On connaît l’influence et l’importance relative de la philosophie existentialiste, avec Albert Camus, Sartre et bien d’autres encore. L’idée centrale était que l’homme est « en trop » dans l’univers, dans un monde où la vie est une « énigme », où l’homme apparaît « actif » dans un univers apparemment « passif ». Le 'Hazon Ich, dans son livre « Émouna Oubita’hon », détermine cette ÉNIGME, la précise, et souligne ensuite l’ordre du monde, voulu par le Créateur, et démontre que la création est orientée par le Tout-Puissant.

Pour qui ne veut pas voir cette convergence, le Créateur et la création restent en interrogation devant un monde auquel il ne comprend rien. C’est l’attitude de ceux qui, se sentant étrangers dans le monde, le trouvent « absurde », ou essayent de donner à la création un caractère d’étrangeté. Ou bien l'on se sent étranger dans un monde absurde en essayant la jouissance. « L’absurde doit se sentir heureux » écrit-on. Ou bien l’on cherche toutes sortes d’idéologies de remplacement : ce fut le paganisme, ou les religions issues de la Bible, ou d’autres religions asiatiques, ou encore les idéologies modernes. L’athéisme n’est qu’une autre figure de ce besoin de référence : dès la troisième génération après Adam Harichon, on a cherché un substitut au Créateur, et on a donné le titre de divinité au monde créé. Le panthéisme de Spinoza est un autre avatar de cette recherche sans issue.

Il devait, du fait de toutes ces recherches vaines d’une Transcendance qu’ils ne trouvaient pas, il devait être évident que la nation qui, seule, était, est et restera le témoin du Créateur soit ressentie comme « gêneur », comme étrangère à leur égard. Lavan, le frère de Rivka, Pharaon en Égypte, 'Amalek avant même la Révélation du Sinaï, les divers peuples mentionnés dans la Chira (le cantique) de Moché qui tremblent devant l’arrivée d’Israël, tous ces éléments sont les premiers dans l’Histoire à considérer que le peuple d’Israël est « en trop ». Les 70 peuples de l’humanité – évoqués en parallèle avec le nombre des enfants d’Israël – doivent ressentir Israël comme étranger et lutter contre lui. Les incursions constantes des Philistins à l’époque biblique, les Babyloniens qui détruisirent le Temple de Jérusalem, les Grecs qui le souillèrent, les Romains qui l’ont brûlé, autant d’adversaires pour le Peuple élu. Les Croisades, l’Inquisition, les Cosaques, autant de tentatives d’exterminer le TÉMOIN de la Transcendance. La solution finale des nazis fut une tentative, au 20ème siècle, de continuer ce qu’avaient fait les nations dans le passé.

Israël est aussi étranger à un monde qui refuse de le reconnaître. Il est, par nature, par essence, différent des autres peuples de LA terre. Il est le symbole d’une autre voie pour l’humanité.

Mais cette différence, qui apparaît dans tous les exils, sur LA terre, est encore plus significative quand le peuple se trouve sur SA terre. Sa Terre, c’est la Terre Sainte, la Terre élue pour être le Siège du Tout-Puissant dans le monde matériel. Les Arabes, depuis Mahomet, n’ont jamais permis une quelconque autorité juive sur une terre appartenant aux Turcs. Évidemment hostiles à la Déclaration Balfour en 1917, ils ont effectué en 1929 un pogrom à Hévron, sur la Yéchiva qui s’y était installée. Refusant bien sûr la reconnaissance par l’O.N.U. de l’État d’Israël, en 1947, trois pays arabes ont fomenté des guerres contre Israël : guerre d’indépendance, guerre du Sinaï, guerre des Six Jours, guerre de Kippour. Finalement, comme les nations ont dû trouver Israël comme partenaire dans la région, les groupes terroristes ont pris la relève : Fatah, 'Hamas, 'Hezbollah sont aujourd’hui le fer armé qui refuse Israël dans la région, et ne cherchent qu’à obtenir la disparition de l’État juif, considéré, par eux, comme « étranger » sur sa terre.

Si l’on récapitule cette situation d’Israël dans le monde et sur son sol, il faut remarquer qu’Israël doit être étranger aux autres nations, car il est le représentant d’une valeur spirituelle aujourd’hui dans un monde ultra-mécanisé. La situation d’Israël est semblable au rôle de la « Néchama », l’âme dans le corps. Comme le dit le Gaon de Vilna à propos de Jonas – qui symbolise, selon lui, la Néchama – l’âme est en exil sur la terre, et il lui est difficile de trouver sa place. Le peuple juif – même non religieux – est le porte-parole de la spiritualité. Ce ne sont pas les armes qui vaincront, mais les forces spirituelles qui maintiennent le monde que D.ieu a créé. Étranger dans le monde, étranger sur son sol, Israël est le porte-parole d’une Vérité qui transcende les lieux et les siècles. Cette réalité est dure à vivre – pensons à la Shoah – mais elle garantit le maintien d’un monde mécanisé à outrance.

Ainsi faut-il comprendre cet acharnement à détruire le peuple juif. Notre héritage est la relation avec le Créateur : si nous comprenons cette réalité, alors le jour viendra où l’humanité n’aura d’autre refuge que la référence à un Créateur. Espérons voir vite et bientôt cette réalité !