Question d’une internaute : Bonjour. Je vous écris car je suis un peu désemparée. Je faisais mes courses au supermarché avec ma fille de 12 ans et je l'ai envoyée chercher un article dans un rayon. Au bout de 5 minutes, je ne la voyais toujours pas revenir, c'est alors qu'on m'a appelée à l'accueil. On m'a fait rentrer dans une pièce où ma fille se trouvait et le vigile de m'annoncer qu'elle avait ouvert un paquet de confiserie, en avait pris une poignée et jeté le reste. Le ciel m'est tombé sur la tête. Je ne comprends pas, pourtant, elle ne manque de rien. J'ai bien sûr payé le paquet de confiserie et nous sommes rentrées à la maison. Maintenant, je ne sais pas quoi dire ni faire. Pouvez-vous me conseiller ? Merci !
La réponse de Mme Nathalie Seyman
De toutes les bêtises que peuvent faire nos enfants, celles qui renvoient directement aux valeurs qu’on tente de leur transmettre sont les plus difficiles à accepter. Comment réaliser que le fruit de nos entrailles, de qui l’on est si proche, puisse s’abaisser à commettre un délit ? Pourquoi ne l’a-t-on pas vu venir ? Est-ce l’expression d’un mal plus profond ? D’un message ? Et surtout, comment y remédier ?
L’enfant et le vol
Il est important de savoir que c’est l’âge de l’enfant qui définira le degré de notre inquiétude. Avant l'âge de 5 ou 6 ans, on ne parle pas de “vol”. Petits, les enfants explorent le monde qui les entoure avec le sentiment que tout ce qu'ils voient leur appartient. Ils n’ont pas la notion de propriété. Ils ne considèrent donc pas le vol comme quelque chose de mal. Mais ce sont les explications de l’adulte et le respect de ce qui leur appartient (l’adulte doit bien faire attention à respecter ce qui appartient à l’enfant) qui permettront à l’enfant d’intégrer petit à petit la notion de propriété.
Un peu plus grand, il faudra se poser la question si, justement, il n’y a pas eu une faille dans l’intégration de cette notion d’appartenance.
La question d’inquiétude commence donc à partir de l’adolescence de l’enfant, aux alentours de 12 ans. Car, à cet âge-là, on ne peut plus douter de sa compréhension sur ce qui lui appartient ou pas.
Mais attention, il faut bien différencier le vol qui n’a été commis qu’une seule fois et le vol à répétition. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter si cela n’est arrivé qu’une seule fois et que cela ne se reproduit pas. La plupart des enfants volent pour tester : tester la réaction de leurs parents, tester leur témérité, tester leur pulsion... À partir du moment où on leur explique pourquoi c'est interdit, ils ne recommencent pas. Mais si un enfant recommence à voler et, surtout, continue à le faire de manière régulière, alors il faut s'en inquiéter : son comportement cache une souffrance qu’il faut impérativement découvrir.
Qu’est-ce qui peut pousser un enfant à voler ?
Il est impératif de se poser cette question. Il faut comprendre ses motivations. Elles peuvent être conscientes ou inconscientes, mais, quoi qu’il en soit, demander à son enfant pourquoi il a ressenti le besoin de voler, de prendre cet objet précis, est essentiel. Voici quelques causes qui peuvent expliquer qu’un enfant cède à l’impulsion de voler :
- Par tentation : L’enfant n’a pas pu s'empêcher de céder à son désir de posséder cet objet. Il en a eu envie et l’a pris. Il s’agit de la cause la plus fréquente. Il sera important dans ce cas-là de tester son degré de résistance à la frustration. Supporte-t-il le “non” ? Accepte-t-il l’interdit ? À une époque où les gens supportent de moins en moins la frustration et courent après la réalisation de tous leurs désirs immédiats, il est urgent de rectifier le tir et de faire bien attention à ce que nos enfants puissent supporter leurs frustrations en leur apprenant à vivre avec. Il en va de leur satisfaction personnelle et de leur bonheur futur.
- Pour braver l’interdit : L’enfant veut tester ses limites et celles de ses parents. Il explore les interdits et, si le parent réagit d’une manière cohérente, alors il ne recommencera plus.
- Par identification : Il s'agit là du désir de faire comme l'autre afin de lui ressembler. L’enfant qui a volé a pu voir un autre enfant (qu’il connaît ou non) le faire et a eu envie de se mettre au même niveau que cet autre enfant. Cela peut traduire le sentiment de se sentir rejeté, donc de vouloir être accepté dans un groupe, de s’intégrer. “En faisant comme les autres, je serai accepté par eux.”
- Par compensation : Dans certains cas, le vol d'objet peut être la réponse à un manque. L’enfant vole pour combler un vide qui l’habite. En général, il s’agit d’un manque affectif. C’est un peu comme les personnes qui mangent pour se remplir. C’est ce type de vol qui est susceptible de devenir répétitif. C’est dans ce cas, surtout, qu’une prise en charge sera nécessaire.
Mes conseils
- Tout d’abord, ne pas dramatiser : Ce n’est pas parce qu’elle a volé une fois, qu’elle est une “voleuse”, ‘Hass Véchalom ! Elle a commis un acte regrettable, certes, mais il ne faut pas que vous vous en inquiétiez outre mesure.
- Par contre, il faut rester clair et ferme : le vol est interdit. Dans la loi et dans la Torah. Expliquez-lui qu’il entraîne des conséquences désagréables pour tout le monde. Non seulement pour celui qui est volé, car il s’en retrouve lésé d’un bien qui lui appartenait et qu’il avait payé, également pour elle-même, car elle n’a pas dû se sentir à l’aise en se faisant prendre par le vigile, mais aussi pour vous, qui avez ressenti une grande peine de voir votre enfant accusé et en délit. Surtout, ne la terrorisez pas. Il n’est pas utile de parler de prison, cela ne pourrait que lui faire peur, or, le but est de lui faire comprendre pourquoi elle ne doit pas recommencer.
- Parlez-lui et tentez de comprendre les motivations de cet acte pour savoir comment vous positionner.
- Une réparation plutôt qu’une punition. Plutôt que punir, il est plus efficace de proposer de réparer le tort commis. Demandez à votre fille comment pourrait-elle réparer le tort qu’elle a fait au magasin : écrire un mot d’excuse, rendre un service au directeur du magasin, rembourser sur son argent de poche… L’important n’est pas de culpabiliser l’enfant, mais de le responsabiliser.
- C’est une bonne occasion d’aller avec elle à un cours de Torah sur le vol, ou bien l’écouter sur Torah-Box. Elle apprendra un peu plus sur cet interdit et sur les conséquences qui peuvent en découler pour elle et pour les autres.
- Ne racontez pas aux autres (fratrie, grands-parents, etc.) ce qu’elle a fait. Ce ne sera pas constructif, bien au contraire, c’est humiliant. Cela doit rester entre elle, son père évidemment, et vous.
- Une fois que vous vous êtes comprises, ne revenez plus sur ce qu’il s’est passé. Vous tournez la page et vous lui faites de nouveau confiance.
Aujourd’hui, vous n’avez pas matière à vous inquiéter. Mais si cela se reproduisait, alors, en effet, il conviendra de parler plus en profondeur avec elle et d’aller consulter un professionnel.
Béhatsla’ha !
Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.