« Quand je fis Téchouva, quelqu’un m’avait dit qu’il fallait prier en donnant un maximum de détails à Hachem… Je décidai de suivre son conseil. Je priai pour que mon futur mari soit juif orthodoxe, médecin et… portoricain ! »
Sous la ‘Houppa, je m’étais promise de diffuser mon histoire autour de moi tant elle est miraculeuse. Je veux parler de la façon dont Hachem a fait se rencontrer deux âmes – celle de mon mari et la mienne – d’une manière parfaitement prodigieuse et alors que rien ne semblait pouvoir les rassembler…
Une juive qui rêve d’Amérique, un Américain qui rêve de judaïsme
2009. J’ai 30 ans, je suis jeune, pleine de vie, complètement ignorante de mon judaïsme et je décide de quitter Israël pour le rêve américain. Là-bas, je rejoins des amis israéliens qui dirigent une affaire florissante de stands de vente dans les grands centres commerciaux.
À cette époque mon mari quant à lui était… Goy. Oui, Goy ! Mais un Goy pas comme les autres. Car depuis tout petit, Avraham s’était toujours interrogé sur la signification de ce monde. Où trouver la vérité ? Qui a créé le monde ? Autant de questions qu’il avait décidé d’élucider en allant puiser dans les différentes religions, mais en vain. Christianisme, islam, bouddhisme, toutes lui semblèrent pleines d’incohérences. Ce n’est que lorsqu’il fit connaissance avec le judaïsme qu’il comprit qu’il venait de trouver ce que son âme recherchait depuis si longtemps. Il décida alors de déménager à Atlanta (Géorgie), où existe une grande communauté juive autour de la synagogue « Kéhila », et d’entamer un processus de conversion orthodoxe.
Moi, entre-temps, je suis à mille lieues de tout cela. Je travaille, je gagne beaucoup d’argent... Après deux ans d’une vie pleine d’épicurisme, plongée dans les plaisirs matériels inépuisables que seuls les États-Unis peuvent offrir, je commence à en avoir assez et à m’intéresser à mon identité. Je découvre un monde à la beauté indicible, d’une richesse que j’ignorais complètement… J’entame de mon côté un processus de Téchouva, fulgurant.
« Orthodoxe, intellectuel, médecin de préférence et… portoricain ! »
Évidemment, à 33 ans, l’une des questions qui m’occupaient le plus l’esprit était celle de trouver mon Mazal. Combien n’ai-je pas prié, combien n’ai-je pas pleuré…
C’est alors que quelqu’un me dit, au détour d’une conversation sur la Émouna (foi), qu’il était important de prier en détaillant au maximum nos demandes. Pour ouvrir les portes de la Brakha, il fallait, m’expliqua cette personne, donner un maximum de détails à Hachem, prouvant par là notre foi parfaite qu’Il est seul capable de combler tous nos manques. Sur ces conseils avisés, je me mis à exprimer chaque jour une prière pour le moins exubérante : « Hachem, je T’en prie, envoie-moi un garçon qui soit juif orthodoxe, intellectuel, médecin de préférence et… portoricain ! » (J’ai toujours eu un faible pour les Portoricains…)
Traversée du désert
À cette époque, la société pour laquelle je travaillais décida de déménager à Columbus, en Géorgie (soit à deux heures de route d’Atlanta, où se trouvait Avraham). Columbus est une ville riche, pleine d’attractions et de distractions. Sur le plan spirituel, il s’agit d’un véritable désert. Les gens sont là pour gagner de l’argent et profiter, un point c’est tout.
Hélas, les jsombres présages de la famille avec laquelle j’avais fait Téchouva se réalisèrent... Petit à petit, je sentis ma Émouna s’effriter et avec elle, mon accomplissement des Mitsvot.
Puis un soir, ce fut la crise. Hystérique et en pleurs, j’appelai ma famille d’accueil pour pleurer ma détresse. Le père m’adressa des paroles qui restèrent gravées en moi jusqu’à ce jour : « Ayélet, D.ieu ne place jamais quelqu’un devant une épreuve sans lui donner les forces d’y faire face. Tu vas te relever et tu verras que D.ieu te récompensera au centuple en t’envoyant ton Mazal ! »
Il ne m’en fallait pas plus. Je décidai de reprendre les rênes de ma Téchouva.
Tous les chemins mènent à Atlanta
Nous sommes alors en 2011. Mon mari se trouve à quelques jours seulement de la date de son Mikvé, jour où il doit officiellement rejoindre le peuple juif. Le problème, c’est que s’il obtient maintenant sa conversion, il risque de trouver un Chiddoukh avant que je n’ai moi-même le temps de rejoindre Atlanta… D.ieu fait donc en sorte que le processus soit mis en veille. Avraham fait un grave accident de voiture duquel il ressort amnésique et handicapé.
