Il y a quelques semaines, j'étais en pleine prière de Min'ha avec une Kavana inhabituelle, lorsque j'entendis soudain une Bat Kol, une voix céleste, proclamer : « Message reçu. » Je me réjouis à l'idée que la combinaison de mon expression sincère de louange, de requêtes personnelles et de gratitude avait bien été agréée par le Tout-Puissant, lorsque soudain, je l'entendis à nouveau : « Message reçu.» À ce stade, je réalisai que ce n'était pas une voix céleste ; c'était le téléphone cellulaire d'un fidèle qui avait programmé une alarme pour le notifier de chaque message reçu. Je dois avouer que pendant le reste de cette Amida, je dus lutter pour vaincre mon ressentiment et ma frustration, et revenir au niveau de concentration que j'avais atteint auparavant.
Quelques jours avant cet incident, un ami m'avait fait part d'une expérience d'un enterrement tragique auquel il avait assisté. Un jeune homme était décédé et une foule était venue lui rendre un dernier hommage. Alors que la foule s'était tue, et que le rabbin allait commencer à parler, on entendit ces propos à donner des frissons : « Vous êtes bien arrivés à destination. » La personne assise à côté de mon ami commenta immédiatement : « La destination finale.» Quelqu'un avait utilisé une application GPS pour le diriger jusqu'à l'enterrement et n'avait pas mis son téléphone en mode silencieux, interrompant grossièrement le début d'un enterrement tragique.
La technologie a amélioré nos vies d'innombrables manières, mais elle a également compromis et mis au défi la fondation même de l'existence, un état de conscience et de sensibilisation dans toutes nos actions. Une étude récente a indiqué qu'en moyenne, une personne consulte son téléphone toutes les six minutes et demie. La moitié des adolescents disent être accros à leurs Smartphones. Une autre étude montre que les Smartphones nous rendent stupides et non intelligents. Ainsi, pour certaines stars comme Warren Buffet, le téléphone à clapet fait son retour.
Dans son ouvrage Ménou'hat Hanéfech, le Rav 'Haïm Friedlander écrit : « La vérité est que la Ménou'hat Hanéfech, la tranquillité d'esprit, est un attribut fondamental et critique, sur lequel s'appuient toutes les réussites dans tous les aspects de la vie…Une personne qui est dispersée, distraite et fragmentée ne peut rien réussir intégralement. »
Nous constatons la différence dans la qualité de nos conversations, interactions et expériences le Chabbath lorsque nous sommes libérés de la technologie, par rapport à celles de la semaine : toutes nos actions sont entrecoupées par des alertes, des notifications, des vibrations et des sons qui nous bombardent sans répit. Le Zohar (3,29a) dit : « Un érudit se nomme Chabbath.» Rabbi 'Haïm Friedlander explique que cela tient au fait que l'homme érudit et vertueux est capable de vivre toute la semaine avec ce sentiment de Ménou'hat Hanéfech, la tranquillité d'esprit, que Chabbath procure.
J'ai récemment fait un voyage en Israël et contrairement au passé, je n'ai délibérément pas loué de carte SIM pour mon Smartphone. En conséquence, j'avais uniquement accès au barrage habituel d'e-mails et de SMS uniquement lorsque j'étais à proximité d'une Wifi. À chaque prière lors de ce voyage, j'ai été entièrement déconnecté de la technologie et exclusivement relié à ma conversation avec Hachem. En sortie avec ma famille, je fus entièrement immergé dans l'activité ou la conversation que nous avions, et inaccessible et déconnecté de tous les autres.
Cette expérience fut enrichissante. Ma prière, mes conversations et expériences furent plus intenses et vécues plus pleinement que jamais. À mon retour, je fus déprimé à l'idée d'avoir laissé mon état de conscience et de Ménou'hat Hanéfech derrière moi. Mais je fis ensuite la réalisation suivante : il n'était pas obligatoire de les laisser derrière moi. À chaque fois que nous prenons l'avion, nous mettons notre téléphone en mode avion, ce qui désactive la capacité à recevoir des appels, des messages ou à être connecté en ligne (Il semble toutefois que l'ère de déconnexion lors d'un vol en avion soit également sur la fin). Je réalisai que le mode avion pouvait fonctionner même au sol.
Même si nous sommes incapables de passer au téléphone à clapet, ou d'éteindre notre téléphone, nous pouvons nous déconnecter de notre propre gré. Lorsque nous entrons à la synagogue pour prier, ou que nous sommes engagés dans une conversation où nous voulons être totalement présents, nous pouvons prendre l'habitude de passer en mode avion. Nous pouvons bénéficier du Chabbath pendant la semaine et vivre cette Ménou'hat Hanéfech en ajustant un paramètre lorsque nous voulons vivre pleinement ce que nous faisons.
Le 'Hovot Halévavot écrit qu'il connaissait un homme vertueux qui avait l'usage de réciter cette prière : Hamakom Yatsiléni Mipizour Hanéfech : puisse D.ieu m'épargner l'éparpillement de l'âme. Prions afin de maximiser notre usage de la technologie sans éparpiller nos âmes et conserver un état de conscience dans un monde abrutissant.
Rabbi Efrem Goldberg