Presque en forme de poésie, de comptine enfantine, le Talmud (traité Ta’anit) nous rapporte le merveilleux monologue d’un homme à un arbre :
“Arbre, arbre, par quoi te bénirai-je ?
Que tes fruits soient doux ? Mais tes fruits sont déjà suaves...
Que ton ombre soit déployée ? Mais ton ombre est déjà étendue...
Que de l’eau fraîche nourrisse tes racines ? Mais l’humidité déjà les nourrit…
Alors ?...
Alors ma bénédiction sera : que tous tes plants - ces jeunes pousses qui sont extraites de toi - te ressemblent !”
"L’homme est un arbre des champs", nous dit la Torah (Dévarim 20,18), et l'analogie entre l’un et l’autre est ramenée dans nos textes : racines, branches, feuillages, vaisseaux où coule la sève, comme les veines où coule le sang, et, bien sûr, la faculté de donner des fruits sont des caractéristiques semblables entre l'être humain et l'arbre.
Les hommes continuent à vivre après 120 ans par leurs enfants qui portent leurs gènes, chair de leur chair. Notre descendance est une partie de nous, une prolongation de notre être, une forme d’éternité pour l’être humain.
La transmission aux générations futures est, dans la Torah, un point cardinal, et on peut dire que ce sont parmi les thèmes principaux traités dans le livre de Béréchit : nos Patriarches et Matriarches n’ont de cesse de s’occuper de la construction des générations futures et de leur transmettre raffinement du caractère et conscience de leur mission. Car si, dès le départ, dès le plus jeune âge, on s’efforce de transmettre ce bagage à notre progéniture, ces valeurs s’inscriront dans leur code génétique. Nos Sages le savaient, à tel point que la Guémara peut témoigner : “On reconnaît les descendants du peuple hébreu par 3 choses : ils sont humbles, réservés et aiment faire le bien.”
La routine souvent nous rattrape et on oublie parfois de s'arrêter un instant et d’y réfléchir : sans entretien, “nos branches”, “nos feuilles”, “nos racines”, notre “sève”, peuvent se dessécher, et le lien parents/enfants s’émousser.
Une des solutions pour éviter cet état de choses s’appelle : présence parentale. Être là, remuer la terre, arroser, mettre un tuteur de soutien, arracher une mauvaise herbe et, parfois, ne rien faire et regarder pousser, émerveillé.
Tou Bichvat, c’est l’occasion de faire un inventaire annuel sur l’état des lieux, de récapituler ce qui est vraiment important pour savoir si nous avons peut-être négligé certaines choses dans notre jardin, et éventuellement y remédier.
Voici un Top Ten des meilleurs conseils dans le domaine.
Les voici :
1. Amour. Simple et essentiel. Paroles chaleureuses, main sur l’épaule, un baiser sur le front, un câlin. Les enfants ont besoin de savoir qu’on les aime. Certains parents pensent : « Mais pas besoin de le dire, c’est évident ! ». Non. Les mots et les gestes d’affection sont une nourriture sans laquelle, comme une plante sans eau, un enfant se fane.
2. Confiance. Il faut savoir que les enfants enregistrent nos inquiétudes et, comme des petits sismographes, nos peurs s’inscrivent en eux. Les enfants doivent être rassurés, c’est un de nos rôles principaux en tant que parents, après le souci de les nourrir et de les habiller. Pour leur donner confiance en la vie, il faut leur montrer un visage serein et s'efforcer d'être pour eux des ancres solides, sur lesquelles ils sentent qu’ils peuvent s’appuyer.
Mais c'est aussi montrer à un enfant qu'on lui fait confiance et, ce, à travers mille opportunités. Lorsqu'un enfant le sent, il ne la trahira pas.
Les premiers mots d'un Juif à son lever, dans le Modé Ani, sont : "(...) Raba Émounatékha" "La confiance que Tu me donnes est grande". Si D.ieu nous fait confiance chaque matin à nouveau, pas de raison qu'à notre tour, nous ne la donnions pas à nos enfants.
