Rav Yakov Sitruk, qui sillonne le pays du nord au sud et de l’est à l’ouest, a accepté de marquer une pause dans son emploi du temps très chargé pour répondre à nos questions. L’occasion pour lui de nous présenter les activités des centres de l'association Alef Lédoroth.
"Vous n’êtes pas facile à joindre…", fais-je remarquer, l’air de rien, au Rav Yakov Sitruk qui se tient à l’autre bout du fil. Je me garde bien de lui avouer que cela fait trois jours que je tente désespérément de le joindre pour les besoins de l’article à paraitre dans Torah-Box Magazine... "Ah, Mé’hila, j’ai été un peu occupé", s’excuse-t-il, l’air de rien aussi. Comme il va me l’expliquer par la suite, Rav Yakov Sitruk sillonne le pays du nord au sud et de l’est à l’ouest pour aller à la rencontre des communautés francophones des différentes villes et diffuser inlassablement la Torah. Il organise aussi des Chabbatot communautaires un peu partout, notamment pour les célibataires. C’est sans compter les cours hebdomadaires qu’il donne à Jérusalem, Tel-Aviv, Natanya et Ra’anana depuis des années. Bref, je l’excuse. Après cet échange d’amabilités, nous pouvons enfin commencer l’entretien en bonne et due forme.
Rav Yakov Chalom. Comment allez-vous ?
Baroukh Hachem, très bien merci.
Parfait. J’ai entendu que les choses bougeaient du côté de Tel-Aviv.
C’est exact. Nous travaillons avec mon frère Its'hak sur un grand projet communautaire, qui nous tient vraiment à cœur.
Comment tout cela a-t-il commencé ?
Il y a 20 ans, dans le cadre de mon association Alef Lédoroth, j’ai commencé à donner un cours à Tel-Aviv destiné à tous publics (le fameux cours du mardi soir !). À l'époque, il n'y avait pas du tout de cours pour les français de Tel Aviv. Le mouvement a suivi et depuis, ce rendez-vous hebdomadaire ne s’est jamais interrompu. Evidemment, au fil des ans, nous avons constaté l’évolution du public qui venait assister au cours. Au départ, il s’agissait presque exclusivement de jeunes et de célibataires, tandis qu’aujourd’hui, avec la ‘Alya de nombreux Français qui ont opté pour Tel-Aviv, nous voyons aussi des familles y assister. Constatant cette affluence, mon frère Its'hak a fondé et dirige désormais un centre communautaire ("Alef Tel-Aviv"), qui en plus d’offrir des cours, propose également toutes sortes d’activités, notamment de bénévolat.
Eh oui, parce que la théorie, c’est beau, mais il faut aussi savoir remonter ses manches !
Tout à fait, c’est toute l’idée de ces activités. De plus, il existe beaucoup de gens qui ne sont pas forcément attirés par l’idée de rester assis pendant une heure pour écouter un cours mais qui participent volontiers à des actions de ‘Hessed, comme le préconise la Torah, c’est donc une formule qui leur convient tout à fait. Il faut préciser que cette structure est tenue par mon frère Its’hak, qui effectue un travail extraordinaire.
Je ne savais pas que vous aviez un frère à Tel Aviv.
Oui, il s'est installé à Tel-Aviv avec toute sa famille pour pouvoir s'occuper pleinement du centre et de la communauté.
De votre point de vue, comment se passe l’intégration des Français à Tel-Aviv ?
On constate une évolution très positive. Mais la question de l’éducation reste comme toujours un point sensible. Les structures scolaires, comme nous le savons, sont très différentes en Israël de ce que l’on a pu connaitre en France. Le choix est très varié et souvent mal adapté à la mentalité française. Constatant les difficultés auxquelles étaient confrontées les familles à ce niveau, nous avions de prime abord envisagé d’ouvrir une école à leur intention avant de choisir de privilégier une autre formule, qui consiste à proposer des activités extra-scolaires ludiques tous les après-midi de la semaine aux enfants scolarisés ci et là à Tel-Aviv. L’idée est de leur proposer des occupations intelligentes et attrayantes, le tout centré autour des valeurs de la Torah chères aux yeux de leurs parents. Nous faisons également en sorte de les ouvrir au monde qui les environne en organisant des visites aux personnes âgées et esseulées, aux rescapés de la Shoa, aux malades dans les hôpitaux, etc. Il est magnifique de constater à quel point les enfants sont réceptifs à ces actions sociales. Ces actions ont été ralenties pendant la période du Covid-19 mais j'espère qu'elles reprendront rapidement de plus belle.
