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Torah écrite (pentateuque) » Genèse (Berechit)

Chapitre 33

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33,1
Jacob, levant les yeux, aperçut Ésaü qui venait, accompagné de quatre cents hommes. II répartit les enfants entre Léa, Rachel et les deux servantes.
33,2
Il plaça les servantes avec leurs enfants au premier rang, Léa et ses enfants derrière, Rachel et Joseph les derniers.
Et Léa et ses enfants les derniers

Au plus chéri le dernier rang (Beréchith raba 78, 8)

33,3
Pour lui, il prit les devants et se prosterna contre terre, sept fois, avant d'aborder son frère.
Il passa devant eux

Il s’est dit : Si cet impie vient pour se battre, il se battra avec moi d’abord (ibid.)

33,4
Ésaü courut à sa rencontre, l'embrassa, se jeta à son cou et le baisa; et ils pleurèrent.
Il l’embrassa

Il a été pris de pitié en le voyant se prosterner tant de fois

Il le baisa

Chacune des lettres du mot wayichaqéhou (« il le baisa ») est surmontée d’un point, ce qui donne lieu à une discussion dans la barayetha de Sifri (Beha’alothekha 69). Pour certains, ces points signifient qu’il ne l’a pas embrassé de tout son cœur. Rabi Chim‘on bar Yo‘haï a enseigné : Il est de principe, ainsi qu’on nous l’enseigne, que ‘Essaw est l’ennemi de Ya‘aqov, mais à ce moment-là, sa pitié l’a emporté et il l’a embrassé de tout son cœur

33,5
En levant les yeux, il vit les femmes et les enfants et dit: "Que te sont ceux là?" II répondit: "Ce sont les enfants dont Dieu a gratifié ton serviteur."
Que te sont ceux-là

Qui sont ceux-ci pour être à toi, [sont-ils tes enfants ou tes serviteurs] 

33,6
Les servantes s'approchèrent ainsi que leurs enfants et se prosternèrent.
33,7
Léa aussi s'approcha avec ses enfants et ils se prosternèrent; puis, Joseph s'approcha avec Rachel et ils seprosternèrent.
S’approcha Yossef

Toutes les autres mères se sont approchées avant leurs enfants, tandis que pour Ra‘hel, c’est Yossef qui l’a précédée. Il s’était dit : Ma mère est d’une grande beauté, et il ne faut pas que ce scélérat puisse jeter ses regards sur elle. Je vais donc me placer devant elle et l’empêcher de la regarder. C’est en récompense de cette attitude que Yossef a reçu la bénédiction (infra 49, 22) contenant les mots ‘alé ‘ayin (« sur l’œil ») (Beréchith raba 78, 10)

33,8
II reprit: "Qu'est ce que toute cette troupe, venant de ta part, que j'ai rencontrée?" II répondit: "Pour obtenir la bienveillance de mon seigneur."
Qu’est-ce pour toi que tout ce camp

Qu’est-ce que tout ce camp que j’ai rencontré, qui est le tien ? C’est-à-dire : que comptes-tu en faire ? D’après le sens simple du verset, cette question s’applique à ceux qui transportaient les cadeaux. Explication du midrach : ‘Essaw et ses hommes ont été harcelés par des troupes d’anges qui leur demandaient : « A qui appartenez-vous ? » Ils répondaient : « A ‘Essaw ! » Les anges disaient alors : « Frappez ! Frappez ! » Les hommes de ‘Essaw objectaient alors : « Laissez-le ! C’est le fils de Yits‘haq ! » Mais les anges n’en tenaient pas compte. « Mais c’est le petit-fils d’Avraham ! » Ils continuaient de rester insensibles à ces protestations. « Mais c’est le frère de Ya‘aqov ! » – « Dans ce cas, ont-ils dit, vous êtes des nôtres ! 

33,9
Ésaü dit: "J'en ai amplement; mon frère, garde ce que tu as."
Que soit à toi ce qui est à toi

C’est ici que ‘Essaw a reconnu le droit de Yits‘haq aux bénédictions (Beréchith raba 78, 11)

33,10
Jacob répondit: "Oh non! Si toutefois j'ai trouvé grâce à tes yeux, tu accepteras cet hommage de ma main; puisque aussi bien j'ai regardé ta face comme on regarde la face d'un puissant et que tu m'as agréé.
Oh non ! si

Ne me dis pas cela, je te prie

Si j’ai trouvé grâce à tes yeux

Il vaut la peine et il convient que tu acceptes mon cadeau, parce que j’ai vu ton visage. C’est pour moi comme si j’avais vu la face d’un ange, puisque j’ai vu ton prince céleste. Et aussi parce que tu as consenti à me pardonner le tort que je t’ai causé. Mais pourquoi lui dit-il qu’il a vu l’ange ? Pour faire peur à ‘Essaw et pour qu’il se dise : « Il a vu des anges, et il en a réchappé ! Je ne pourrai donc rien contre lui ! » (Sota 41b)

