Suite à la terrible bousculade de Méron qui a coûté la vie à 45 personnes le 30 avril dernier, 63 enfants devenus orphelins de père tentent, tant bien que mal, de faire leur deuil depuis quelques mois.
63. Ce chiffre effroyable, supérieur au nombre de morts dans la bousculade de Méron, au cours de laquelle 45 personnes perdirent la vie le jour de Lag Baomer, la Hiloula de Rabbi Chimon bar Yo’haï, représente le nombre d’enfants qui sont devenus orphelins en l’espace de quelques minutes, le soir du 30 avril dernier 2021.
Parmi eux, les cinq enfants d’Ariel Tsadik du quartier de Bayit Végan, à Jérusalem. Mendy, aîné de la famille qui était présent avec son père à Méron le soir de la tragédie, se remémore non sans une peine énorme de la nuit horrible, et de la grande responsabilité qui repose désormais sur lui en tant que grand frère, dont le plus jeune frère est tout juste âgé de neuf ans. “Dans mes cauchemars les plus atroces, je ne pouvais pas penser que mon père faisait partie des victimes”, résume-t-il.
Ariel Tsadik était parti avec ses trois fils aînés pour célébrer la Hiloula de Rabbi Chimon bar Yo’haï. Il avait prévu de camper dans une tente sur le mont Méron pendant Lag Baomer et Chabbath, ce qui est fait très couramment par ceux qui n’ont pas les moyens de louer un appartement ou une chambre d’hôtel. L’un des frères de Mendy s’est rendu très tôt à Méron pour garder une place et installer une tente. Tous se sont retrouvés pour l’allumage des feux de joie de Lag Baomer.
Mendy et son frère Elazar, qui avait installé le campement, étaient présents pour la deuxième Hadlaka (allumage) de la ‘Hassidout de Toldot Aharon - la première étant, comme le veut la tradition, réservée à la ‘Hassidout de Boyan -, au moment où un ami l’a appelé, le mettant sur ses gardes : “Il y a eu un incident sérieux avec plusieurs victimes, on n’en sait pas plus”, l’a t-il alerté. Mendy se souvient qu’à partir de là, tout est allé très vite. “J’ai vu des membres de l’organisation de secourisme I’houd Hatzala courir partout. Étant secouriste, je suis allé leur prêter main forte. J’ai vu des choses terribles que je ne peux pas sortir de mon esprit”. Pendant qu’il portait secours aux personnes blessées, il reçoit un appel de sa maman, l’alertant sur la disparition de son frère Lévi Its’hak, âgé de onze ans. Le jeune homme tente de rassurer sa mère en lui indiquant qu’il se trouve avec son père, mais la maman a insisté, lui disant qu’il n'était pas avec lui. Mendy essaie alors d’appeler son père pour lui demander s’il a vu son petit frère, mais l’appel est resté sans réponse.
“Je n’étais pas plus inquiet que cela, j’étais sûr que papa aidait aussi les blessés, parce que c’était quelqu’un de fort, à la fois physiquement et émotionnellement.” Mendy essaie d’appeler son petit frère, sans succès en raison de la saturation du réseau téléphonique sur place. Il décide de monter vers le sommet du mont Méron pour tenter de trouver un meilleur réseau et il trouve, par hasard sur le chemin, son petit frère, qui lui explique que son père avait préféré le laisser à l’extérieur pour participer aux danses. C’est ainsi que Lévi Its’hak a été sauvé.
Mendy et ses frères passent la nuit entière à rechercher leur père. “Nous pensions qu’il avait perdu son téléphone dans la cohue. Au petit matin, nous sommes allés dans la tente, nous étions sûrs de le retrouver ainsi, sachant qu’il viendrait prendre ses Téfilines pour Cha’harit, la prière du matin. Comme il n’est pas venu, nous avons décidé de rentrer à la maison. Jamais je n’aurais imaginé qu’il avait été tué. Nous pensions, à ce moment-là, qu’il y avait une possibilité qu’il fasse partie des blessés.” (150 au total)
Finalement, la nouvelle tombe quelques heures plus tard, et accable la famille une heure et demie avant Chabbath.
“C’est une vie complètement différente sans lui”, s’épanche Mendy. “Il était tout pour nous. Il se souciait tellement de l’amour de son prochain. C’était un grand travailleur, qui travaillait toute la semaine, et le vendredi, il avait l’habitude de se rendre dans la vieille ville de Jérusalem pour assister à un cours de ‘Hassidout. Il en profitait pour mettre les Téfilines aux gens. C’était pour lui très important que chaque juif mette les Téfilines, il a fait cela pendant 20 ans. Sa sollicitude et sa volonté de rapprocher les juifs d’Hachem coulait dans ses veines, c’était dans son sang”.
Yéhi Zikhro Baroukh, que son souvenir soit une bénédiction.