C’est un sacré travail. Qui encadre tout cela ?
Mon frère Its'hak s'occupe de tout ! Nous disposons aussi d’une équipe de bénévoles très motivés qui se chargent de mettre au point tout cela, mais nous avons également engagé du personnel très professionnel et spécialiste de l’éducation, afin d’encadrer les jeunes. Nous avons vraiment voulu nous donner tous les moyens de réussir ce projet qui peut finalement s’apparenter à un mouvement de jeunesse miniature, un peu à l’image de ce que les parents de ces enfants avaient connu et apprécié en France.
Magnifique. Et du côté de Jérusalem, comment se porte votre communauté ?
Très bien, grâce à D.ieu. Elle réside au 4 Hess Street et va fêter ses dix ans sous sa forme actuelle, ce qui inclut la synagogue, le Kollel, les Chabbatoth communautaires, les cours etc. Alef Lédoroth existe certes depuis 22 ans à Jérusalem, mais ce fut longtemps un centre qui dispensait surtout des cours tandis qu’aujourd’hui, il s’agit d’une vraie communauté, avec des offices en semaine comme à Chabbath, un Kollel d’Avrékhim, etc. Notre public est constitué de Juifs francophones de tous bords : des retraités comme des célibataires, mais aussi des familles avec enfants en bas-âge ou des gens qui font des allers-retours entre la France et Israël. Nous essayons de nous adapter à tous ces styles très différents en proposant des activités et des cours qui conviennent à tous.
Vous ne nous avez pas encore parlé des autres activités que vous menez dans les différentes villes d’Israël.
Ah oui, c’est vrai. En plus de Jérusalem et Tel-Aviv, je me rends également chaque semaine à Natanya et Ra’anana pour y donner un cours hebdomadaire. Autant que faire se peut, je suis également assez souvent sur Beth-Chémech, ‘Hadéra, Achdod et Achkélon.
Partout où il y a des Français, en fait.
Oui. Ma vocation, avec l’aide d’Hachem, est de diffuser la Torah vraiment partout. En fait, on s’aperçoit quand on côtoie les Français en Israël que le besoin de garder un contact continu avec une communauté et un rabbin francophone, issu de la même culture, est vraiment vital. Où qu’ils se trouvent, les Français ont besoin de cet environnement communautaire qu’ils ont connu en France, et cela ne contredit en rien leur volonté de s’intégrer. On peut être plus ou moins religieux, mais n’empêche que lorsque l’on est confronté à des problématiques, à des questions ou à des difficultés, c’est souvent vers son Rav que l’on se tourne. C’est un petit peu ce rôle que j’essaye, avec l’aide d’Hachem, de remplir auprès d’eux.
Depuis le décès de votre papa, vos activités ont dû être décuplées, non ?
C’est sûr. Les gens l’appréciaient tant qu’ils sentent le besoin de venir à notre rencontre pour perpétuer sa mémoire. Leurs témoignages d’affection nous touchent profondément. Mais justement, cette profusion d’actions en faveur de la communauté francophone est notre plus grande consolation, car c’était l’œuvre qu’il avait lui-même menée avec tant de succès de son vivant. Son exemple continue de nous inspirer pour aller toujours de l’avant.
Merci Rav Yakov de nous avoir accordé de votre précieux temps. Rappelez-nous juste l’adresse du centre Alef à Tel-Aviv.
C’est au 20 Hagilboa (tout près de Rotshild). Broukhim Habaïm !