“Puissiez-vous construire un édifice éternel !” : Vous ne vous êtes jamais posé la question de savoir pourquoi on bénit les jeunes mariés d’un vœu qui paraît ni plus ni moins irréalisable ? En effet, comment deux êtres mortels pourraient-ils construire un édifice éternel ? Et pourtant, cette bénédiction fait l’unanimité. Qu’est-ce que cette Brakha signifie véritablement ? En quoi est-elle tout sauf dérisoire ?
Cette réflexion m’est venue il y a quelques semaines, quand je faisais un peu de rangement à la fin des Chéva’ Brakhot de ma fille, et que je rassemblais toutes les cartes de vœux, qui accompagnaient chèques et cadeaux, éparpillées dans la maison. Sur chacune d’entre elles, il y avait cette phrase : « Puissiez-vous construire un édifice éternel », que ce soit la femme du rabbin, ou la grand-tante pas du tout pratiquante. En tant que mère de la mariée, je souhaitais, évidemment, du plus profond de mon âme qu’ils soient heureux, qu’ils fondent une famille, qu’ils ne manquent de rien, mais je ne comprenais pas cette notion d’édifice éternel.
De plus, nous étions juste après la période des 3 semaines qui sépare le 17 Tamouz du 9 Av, et ça rendait ce concept encore plus flou. Je pensais : « Même le saint Temple n’est pas éternel, il a été détruit à deux reprises, alors comment un simple foyer, qui résulterait de l’union de deux êtres de chair et de sang, pourrait l’être ? » J’envisageais vraiment de suggérer une autre bénédiction internationale, jusqu’à ce que je comprenne.
En plus de marquer la double destruction du Temple, la journée de Ticha’ Béav racontait notre histoire de peuple persécuté. Ces 24 heures concentraient les nombreuses tragédies que nous, Juifs, avons subies parce que Juifs. Et pourtant, des milliers d’années plus tard, on est encore là, grâce à D.ieu, la tête haute et le cœur plein de rêves et d’espoir. Ticha’ Béav est la preuve que notre existence éternelle relève du miracle. Et ce miracle, c’est la construction de nos foyers juifs.
En effet, lorsqu’un couple se forme, qu’il s’engage à vivre selon la loi juive et qu’il invite D.ieu à séjourner entre ses 4 murs, il crée sans aucun doute un édifice éternel au sein de leur foyer humainement limité.
La première maison juive bâtie dans les règles de la loi était celle de Sarah Iménou et Avraham Avinou. Ce foyer s’est vu enveloppé d’une sainteté et protection Divine sans pareille. Les ‘Hallot restaient fraîches et les Nérot restaient allumées de Chabbath en Chabbath, et une nuée de gloire planait constamment au-dessus de leur tente.
Ce sont précisément ces trois mêmes signes que nous avons retrouvés plus tard dans le Temple. Nous comprenons donc mieux la bénédiction faite à tous les mariés, et la relation qu’il y a entre un foyer juif qui se forme et l’édifice de sainteté représenté par le Temple. « Puissiez-vous construire un édifice éternel. » Il n’y a pas plus approprié finalement.
En tant que maman, c’était précisément ce que je souhaitais à mes enfants. Certes, je leur souhaitais d’être heureux et de s’aimer de longues années comme au premier jour, mais je leur souhaitais aussi et surtout de construire une maison juive, à l’image de la maison de Sarah et Avraham, une maison où la présence Divine résiderait avec honneur et plaisir, une maison de Torah et de spiritualité. Je leur souhaitais de créer cet espace qui, malgré le fait d’être indéniablement limité dans le temps et dans l’espace, était éternel aux yeux de D.ieu, car, même si, pour le moment, D.ieu n’a pas de maison fixe, Il continue de résider parmi nous grâce à ces maisons juives qui L’accueillent et Lui donnent une place de choix. Ce sont grâce à ces éternelles maisons juives que le peuple d’Israël continue d’exister malgré les persécutions et les infatigables efforts des nations pour nous détruire à jamais. Mais tant qu’il y aura des maisons juives, il y aura un peuple juif. « Puissions-nous continuer de construire des édifices éternels. »