Dans la réponse de la semaine dernière, j’ai commencé à clarifier pourquoi le fait d’avoir recours à des examens en vue d’un diagnostic précoce de certaines maladies n’était pas en désaccord avec la vision de la Torah, et ainsi que nous nous y étions engagés, nous poursuivons ici même notre investigation par le biais d’une thématique supplémentaire.
Il est écrit dans la Torah : « Tu seras intègre envers Hachem Ton D.ieu » [Devarim 18, 13]
Le commentaire de Rachi sur ce verset est bien connu : « Marche avec Hachem de façon ingénue, et espère Sa Présence, ne recherche pas les prédictions, accepte avec candeur tout ce qui t’arrive, alors tu seras vraiment avec Lui, et tu seras Son lot ».
A la lumière des propos de Rachi, certains ont pu argumenter que des analyses médicales en vue du diagnostic d’un risque de contracter une maladie définie, ou bien la détection d’une maladie au cours de ses premières phases, font partie des « présages », alors que tout bon Juif confiant en Hachem doit éviter de se fier à cette approche, et au contraire se comporter de façon sincère de par sa confiance en la Providence divine.
Cependant, cet argument n’est pas du tout objectif et témoigne d’une logique malsaine. Quand on parle du monde affaires (finances, commerce), on remarque que l’être humain est capable de mettre en œuvre tous les moyens pour anticiper le futur et collecter le moindre détail lui permettant d’analyser tous les développements et les risques imaginables. Mais dès que l’on aborde les questions médicales, au sujet desquelles l’être humain a un certain rejet naturel s’agissant du traitement de son avenir, il reporte ses craintes sur Hachem, tout en étant persuadé que ce faisant il acquiert l'intégrité.
Le sens du verset est totalement différent, et son objectif consiste à interdire toute démarche de prédiction du futur en consultant des astrologues et des sorciers, et incite plutôt à n’avoir confiance qu’en Hachem, ou bien encore de se tourner vers le Prophète ou bien les Ourim VeToumim (le Pectoral du Grand Prêtre) en cas de besoin, tout comme l’explique le Ramban sur ce verset, mais également sur le verset dans Béréchit [17, 1]. De ses propos nous apprenons deux choses :
- Il est interdit de consulter des devins (Meonenim), des magiciens et des sorciers pour prévoir l’avenir, du fait que le peuple d’Israël n’est pas soumis à la prédestination astrale, ou à d’autres forces qui leur sont liées.
- Il est du devoir de tout Juif de croire de manière absolue que le Peuple d’Israël n’est soumis qu’à Hachem seul.
Il va de soi qu’une demande d’examens médicaux pour dresser un diagnostic précoce de certaines maladies ne fait pas partie de cet interdit. Il s’agit d’un acte naturel nécessaire de quelqu’un qui s’efforce de préserver sa vie, et qui s’évertue à écarter de lui tout risque possible. Cela ressemblerait à quelqu’un qui voudrait entreprendre un voyage et qui vérifierait s’il se trouve sur son chemin des puits, des serpents ou bien des scorpions. Transgresse-t-il l’injonction de « Tu seras intègre avec Hachem Ton D.ieu » ? Bien évidemment, non ! Il en va de même du cas qui nous occupe.
Il existe encore un certain nombre d’arguments qui se font entendre de temps à autre, au sujet de ces analyses médicales. Mais tous ceux qui souhaitent marcher dans le droit chemin, comprendront qu’il est du devoir de chacun de suivre de manière rigoureuse les ordonnances des médecins, et de procéder à ces examens selon leurs instructions. Ainsi que l’écrit Maïmonide dans ses Hilkhot Déot [4, 1] : « Le fait que le corps soit sain et intègre fait partie de l'accomplissement du service divin, en effet il est impossible d'approcher la Divinité alors qu'on est malade soi-même, c’est pourquoi chacun doit s’éloigner de tout ce qui cause la perte du corps, et adopter des comportements qui guérissent et procurent le plein rétablissement. »
On trouve de même, écrit dans une jurisprudence émanant des Grands Dayanim (Juges) en Israël datant de Tevet 5778 (2018), entre autres ce qui suit :
« Il nous est apparu, d’après des médecins spécialisés, qu’il existe une incidence d’environ 6% des personnes âgées de 50 ans et plus, susceptibles - à D. ne plaise - de contracter le cancer de l’intestin grêle, alors que cette maladie peut être évitée dans 90% des cas si elle est détectée au cours des étapes précoces de son développement, la recommandation des médecins étant de subir une fois tous les 5 ans une coloscopie. Nous encourageons vivement d’adhérer à la préconisation des médecins de se soumettre à cet examen. Qu’il soit de la volonté de Notre Père qui est aux cieux que tous les membres du Peuple d’Israël soient protégés de toute affliction et maladie, et que se réalise à notre propos le verset : « toute la maladie que J’ai placée en Egypte ne t’atteindra pas, car Je suis Ton Guérisseur ».
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Rav Israël Meir Malka - Centre Halakha et médecine