Un israélien qui se définit comme non religieux, Yakir Assaraf, a rendu visite à une famille qui a perdu deux enfants lors de la tragédie de Mérone et en a été profondément marqué.
“Il se peut que je vienne de vivre l’un des moments les plus significatifs de ma vie”. C’est ainsi que Yakir Assaraf, photographe, pourtant habitué des voyages et des panoramas époustouflants, a défini sa visite chez la famille Englard au cours des Chiva, la semaine de deuil, marquant la disparition de deux de leurs fils lors de la tragédie de Méron avec 43 autres pèlerins.
Profondément choqué par la bousculade, Yakir a souhaité partager la douleur des familles, et il s’est rendu chez les Englard, avec un ami, afin de prendre le deuil de Moché Nathan Neta z’l (14 ans) et Yéochoua (19 ans). “Mon coeur est tout simplement empli d’émotions contraires : mes yeux sont embués par les larmes mais mon coeur est rempli de Sim’ha, de joie”. Comment expliquer ce mélange de sentiments ? Yakir s’en explique. “Lorsque mon ami Maor et moi, habillés et jean et en tee-shirt, sommes entrés chez la famille, nous étions vraiment très différents de la foule ‘haredi, vêtue en noir et blanc. Deux merveilleuses personnes se sont immédiatement levées en nous voyant, et nous ont installé en face de Mena’hem Mendel, le père qui a perdu ses deux fils il y a quelques jours tout juste.”
Alors que les personnes présentes parlaient en yiddish, le papa s’est immédiatement arrêté pour accueillir en hébreu les deux arrivants. “Les yeux trempés de larmes mais le visage radieux, il nous a dit : « Je suis si heureux que vous soyez venus. Depuis combien de temps cherchons-nous à nous rencontrer, vous et moi ? » A ce moment-là, nous l’avons regardé avec des yeux pétillants, comme si c’était un ange qui nous parlait.” Mena’hem Mendel reprend la parole. « Vous et moi sommes tous les deux peinés par la grande perte. Nous nous renforçons mutuellement, peu importe qui est non-religieux et qui l’est : nous sommes juifs ». Yakir se souvient : “Tout le monde dans le salon, dans un grand silence, écoute la conversation. D’un coup, je lance « Je veux que vous m’invitiez à vos Sma’hot, à vos événements joyeux ! » et il me répond « Et je vous inviterai à mes Sma’hot ! » Après quelques minutes de silence, il baisse les yeux et dit « Mi Kéamé’ha Israël, qui est comme toi Israël ! ». Après la prière du soir, ‘Arvit, nous nous sommes approchés de lui pour lui dire quelques mots de réconfort avant de partir, et le papa nous a devancés : « Merci d’être venus. Vous m’avez donné beaucoup de réconfort et de renforcement ».
Cette expérience a profondément marqué les deux hommes. “Maor et moi avons quitté la maison de deuil en nous regardant, incapables de prononcer le moindre mot. Il s’est passé quelque chose de fort, mais que je ne peux pas décrire. Ce qui s’est passé est un moment de vérité, la vérité de notre peuple, l’amour gratuit infini que nous avons l’un pour l’autre, la douleur partagée, la formidable foi qui continue de nous unir. Et je prie pour de bonnes nouvelles, un amour gratuit entre nous, que toutes les familles des victimes soient réconfortées par de vraies joies intérieures, et que je sois méritant d’être invité aux Sma’hot de Mena’hem Mendel”.