Yéhoudit est la dernière de la famille. Depuis sa plus tendre enfance, elle a été gâtée par tous et de tous côtés. Même après son mariage, elle est restée dans les jupes de sa mère, pratiquement dans tous les sens du terme ! À la surprise générale, lorsqu’elle accoucha de son fils aîné, elle changea du tout au tout. D’un seul coup, elle se transforma en adulte ayant confiance en elle, prenant bien soin de son enfant, presque sans avoir besoin de l’aide de sa mère.
L’accouchement est un tremplin vers une nouvelle vie, belle, longue et pleine. Il permet de se préparer en vue de la tâche qui nous attend. Les mois précédant l’accouchement ainsi que l’accouchement lui-même sont une période de préparation psychologique en vue de la transformation de la femme en mère.
Une maman doit être forte afin d’élever ses enfants de la meilleure manière qui soit : elle doit se lever la nuit, se confronter aux épreuves de l’éducation des enfants. Bien entendu, elle doit aussi savoir se confronter à des situations difficiles, comme les maladies, les difficultés dans la Parnassa, etc..
La grossesse et l’accouchement offrent la possibilité à chacune d’apprendre ce qu’est le rôle de mère qui commence son chemin et se met en place au moment des douleurs.
Compte tenu de l’utilisation fréquente de l’anesthésie péridurale au moment de l’accouchement, permettant à la femme de vivre cette expérience sans en ressentir les douleurs, le docteur Michel Odent, de France, décida de faire une expérience : injecter une dose de péridurale à des animaux !
Ainsi, quelques – chanceux - moutons reçurent cette injection au moment de leur mise à bas. Cela se passa à une rapidité étonnante. Cependant, lorsque le petit agneau nouveau-né surgit, les professeurs remarquèrent avec surprise que la femelle repoussa son bébé, refusa de l’allaiter et ne voulut avoir aucun lien avec lui !
La conclusion de cette expérience est, selon les scientifiques, que les douleurs de l’accouchement permettent d’éveiller l’instinct maternel des animaux envers leur nouveau-né.
Cette tendance peu commune apparaît dans les paroles de nos Sages et ceux-ci nous donnent un conseil pour résoudre cette difficulté. Dans la Guémara (Chabbath 128b) il est dit que si un animal repousse son nouveau-né et ne veut pas l’allaiter, on lui place un morceau de sel dans son utérus afin qu’il se souvienne de l’accouchement et que cela le rapproche de son bébé.
Bien entendu, en tant qu’êtres humains nous fonctionnons à l’aide de notre intellect et non pas selon nos pulsions ou nos instincts naturels. Néanmoins, il ne nous est pas permis d’ignorer la puissance de la nature qui fonctionne également avec nous. Nous aussi nous profitons des effets de l’accouchement et créons avec notre bébé un lien psychique et affectif très puissant.
La Guémara nous dit (Baba Métsia 38a) : « Un homme apprécie plus une mesure qui lui appartient que neuf mesures de son ami ». Cela signifie que le travail et l’effort fourni pour obtenir une chose lui permettent de ressentir pour celle-ci une attache et un intérêt beaucoup plus fort.
De même, le Rav Dessler dans son Mikhtav MéEliaou (Partie 1, La Bonté) nous explique que l’amour découle du don et non du contraire comme la majorité des gens pourraient le penser. Et voici ses paroles : « L’homme aime ce qu’il réalise. En effet, il ressent que le fruit de ses efforts est une partie de lui-même qu’il s’agisse de son enfant ou qu’il s’agisse d’une plante qu’il aurait fait pousser ou de toute autre chose même d’origine minérale comme une maison qu’il aurait construite. L’homme est intimement lié à la production de ses mains, car elle est une part de lui-même. Nos Sages nous ont appris dans Derekh Erets Zouta 82 : Si tu veux que ton ami t’apprécie, aie à cœur de lui prodiguer du bien ».
La mère investit énormément, aussi bien physiquement que psychologiquement pour le fruit de ses entrailles : durant les neuf mois que dure la grossesse, elle le porte, elle sue, elle se fatigue, elle s’affaiblit, elle vomit et par-dessus tout, au moment le plus difficile, au moment d’accoucher, elle subit des douleurs et des souffrances intenses. Tout cela, tout ce travail, lui permet de considérer son bébé comme une partie d’elle-même.
L'amour qu’elle éprouve lui procure les forces nécessaires pour continuer son rôle de mère. En effet, elle devra s’occuper, prendre soin, élever et éduquer son nouveau-né. En acceptant cette tâche, elle se promet de se lever pour lui de jour comme de nuit, de l’allaiter, de le laver et d’investir en lui toutes ses forces. Il est à elle. Il est elle. Il est sa chair. En cela, il n’existe aucune limite à son amour pour lui !