Pourtant, animé d’une volonté indicible, après quelques mois seulement, Avraham est complètement réhabilité. Il a réappris l’hébreu et il obtient une nouvelle date pour s’immerger enfin au Mikvé !
Cette même semaine exactement, mon boss et moi nous rendons à Atlanta (comme par hasard...) pour nos affaires. Dès que je pénètre dans cette ville, une sensation inexplicable me prend. Je suis comme magnétisée. Je dois rester ici.
Mon patron m’arrête net : « Ayélet, ne rêve pas, tu n’as aucune chance ici. On a déjà par le passé essayé de nous implanter à Atlanta, sans succès. Il n’y a pas d’avenir pour nos stands. »
Devant mon insistance, mes pleurs et mes supplications incompréhensibles, il accepte… de faire un pari fou ! Il décide de faire un nouvel essai et de déménager son affaire à Atlanta. Un vrai miracle, que lui-même ne s’explique pas jusqu’à ce jour !
Un brun et une brune dans une synagogue achkénaze
Peu après, nous emménageons dans nos nouveaux bureaux et très vite, je fais connaissance avec le Beth ‘Habad local.
Un jour, de but en blanc, l’un des Israéliens du Beth ‘Habad me dit : « Si tu veux trouver ton Mazal, je te conseille d’aller voir du côté de la synagogue orthodoxe en face, Kéhila ». « La synagogue en face ? Mais quel rapport ? Ce sont des Américains 100% pure souche, Ashkénazes, et moi, regarde de quoi j’ai l’air ! » « Fais comme tu veux, me coupe-t-il. Mais si tu suis mon conseil, c’est là-bas que se trouve ton Mazal. » Sic !
Qu’ai-je à perdre ?, me dis-je. Au pire, un peu de contenance. Je prends contact avec le rabbin de la communauté et sa femme (un couple exceptionnel qui m’invite d’emblée pour le repas du vendredi soir). Pourtant, dès que je pénètre dans la synagogue, je comprends que j’ai fait une grossière erreur… Je suis la seule brune, mate et Israélienne dans une marée d’Ashkénazes blonds aux yeux bleus. Mais qu’est-ce que je fais là ?, me dis-je. Pourtant, depuis la galerie des femmes, je jette un regard furtif du côté des hommes et remarque quelqu’un qui dénote, lui aussi. Il porte une grande Kippa noire. Il est grand, musclé, plutôt basané… Tiens, on dirait qu’il est portoricain…
À l’issue de la prière, je m’apprête à reposer mon Siddour dans la bibliothèque quand je tombe nez à nez avec… le Portoricain ! Il se présente : « Chabbath Chalom, je suis Avraham ». « Chabbath Chalom », répondis-je, toute tremblante. « Moi c’est Ayélet. Tu viens d’où ? » « Je suis portoricain. Je suis médecin. Demain, je serai enfin juif… » Mon cœur cesse de battre quelques instants. Hachem, ce n’est pas possible. Se pourrait-il que je sois en train de parler avec mon futur mari… ?
Je suis quelqu’un de plutôt terre-à-terre. Pour tout dire, jusqu’à ce que je le vive moi-même, je n’avais jamais cru aux histoires à l’eau de rose du style : « Nous avons su que nous étions faits l’un pour l’autre dès le premier regard »... Et pourtant, voilà que je tenais le premier rôle d’un tel scénario !
Dès le lendemain, je glane quelques renseignements sur Avraham auprès du rabbin et de sa femme. De son côté, Avraham en fait de même (mais ça, je ne l’apprends que bien plus tard...).
Deux semaines après, Avraham s’immerge enfin au Mikvé. Le moment qu’il attend depuis tant d’années est enfin arrivé ! Il en ressort juif, fier et heureux.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, mais le soir même, nous nous rencontrons, par l’entremise du rabbin et de son épouse. Pourquoi perdre du temps alors que nous sentons tous deux que nous avons rencontré chacun notre moitié ? Il ne nous en faut pas plus pour prendre notre décision dès le lendemain : nous voulons nous marier !
Deux mois plus tard, le temps de régler tous les préparatifs, le lendemain de Yom Kippour (oui, oui, nous avons jeûné deux jours d’affilée…), nous nous sommes unis sous une ‘Houppa placée sous les étoiles du ciel. Personne parmi l’assistance ne put retenir ses larmes… Encore longtemps après, l’histoire de notre rencontre miraculeuse continua d’être sur toutes les bouches dans les communautés juives de la ville.
Aujourd’hui, je vis heureuse au sein d’un foyer Cachère, dans la Torah et le respect des commandements, auprès de mon mari juif orthodoxe, intellectuel, médecin et portoricain… Comme dans mes prières les plus exubérantes !
Ayélet Mali’hi-Rozanes