Lorsqu’Hachem demande à Moché d’aller délivrer le peuple juif, Moché Lui dit qu’il doit d’abord demander l’autorisation à Yitro son beau-père, car il l’a accueilli quand il ne savait pas où aller. Nous voyons jusqu’où va l’obligation de reconnaissance; si Yitro avait refusé à Moché de partir, Moché serait resté auprès de lui et le peuple juif serait peut être toujours esclave en Egypte !!! (On peut ainsi expliquer pourquoi la Paracha du don de la Torah porte le nom de Yitro car le but de la sortie d’Egypte qui était de recevoir la Torah, n’aurait pas été atteint si Yitro n’avait pas donné à Moché l’autorisation de partir !) Ce sentiment de Hacarat Hatov est exigé même des goyim.
Reconnaissance : apprendre la midda appelée "Hakarat Hatov" (2/5)
Le Ramban explique que la Torah écarte définitivement les 2 peuples d’Amon et Moav, en leur interdisant de se marier avec une femme juive, car tous les 2 étaient redevables envers Avraham qui avait sauvé leur ancêtre Loth ainsi que ses filles de la destruction de Sodome. Or, ceux-ci ne sont pas venus au devant du peuple juif lors de la sortie d’Egypte en leur amenant du pain et de l’eau. Ils avaient donc l’obligation d’être reconnaissants envers les descendants d’Avraham et de leur faire du bien. Nous voyons ici que la Hacarat Hatov est une mida essentielle, qu’elle est même exigée des goyim plusieurs générations après et celui qui ne la possède pas, ne peut pas faire partie du peuple juif.
On peut cependant poser deux questions : 1) En quoi étaient nécessaires l’eau et le pain au peuple juif dans le désert alors qu’ils avaient la manne et le puits de Myriam qui les accompagnaient ? 2) Quelle est donc la faute commise par ces peuples ? En fait, la Hacarat Hatov doit s’exprimer même envers une personne qui n’a pas besoin du bien qu’on va lui faire en remerciement de ce qu’elle a fait. En vérité, les Mitsvot sont faites avant tout pour celui qui les fait, pour le transformer. La personne va implanter chez elle cette mida indépendamment du fait que l’autre en ait besoin ou pas. Nous constatons également que la Torah exige que nous ayons cette mida même envers un goy comme on le voit au sujet de Yossef qui laissa ses biens aux prêtres égyptiens en remerciement de ce qu’ils étaient intervenus en sa faveur au moment de l’histoire avec la femme de Poutiphar pour le sauver de la mort.
La Torah va encore plus loin et nous oblige à nous comporter ainsi même envers celui qui nous a fait du mal comme il est dit : « N’aie pas l’Egyptien en horreur », car même si l’Egyptien a jeté les enfants dans le Nil, il a recueilli les Bné Israël au moment de la famine et cette obligation de reconnaissance doit se perpétuer plusieurs générations après. De même, quand Hachem demanda à Moché d’aller venger le peuple juif vis-à-vis de Midiane, Moché envoya Pin’has à sa place car la Hacarat Hatov qu’il avait envers eux, de l’avoir recueilli quand il s’était enfui d’Egypte, l’empêchait de mener cette guerre.
La Torah nous enseigne aussi qu’Hachem est reconnaissant envers l’homme. Le Ramban explique que l’énumération des Nessiim, des princes de tribu, qui est faite dans la Parachat Nasso lors de l’offrande des sacrifices, était une marque de reconnaissance d’Hachem envers ces hommes importants et c’est pourquoi, Il les a cités chacun séparément. Pourquoi la Torah attache-t-elle tant d’importance à cette mida et pourquoi éloigne-t-elle une personne qui est ingrate ? En fait, celui qui est ingrat envers son prochain, sera ingrat envers Hachem et ne reconnaîtra pas le bien qu’Il lui fait. Celui qui est ingrat envers Hachem, renie en vérité Hachem.
Les ‘Hakhamim ont associé l’ingratitude et être renégat car l’un dépend de l’autre. C’est une attitude générale de l’homme que nous enseignent nos sages : de la même façon avec laquelle on se comporte envers son prochain, ainsi se comporte-t-on envers Hachem. Nous n’avons aucun dédoublement de la personne, notre attitude est toujours la même. Il est écrit dans Isaïe (1, 3) : « Un bœuf connaît son possesseur, un âne, la crèche de son maître, Israël ne connaît rien. » Pourquoi reproche-t-on à Israël de ne pas être comme l’âne et le bœuf ? Eux, c’est dans leur nature et ils n’ont pas le choix de se comporter autrement à la différence de l’homme qui a le libre arbitre !? En vérité, l’homme a été créé comme l’animal; quand on veut tester un médicament, on le fait d’abord sur un animal car il a la même « structure » que l’homme.
Il est donc dans la nature de l’homme, comme dans la nature de l’animal de posséder la Hacarat Hatov. Aussi, si on exige déjà de l’homme d’aller contre sa nature pour faire ce qui est bien, à plus forte raison, sera-t-on exigeant envers lui quand il va contre sa nature de faire le bien pour faire le mal et qu’il ne ressent pas de reconnaissance envers Hachem. C’est pourquoi, quand quelqu’un faisait une avéra, on lui donnait des coups avec une lanière à base de bœuf et d’âne car ainsi, on lui reprochait de ne pas être reconnaissant envers son Créateur. La Guémara Bérakhot (35a) demande d’où sait-on qu’on doit faire une bénédiction avant de manger et répond que c’est logique. Rachi explique que puisqu’il profite de quelque chose, il doit remercier Celui qui a créé tout cela. La Guémara Sanhédrin raconte qu’Hachem a voulu faire du roi ‘Hizkiaou le Machia’h.
La midat hadin, la rigueur, a dit : « si déjà David qui a fait pour Toi beaucoup de chants, Tu ne l’as pas fait Machia’h, à plus forte raison ‘Hizkiaou, qui n’a pas chanté pour Toi malgré tous les miracles que Tu lui as faits, ne doit pas être le Machia’h ! Même un tel Tsadik qui a les capacités d’être Machia’h, ne l’a pas été, car il n’a pas su exprimer la reconnaissance envers Hachem comme il aurait fallu.