Question 

Chalom Rav Malka,

Je m’appelle Éliyahou. Je fais du bénévolat dans une maison de retraite. Il y a beaucoup de gens âgés qu’il est nécessaire de laver pour des raisons hygiéniques. J’aurais voulu que vous m’indiquiez comment m’y prendre le Chabbath d’après la Halakha

Réponse

Chalom. Que vous soyez béni pour vos actes de bénévolat. Votre question revêt une grande importance, car elle nous oblige à nous pencher sur le concept de « dignité humaine » exigeant un examen Halakhique approfondi notamment lorsqu’il s’agit de la vie de gens âgés. Je développerai ce sujet dans la réponse détaillée ci-dessous. Mais en bref, en réponse à votre question, il vaudrait mieux que ce soit un non-juif qui les lave ; il aurait même le droit de chauffer l’eau quel que soit le moyen employé. Dans ce cas, essayez de le lui suggérer plutôt que de le lui ordonner explicitement (par exemple en lui disant : « cet homme a besoin qu’on prenne soin de lui »). S’il n’y a pas de non-juif, un juif sera autorisé à le laver. Mais s’il n’y a pas d’eau chaude disponible, il la préparera de façon inhabituelle (par exemple, en appuyant sur l’interrupteur avec un bâton). Attention ! Cette autorisation n’est valable qu’en cas de saletés touchant à l’hygiène corporelle. Aussi, je vous recommande grandement de prendre connaissance de la réponse détaillée. 

Réponse détaillée

Selon l’opinion de nombreux décisionnaires, même dans le cas d’un vieillard qui n’est pas considéré comme malade, il est permis de dire à un non-juif d’effectuer tous les soins nécessaires à sa toilette en raison de la règle stipulant de respecter la « dignité humaine » quand bien même ces actes impliqueraient de transgresser des interdictions de la Torah comme l’allumage d’une chaudière ou d’un chauffe-eau. 

La raison en est que nous avons trouvé dans un certain nombre de sources Halakhiques que les questions touchant à la propreté du corps relèvent du respect de la dignité humaine. Pour ce motif, les Sages avaient, par exemple, permis d’apporter dans les W.C. des pierres appropriées à la toilette intime bien qu’elles soient Mouktsé (interdites au déplacement) Certains des plus grands décisionnaires ont émis un avis innovant selon lequel il est permis de demander à un non-juif d’exécuter des travaux prohibés même par la Torah puisque la demande en elle-même n’est proscrite que par ordre rabbinique. Certains décisionnaires ont, en foi de quoi, permis de demander à un non-juif de déchirer du papier toilette pendant Chabbath par respect pour la dignité humaine. D’autres ont de même autorisé de demander à un non-juif de rédiger durant Chabbath un acte de décès lorsqu’il s’agit de préserver la dignité du défunt.

Il convient de savoir pour quelle raison les décisionnaires n’ont pas jugé nécessaire de différencier les interdictions rabbiniques bien que, généralement, nous examinions chacune d’entre elles au cas par cas. Ainsi que le Séfer de responsa Yabi’a Omer le dit avec insistance, la règle ordonnant de respecter la « dignité humaine » comme elle est définie dans le traité Bérakhot a une telle gravité qu’elle a le pouvoir d’outrepasser celle énoncée dans le verset « Lo Tassour Min Hadavar Acher Yaguidou Lekha Yamin Ousmol - Tu ne t’écarteras pas de la parole qu’ils t’énonceront ni à droite ni à gauche » (Dévarim, 17, 11). C’est-à-dire que toutes les Mitsvot et toutes les interdictions d’ordre rabbinique ne sont pas en mesure de s’opposer à la règle imposant de respecter la « dignité humaine. » Par conséquent, nul besoin de les distinguer les unes des autres.

Mais comme le soulignent les décisionnaires, il faut faire la différence entre une « profonde humiliation » (telle que celle ressentie par un vieillard souffrant d’incontinence) et une « honte légère » (telle que celle provoquée, par exemple, par l’exhalation d’une odeur de transpiration ou autres). C’est donc uniquement dans le premier cas qu’on aura la possibilité de lever toutes les interdictions rabbiniques. Il est important de se rappeler cette règle et de ne pas en venir à autoriser par insouciance à enfreindre tout interdit rabbinique au nom de la dignité humaine. Au contraire, chaque cas nécessite d’être tranché par une autorité rabbinique spécifique. Mais en ce qui concerne notre question, s’il s’agit en effet d’une grave humiliation et, dès lors, il est permis de lever les interdictions rabbiniques. 

Par conséquent, comme nous l’avons dit, il est permis de demander à un non-juif de procéder à la toilette de personnes âgées, ce qui ne constitue somme toute qu’une interdiction rabbinique. Dans le cas où il n’y aurait pas de non-juif et que de l’eau chaude ne serait pas non plus disponible, mais que son emploi serait indispensable, même un juif pourrait effectuer l’opération requise en la chauffant de manière inhabituelle, par exemple en actionnant l’interrupteur au moyen d’un bâton ou avec le dos de la main.  

Références

Guémara Chabbath, 81a et b ; Choul’han ‘Aroukh, chap.312, §1 ; Kaf Ha’haïm, chap.402, §56 ; Chemirat Chabbath Keh’il’khata, chap.30, note 24 et chap.64, §29 ; Responsa Yabi’a Omer, 9e partie, chap.108, § 185 ; Or’hot Chabbat, chap.23, note 175 ; Mélakhim Omnaïkh, chap.10, note 5.

 

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