Et que tu m’as agréé

Tu t’es réconcilié avec moi. Le mot ratson (« faveur ») a toujours le sens de « douceur » (en français : « apaisement »), comme dans : « ce ne serait pas pour vous le moyen de vous attirer la faveur (leratson) (de Hachem) » (Wayiqra 22, 20), les sacrifices ayant pour fonction d’apaiser et de concilier. Comme aussi dans : « les lèvres du juste connaissent l’apaisement (ratson) » (Michlei 10, 32), le juste étant celui qui sait apaiser et réconcilier

33,11
Reçois donc le présent que de ma part on t’a offert, puisque Dieu m’a favorisé et que je possède suffisamment." Sur ses instances Ésaü accepta.
Ma bénédiction

Mon cadeau, à savoir un cadeau offert à titre de salutation lorsqu’on est reçu en audience par quelqu’un après un long laps de temps. Toutes les fois que le mot berakha (« bénédiction ») est employé en liaison avec une audience, il a le sens de « salutation » (en français médiéval : « saluder »), comme dans : « Ya‘aqov bénit Pharaon » (infra 47, 7), « faites avec moi une bénédiction » (II Melakhim 18, 31), à propos de San‘hériv, « pour le saluer et le bénir » (II Chemouel 8, 10), à propos de To’i, roi de ‘Hamath. Ici aussi, le mot birkhathi se dit en français : « mon salut », [ce salut étant représenté par le cadeau offert]

Qu’on t’a apportée

Sans que tu te sois donné la moindre peine. C’est moi qui ai fait l’effort de te l’amener jusqu’à ce qu’elle parvienne entre tes mains (Beréchith raba 78, 12)

Eloqim m’a favorisé (‘hannani)

Le premier noun de ‘hannani porte un daguéch, étant donné qu’il remplace deux noun et qu’il aurait fallu dire : ‘hanenani. Le verbe ‘hanon (« favoriser ») contient en effet deux noun dans son radical, de sorte qu’il en aurait fallu un troisième pour marquer le complément objet de la première personne du singulier. Il en va de même de ‘assani (« il m’a fait ») (Yecha’ya 29, 16), ou de zevadani (« Eloqim “m’a accordé” une bonne part ») (supra 30, 20)

Et que j’ai tout

Tout ce dont j’ai besoin... Tandis que ‘Essaw a proclamé orgueilleusement : « J’ai beaucoup ! » (verset 9), beaucoup plus que ce dont j’ai besoin

33,12
Il dit: "Partons et marchons ensemble; je me conformerai à ton pas."
Partons et marchons

Nis’a (« partons ») est un impératif, comme chim’a (« écoute »), équivalent de chema’, ou chil‘ha (« envoie »), équivalent de chela‘h. De la même manière, nis’a équivaut à nesa’, la lettre noun appartenant au radical du mot. Le Targoum Onqelos traduit par : « mets-toi en marche et pars », ‘Essaw disant à Ya‘aqov : « Allons-nous en d’ici et partons ! 

Je marcherai à ton côté

Du même pas que toi. Je te donnerai ce témoignage de bonté, en restant plus longtemps en route et en marchant aussi lentement que cela te conviendra. C’est ce que veut dire « à ton côté » : du même pas que toi

33,13
Il lui répondit: "Mon seigneur sait que ces enfants sont délicats, que ce menu et ce gros bétail qui allaitent exigent mes soins; si on les surmène un seul jour, tout le jeune bétail périra.
Qui allaitent

Ces brebis et ces vaches qui allaitent, il faut que je les fasse marcher lentement

Le mot ‘aloth (« qui allaitent »)

Le mot ‘aloth (« qui allaitent », « qui élèvent leurs petits ») est de la même racine que ‘olél (« enfant qui tète ») (Eikha 2, 11), que ‘oul (« jeune en années ») (Yecha’ya 65, 20), ou que ‘aloth (« deux vaches “qui allaitent” ») (I Chemouel 6, 7). En français médiéval : « enfantées »

Si on les pousse un seul jour

En les fatiguant à marcher trop vite, « tout le jeune bétail mourra »

Si on les pousse (oudefaqoum)

De la même manière qu'il est écrit : "La voix de mon amant frappe" (Cantique des Cantiques 5, 2) - frappe à la porte

33,14
Que mon seigneur veuille passer devant son serviteur; moi, je cheminerai à ma commodité, selon le pas de la suite qui m'accompagne et selon le pas des enfants, jusqu'à ce que je rejoigne mon seigneur à Séir."
Que mon seigneur passe

Ne prolonge pas la durée de ton parcours, marche comme à ton habitude, même si tu t’éloignes de moi

