Les hommes des générations précédentes étaient beaucoup plus proches d’eux-mêmes que ne le sont nos contemporains. Ils connaissaient leurs qualités, leurs capacités, mais aussi leurs limites, et selon ces données, de façon naturelle, ils se dirigeaient vers un mode de vie et une profession qui leur convenaient. Ainsi, le comptable, le boulanger, le commerçant et l’orfèvre se côtoyaient, contents de leur sort, sans que l’un n’éveille en l’autre une quelconque volonté de changer son occupation.
La société occidentale moderne va tout bouleverser avec ses stéréotypes et ses dictats, en définissant ce qu’est l’homme "réussi" et par déduction ce qui ne l’est pas. Les valeurs mises en avant sont souvent très superficielles et loin des vraies qualités humaines. On peut dire que l’argent, le pouvoir et la célébrité sont en haut du hit-parade. Ce sont les créateurs, stars de musique et du cinéma, hommes politiques et grands journalistes qui prennent les places d’honneur ; médecins, avocats, juristes et experts-comptables sont relégués au second rang ; puis viennent très vite les "sous-métiers" qui malgré leur nécessité dans la société, ne sont pas côtés.
Cette conception est la cause d’un mal qui touche tout le monde : ceux qui ne font pas partie de ces privilégiés souffrent de la frustration chronique que leur cause le fantasme de la réussite, et ceux qui se trouvent en haut de cette hiérarchie sont toujours en lutte intérieure afin de paraitre au "top" et vivent dans la peur du "moins bien". Les relations sociales, familiales et conjugales bien sûr en pâtissent.
La racine de ce mal réside dans la méconnaissance profonde des outils dont nous disposons pour accomplir notre destin. Au lieu d’écouter la voix si fine de la particularité de notre âme, on se lance dans des carrières "tape a l’œil" très éloignées de nos prédispositions naturelles.
La Torah, dans cette Parachat Vayé’hi, va nous donner une leçon magistrale sur le délicat sujet de la connaissance de soi. Elle rapporte que Ya’akov, avant de quitter ce monde, tient à bénir chacun de ses enfants d’une bénédiction particulière. Il commence par ses trois premiers fils (Réouven, Chim’on et Lévi), et là – oh ! étonnement – il leur adresse des remontrances sévères, énumère leurs défauts et leur fait savoir le bien qu’ils ont perdu à cause de leur attitude. C’est un sermon bien plus qu’une Brakha (bénédiction) ! Ainsi, Réouven, l’ainé, qui aurait dû mériter la royauté et la prêtrise, perd ces attributs à cause de son impulsivité.
Le Rav Chlomo Wolbe répond à l’étonnante attitude de Ya’akov en nous énonçant un principe fondamental dans le Hinoukh (éducation) : mettre en relief et prévenir une personne de ses défauts, c’est la bénir ! En effet, ces données lui permettront de gérer intelligemment son avenir.
Chaque être humain a été conçu différent par le Génie divin, afin d’accomplir son destin particulier dans le monde. A chacun d’apprendre à se connaitre afin d’utiliser de façon maximale son potentiel, et c’est uniquement dans le cadre de ces données qu’on parviendra à se réaliser. La Brakha se trouve dans nos limites, celles que D.ieu nous a fixées. Ne pas connaitre ses outils, c’est risquer d’errer longtemps loin de soi même et de passer à coté de l’essentiel, à savoir de l’épanouissement de son être véritable, et les réveils peuvent être très douloureux. Alors gagnons du temps, car la bénédiction se trouve exactement là où se trouve notre place réelle.
La rédaction de Torah-Box magazine