Le décès du Rav Ouri Zohar a relancé le débat public au sujet du mouvement de Téchouva actuel. Cette vague déferlante de retour aux sources ne connaît pas de précédent dans l’Histoire depuis l’époque du prophète ‘Ezra il y a 2500 ans, et pourtant on trouve encore parmi les médias laïques israéliens de ceux qui s’entêtent à chercher les raisons psychologiques qui auraient amené l’ancien comédien-réalisateur Ouri Zohar à faire des choix si « extrêmes ». Il est vrai que la Téchouva de Rabbi Ouri n’a laissé indifférent aucun Israélien et a entrainé dans son sillon des milliers de Ba’alé Téchouva.
Le fait de vouloir trouver des motifs intéressés ou des problèmes à des centaines de milliers de personnes venant d’origines, de milieux sociaux et d’âges si différents est absurde. Par contre, il est bien plus facile et cohérent de chercher à expliquer la raison pour laquelle on refuse de donner une légitimité à ce retour : il semble bien que le Rav Ouri Zohar (ainsi que bien d’autres Ba’alé Téchouva), par son courage et son exemple, rend redevable tout Juif qui fait la sourde oreille à son patrimoine. Car si lui, qui se trouvait au sommet de la réussite et du succès, qui ne manquait de rien matériellement et qui ne pouvait que “perdre” en se rapprochant du judaïsme, a osé et a réussi à revenir, à plus forte raison chacun d’entre nous le peut.
La difficulté de faire Téchouva à notre époque ne se trouve pas au niveau de la croyance. En effet, toutes les idéologies qui ont éloigné le peuple juif de ses racines se sont disloquées, et la science moderne, quant à elle, tend vers la Émouna d’un Créateur unique. D’ailleurs, Rabbi Ouri a raconté qu’il n’a été convaincu de la véracité de la Torah que grâce à une seule et unique discussion qu’il avait eue avec un Rav de Jérusalem (Rav Zylberman), alors qu’il était jusque-là athée. L’obstacle principal aujourd’hui est le passage d’une vie libre, sans comptes à rendre à qui que ce soit, à un engagement quotidien dans la pratique des Mitsvot. À ce niveau-là, on ne peut qu’admirer un personnage comme celui du Rav Ouri Zohar qui a réussi l’impossible, non sans peine comme il avait l’habitude de le raconter.
Nos Sages (Baba Métsi’a 84a) nous racontent les débuts d’un grand Rav, Rech Lakich qui, dans sa jeunesse, s’était éloigné de la pratique des Mitsvot, étant même devenu un chef de brigands. Un jour, il aperçut au milieu du Jourdain Rabbi Yo’hanan qui prenait son bain. Ce dernier était un homme imberbe et très beau et, le prenant pour une femme, Rech Lakich s’élança d’un vif bon auprès de lui. Rabbi Yo’hanan, impressionné par sa vigueur, lui dit alors : “Mets tes forces dans la Torah, et je t’offrirai en épouse ma sœur qui est aussi belle que moi”. Il acceptera et deviendra un des plus grands Sages, dont les enseignements se trouvent dans tous les traités du Talmud.
On ne peut s’empêcher d’établir une comparaison entre le Rav Ouri Zohar et Rech Lakich car tout comme ce grand maître du Talmud, Rav Ouri va mettre ses capacités (son intelligence, son talent, son humour) et… son Yétser Hara’ dans la Torah, les utilisant à la fois pour l’étude mais aussi pour captiver un public éloigné des sources du judaïsme.
Le Rav Ouri Zohar marquera l’histoire juive contemporaine comme l’un des pionniers de la Téchouva en Israël, ouvrant la porte à tous ceux qui ne croyaient pas pouvoir ou n’osaient pas faire le pas. Depuis, le mouvement continue à grandir, jusqu’au jour, espérons, où nous parviendrons à une génération entièrement méritante.