Il est étonnant de constater que le calendrier juif débute par les Dix jours de pénitence. Normalement, la Téchouva vient réparer une faute et ne représente pas un programme de vie ; on se serait donc attendu à voir ces jours placés à la fin du mois d’Eloul, avant Roch Hachana. À titre de comparaison - si l’on peut se le permettre -, il serait inconcevable de commencer une nouvelle année scolaire par les examens de rattrapage pour ceux qui ont raté leur épreuve ! Or l’année juive commence justement sous le signe de la Téchouva, avec Yom Kippour qui en constituera le summum, dans la prière et le jeûne.
- Le Rav Wolbe (‘Alé Chour II p. 435) écrit que la notion de Téchouva ne peut être dissociée de sa signification étymologique qui est le retour. Or, tout retour fait allusion à un lieu de départ duquel on s’est éloigné ; dans notre contexte il s’agit de la proximité avec D.ieu. Faire Téchouva revient donc à reconnaître l’Éternel comme notre Créateur et notre Maître. Cette démarche est en fait fondamentale tout le long de l’année, afin de savoir vers où nos actions doivent converger. On souhaite tous être en bonne santé et avoir une bonne subsistance, mais en réalité, ces besoins sont secondaires par rapport à la Émouna. À titre de comparaison, à quoi servirait une voiture neuve dont on a fait le plein de carburant si on ne sait pas où aller ? C’est pourquoi le vecteur de toute réalisation pour une nouvelle année doit être dirigé dans la bonne direction et il se trouve que la Téchouva remplit cette fonction indispensable.
- De plus, l’homme dans sa conception est attiré par la matière et la faute. Il lui faut beaucoup de courage et de détermination pour ne pas se laisser entraîner vers le mal. C’est pourquoi la Téchouva se doit de l’accompagner tous les jours de l’année afin de l’aider à se réaliser. Nos Sages (Pessa’him 56a) nous rapportent que la Téchouva fut créée avant même la Création du monde, car elle lui est indispensable.
- Plus que cela : pour bien évoluer, il est nécessaire de connaître ses défauts et ses tendances afin de les canaliser vers les voies du judaïsme. À titre d’exemple, l’un des reproches qui revient plusieurs fois dans le texte biblique au sujet des Bné Israël est celui d’un peuple à la nuque raide. D’un autre côté, c’est grâce à ce “défaut” que ceux-ci ont pu maintenir leur valeurs ancestrales dans l’exil et ses affres. De même, la passion et le désir peuvent être utilisés pour le bien, comme pour connaître et approfondir nos textes saints. Mais celui qui pense pouvoir accomplir la Torah en faisant fi de sa nature risque de se voir freiner dans son évolution, car il aura négligé ses besoins élémentaires qui réclament d’être pris en compte. La Téchouva n’est donc pas seulement une situation a posteriori (si l’on a fauté), mais d’a priori, dans la mesure où elle permet d’accomplir la volonté divine selon son Moi authentique.
- On peut ajouter aussi l’idée que le peuple hébreu est Un et ne peut se déresponsabiliser de l’une de ses composantes. Il est parmi nous de ceux qui n’ont conservé du Judaïsme qu’une toute petite attache : celle de la Né’ila de Yom Kippour, durant laquelle on ferme son magasin pour venir entendre le son du Chofar qui marque la clôture de ce grand jour. Ces “Juifs de Kippour” doivent être en tête de nos préoccupations en ce début d’année, et la Téchouva en représente le symbole.
- Enfin rappelons que la délivrance finale ne nous sera accordée que grâce à la Téchouva. Sans aucun doute, l’on peut dans notre époque se présenter fièrement devant D.ieu en ces jours de fête, alors que des myriades de Ba’alé Téchouva fleurissent partout dans le monde.
En conclusion, les Dix jours de pénitence ne viennent pas uniquement constituer une réparation du passé mais aussi et surtout, ils viennent nous éclairer sur les objectifs fondamentaux à atteindre à l’aube d’une nouvelle année !
‘Hatima Tova à tout le peuple d’Israël !