Je fus invité un jour à effectuer deux Brit-Mila organisées en fin d’après-midi, et chacune d’entre elles avait lieu à un autre bout de la ville de Natanya. C’était au mois d’Août, et le coucher du soleil avait lieu à 19h15.
La première Brit-Mila au nord de la ville se déroula très en retard et s’acheva seulement tout proche des 19 heures. Dès la fin, je courus rapidement avec mon assistant vers la voiture, afin d’arriver avant le coucher du soleil à la seconde circoncision qui devait se dérouler à la synagogue Eliyahou Hanavi dans le quartier de Kiriat Nordau dans la partie sud de la ville. En effet, il est interdit d’effectuer une Brit-Mila après le coucher du soleil et il aurait donc fallu la repousser au lendemain matin. Malheureusement, la voiture tomba en panne et il fut impossible de l’utiliser.
Comme nous étions juste à côté de la route de la mer - un axe de circulation principal et rapide en direction du sud -, je fis un acte désespéré, et, sous les yeux ébahis de mon assistant, j’enjambai le parapet de sécurité et me mis en travers de la route en bloquant avec mon corps la circulation pour forcer le conducteur à s’arrêter.
Une splendide voiture américaine arriva en face et freina sans le vouloir, le chauffeur ouvrit la fenêtre et commença à me lancer une série d’injures, mais je ne fis pas attention à ses propos et, sous les yeux stupéfaits du conducteur, j’ouvris la porte à ses côtés et montai à l’avant, tout en indiquant à mon assistant de monter à l’arrière. Avec émotion et précipitation, j’expliquai au chauffeur encore sous le choc que j’étais obligé d’arriver en quelques minutes à la synagogue Eliyahou Hanavi pour faire entrer un bébé juif dans l’alliance d’Avraham Avinou.
Le chauffeur, qui n’avait pas l’apparence d’un homme respectueux de la Torah et des Mitsvot, comprit de quoi il s’agissait et se mit à rouler à toute allure, comme un fou. Je regardai les aiguilles de la montre qui avançaient cruellement ainsi que le compteur de la vitesse qui indiquait une vitesse effarante, je fermai les yeux et récitai des Téhilim. 8 minutes après être monté dans la voiture, le chauffeur m’annonça : « Rav, nous sommes arrivés ».
Il restait quatre minutes et demie avant le coucher du soleil.
Je remerciai le chauffeur et me frayai un chemin rapidement parmi la foule hargneuse et en colère qui ne ménagea pas ses critiques contre ma conduite et mon manque de responsabilité. Sans répondre ni réagir aux propos dirigés contre moi, j’accomplis immédiatement la Mitsva de la Brit-mila et, grâce à une grande aide Divine, nous finîmes la circoncision une minute et demie avant le coucher du soleil.
Ma joie atteignit des sommets pour cette grande aide céleste dont j’avais bénéficié, et, mû par la joie de la Mitsva, je multipliai la récitation des Mizmorim. Je présentai ensuite mes excuses aux parents et aux invités pour le retard, et je restai pour le repas de la circoncision.
En plein repas, j’aperçus l’homme qui m’avait conduit assis à l’une des tables sur le côté. Je l’abordai, le remerciai à nouveau pour le grand ‘Hessed qu’il m’avait fait, et lui demandai pourquoi il s’attardait. Il me répondit qu’il m’attendait jusqu’à la fin du repas, souhaitant me raccompagner jusque chez moi. Je me sentis mal à l’aise et lui demandai instamment de ne pas m’attendre. Or, mon insistance ne servit à rien, il resta jusqu’à la fin du repas.
En chemin, il me raconta qu’il avait 45 ans et qu’il n’avait pas encore eu le privilège de fonder un foyer. Ayant constaté mon grand dévouement pour accomplir la Mitsva de la Brit-Mila en temps voulu, il me demanda de le bénir pour qu’il trouve rapidement sa femme.
Je me conformais joyeusement à sa demande, posai ma main sur sa tête, et le bénis de tout mon cœur : grâce à la grande Mitsva effectuée par son mérite, et grâce au ‘Hessed qu’il m’avait fait ce jour-là, puisse-t-il trouver rapidement son âme sœur, et mériter d’avoir rapidement des enfants.
Un peu plus d’un an plus tard, mon téléphone sonna et mon interlocuteur s’exprima : « Rav, c’est Chimon, le chauffeur qui vous a conduit en voiture à la synagogue Eliyahou Hanavi il y a un an, votre bénédiction s’est accomplie intégralement : je vous invite à servir de Mohel pour la Brit-Mila de notre fils aîné. »
Ma joie ne connut plus de bornes, je découvris alors l’immense pouvoir contenu dans les paroles de chaque être humain. Si l’homme connaissait le pouvoir de sa parole, il se montrerait extrêmement prudent sur chaque mot énoncé, et prononcerait une abondance de bénédictions, en particulier dans le cas d’une joie de Mitsva.