3. Santé. Nourriture, poids, taille, pâleur, dents, plaintes répétées de douleurs doivent être pris en compte et suivis régulièrement par les parents. C’est un basique, mais à ne pas négliger. (Léhavdil, Marie Curie, le prix Nobel de Chimie, ne ratait pas un rendez-vous chez le dentiste pour ses filles. Qui peut prétendre avoir été plus occupé qu’elle ?)
4. Cohésion. Le sens de la famille est très important dans l’orientation future que l’enfant prendra et dans sa résistance aux influences extérieures. Cette cohésion familiale ne se crée pas ex nihilo. Il ne suffit pas d’avoir 9 frères et sœurs pour qu’elle existe, il faut la susciter par des expériences communes, des sorties, des jeux et des projets, un vécu “ensemble”. La famille est une force, un mur de soutien et de protection contre tous les vents extérieurs. Sachons-le.
5. Parole. La façon la plus simple et classique de communiquer avec sa progéniture : parler avec eux. S'intéresser à leur vie, à leurs copains, à leurs enseignants, à leur ressenti à l’école. Entre parenthèses, parler, ce n’est pas seulement demander : “C'était bien aujourd’hui en classe ?”, mais prendre du temps pour eux, leur poser des questions, écouter les réponses et échanger.
6. Sourire. Une maison où l’on sourit est une maison saine. Les enfants ont besoin d’une atmosphère gaie et que les membres de la famille soient des personnes heureuses, en tous cas en partie. On peut y inclure l’humour, qui a le pouvoir de réduire des gros rochers en gravier, quand on sait l’utiliser. Car l’humour ne lance pas de pique, il n’est pas dans l’ironie ou le cynisme, il n’est jamais dans l'agressivité, mais est un outil qui, bien utilisé, rafraîchit une atmosphère lourde et relie les ponts coupés, avec un clin d'œil, un mot d’esprit.
7. Respectabilité. Tout individu a besoin de dignité. C’est une denrée vitale et on doit en nourrir l’enfant. Respecter un enfant, c’est reconnaître ses beaux traits de caractère et les faire remarquer, de même qu’accepter sa personnalité et lui donner légitimité.
8. Discipline. Tout à fait indispensable à l'éducation de l’enfant. Elle est sa colonne vertébrale. Elle est la preuve qu’il a des parents solides qui peuvent lui donner de la force et lui tracer un chemin dans la vie. En tant que parents, nous devons vérifier de temps en temps si elle est assez ferme et également si elle ne l’est pas trop.
9. Pardon. C’est le mot magique qui résout beaucoup de situations, nettoie la table et fait renaître nos relations avec autrui. Il est bon de temps en temps qu’un homme s’interroge et regarde autour de lui, pour savoir à qui il devrait éventuellement demander pardon. Parfois, un enfant doit demander pardon, et les parents devront être fermes sur ce point et ne pas y renoncer. Parfois, c’est nous qui avons agi en nous méprenant sur l’enfant, et nous ne perdrons en rien notre statut de parent en nous excusant. Bien au contraire. Chez nous, est nommé roi celui qui admet ses fautes et s’en excuse (David Hamélèkh et Yéhouda).
10. Torah et Mitsvot. Le monde qui s’est affranchi de la Torah ne sait pas à quel point il a perdu un allié et une aide incommensurable dans l’éducation des enfants. Elle est l’équilibre, la vertu, la vérité, la bonté, la fermeté, donne le chemin des valeurs justes et, en plus, ordonne à l’enfant de nous respecter, comme commandement absolu. À tel point que l’ordonnance du respect des parents se trouve sur les Tables de la Loi du côté des cinq commandements entre l’homme et D.ieu. C’est dire !
Plus nous l’enseignerons à notre progéniture, plus nous en cueillerons les fruits en retour.
Tou Bichvat Saméa’h à toutes les familles d''Am Israël. Qu’elles grandissent, fleurissent, bourgeonnent et donnent des merveilleux fruits.