baroukh Hou vit cette attitude, Il donna la Torah à Israël.
Hachem répondit à la question des nations (« Qu’est-il écrit dans la Torah ? ») en présentant la Mitsva la plus difficile pour chaque nation respective. Il a dit à Essav, dont le patriarche était un meurtrier, que la Torah interdit le meurtre. Il dit à Moav dont l’ancêtre, Lot, était immoral que la débauche était prohibée et il annonça à Ichmaël l’interdiction de voler. Les commentateurs posent une question sur ce Sifri. [2] Les 7 lois Noa’hides interdisent à tout le monde, même aux non-juifs, de tuer, de se livrer à l’immoralité (comme le fait de s’unir à une femme mariée) et le vol. Donc Hachem donna aux nations mentionnées des Mitsvot qui s’appliquent aussi aux Bné Noa’h, même s’ils n’acceptent pas la Torah.
Si Hachem voulait parler des Mitsvot supplémentaires qui se trouvent dans la Torah, pourquoi a-t-Il choisi des Mitsvot que ces nations devaient observer de toutes les façons ?! Et par ailleurs, pourquoi les nations ont-elles refusé la Torah, sur la base de la réponse d’Hachem, étant donné que l’acceptation de la Torah ne semble faire aucune différence dans leur mode de vie ? [3]
Rav David Cohen[4], Roch Yéchivat ’Hevron, explique qu’il y a une différence fondamentale entre les 7 lois Noa’hides et les 613 Mitsvot. Les 7 lois Noa’hides sont des commandements purement techniques qui permettent le bon fonctionnement de n’importe quelle société. Les non-juifs doivent s’engager à ces lois pour éviter l’anarchie et les comportements destructeurs. En revanche, les Mitsvot de la Torah ont un objectif bien plus élevé. Elles visent à perfectionner l’individu spirituellement.
On répond donc à la question de savoir pourquoi Hachem a mentionné des Mitsvot qui figuraient déjà dans la liste des 7 lois Noa’hides. Il voulait leur dire qu’il ne suffit pas de respecter les Mitsvot (comme l’interdit de voler ou de tuer) à un niveau basique qui ne sert qu’à maintenir une société fonctionnelle. En acceptant la Torah, les peuples devaient aborder ces Mitsvot avec un niveau beaucoup plus profond et non comme de simples lois pratiques. C’est également la raison pour laquelle ils refusèrent la proposition d’Hachem ; ils étaient disposés à respecter les Mitsvot élémentaires[5], mais ils ne voulaient pas changer profondément leurs êtres, leur essence. Par conséquent, les enfants d’Essav répondirent qu’ils ne pouvaient pas accepter l’interdit de tuer, car cela faisait partie de leur essence. Il en est de même pour les enfants de Moav qui rejetèrent l’interdit de débauche et pour les enfants d’Ichmaël qui refusèrent de se plier à l’interdiction de voler.
De plus, puisque le fait de respecter ces Mitsvot dans le cadre de la Torah visait un changement profond de chaque personne, il semble qu’il ne suffise pas de simplement suivre la lettre de la loi, mais plutôt de comprendre l’idée profonde de chaque Mitsva. Par exemple, en ce qui concerne les lois du Lachon Hara’, l’interdiction de dire du mal des autres. Comme l’enseigne le Rav Its'hak Berkovits, il ne suffit pas de s’abstenir de dire des choses négatives, tout en nourrissant de mauvaises pensées sur autrui. Au contraire, il faut devenir le genre de personne qui voit le monde d’un œil positif.
Puissions-nous mériter de nous transformer profondément grâce aux Mitsvot et d’élever notre personne selon la volonté d’Hachem.
[1] Sifri Vézot Haberakha, Piska 343.
[2] Sanhédrin 56a.
[3] On pourrait répondre simplement qu’ils étaient conscients que les châtiments divins pour la transgression des Mitsvot de la Torah fussent plus sévères que pour les 7 lois Noa’hides, mais une réponse plus profonde sera proposée ici.
[4] Mizmor Lédavid, ’Hélek 3, Maamar 12, p. 310-313.
[5] On pourrait bien concevoir qu’ils n’aient même pas voulu les respecter à ce niveau.