Je conduirai

Le mot ethnahala (« je conduirai ») équivaut à ethnael, le hé final étant un ajout, comme dans : érda (« je vais descendre ») (supra 18, 21), èchme’a (« je vais écouter ») (Tehilim 85, 9)

Lentement (leiti)

A ma lenteur, avec une idée de calme, comme dans : « qui coulent lentement (leat) » (Yecha’ya 8, 6), « agissez doucement (leat) envers le jeune homme » (II Chemouel 18, 5). Le lamèd qui figure en tête du mot appartient à la racine et n’est pas un préfixe. Le sens est : je conduirai à mon pas lent

Selon le pas du troupeau

Selon ce qu’exige la marche du troupeau que je suis chargé de conduire

Et selon le pas des enfants

Selon leurs pieds [c’est-à-dire leur vitesse], en fonction de leur aptitude à marcher

Jusqu’à ce que j’arrive chez mon seigneur à Sé’ir

Il parle ici d’un trajet plus long que celui qu’il avait effectivement l’intention de faire, puisqu’il ne comptait aller que jusqu’à Soukoth (‘Avoda Zara 25b). Il s’est dit : « S’il entre dans ses intentions de me faire du mal, qu’il attende jusqu’à ce que j’arrive chez lui ! » Et il n’y est pas allé. Mais quand ira-t-il, [étant donné qu’il est inconcevable qu’il ait pu proférer un mensonge] ? A l’époque du Messie (Beréchith raba 78, 14), ainsi qu’il est écrit : « des libérateurs monteront sur la montagne de Tsion, pour se faire les justiciers du mont de ‘Essaw [Sé‘ir] » (‘Ovadya 1, 21). Il existe à ce sujet de nombreux midrachim

33,15
Ésaü dit: "Je veux alors te faire escorter par une partie de mes hommes." II répondit: "A quoi bon? Je voudrais trouver grâce aux yeux de mon seigneur!"
Il dit : Pourquoi cela ?

Pourquoi tiens-tu à me rendre ce service, dont je n’ai pas besoin 

Je voudrais trouver grâce aux yeux de mon seigneur

Ne me donne maintenant aucune récompense 

33,16
Ce jour même, Ésaü reprit le chemin de Séir.
‘Essaw reprit ce jour-là même son chemin

Seul ‘Essaw est retourné à Sé’ir, tandis que les quatre cents hommes qui l’accompagnaient se sont détachés de lui l’un après l’autre (Beréchith raba 78, 15). Et quand le Saint béni soit-Il les en a-t-Il récompensés ? A l’époque de Dawid, ainsi qu’il est écrit, [à propos d’un combat mené par Dawid contre les Amalécites, descendants de ‘Essaw] (I Chemouel 30, 17) : « Aucun n’en réchappa, sauf les quatre cents hommes qui allaient à dos de chameau » (Beréchith raba 78)

33,17
Quant à Jacob, il se dirigea vers Soukkoth; il s'y bâtit une demeure et pour son bétail il fit des enclos: c'est pourquoi l'on appela cet endroit Soukkoth.
Il s’y bâtit une maison

Il y a demeuré pendant dix-huit mois : un été, un hiver et un été. Le mot soukoth (« cabanes ») désigne un séjour d’été, [époque où le bétail a besoin de cabanes], le mot bayith (« maison ») désigne un séjour d’hiver, et le doublement du mot soukoth désigne un second séjour d’été (Meguila 17a, Beréchith raba 78, 16)

33,18
Jacob arriva ensuite à Salem, ville de Sichem, dans le pays de Canaan, à son retour du territoire d’Aram; et il se fixa à l’entrée de cette ville.
Complet

Complet dans son corps, car guéri de sa luxation. Complet dans sa fortune : le cadeau fastueux fait à son frère ne l’ayant fait manquer de rien [étant donné le développement prolifique de son bétail (voir Rachi supra 30, 43]. Complet dans sa Tora : son séjour chez Lavan ne lui en ayant rien fait oublier (Chabath 33b, Beréchith raba 79, 5)

La ville de Chekhem

Comme s’il avait été écrit : « “A” la ville de Chekhem ». De même : « jusqu’à leur arrivée à Beith-Lè’hem » (Routh 1, 16), [où la préposition « à » est sous-entendue]

Venant de Padan Aram

Comme si l’on disait : Un tel est sorti des mâchoires des lions et est revenu intact. Ici aussi, il est revenu intact de Padan Aram, ainsi que de Lavan et de ‘Essaw qui l’avaient assailli pendant son voyage

33,19
Il acquit la portion de terrain ou il établit sa tente, de la main des enfants de Hamor, père de Sichem pour cent kesita.
Qessita

La qessita équivaut à la ma‘a. Rabi ‘Aqiva a enseigné : Quand je suis allé dans les villes de la mer, on y appelait qessita ce que nous appelons une ma‘a (Roch haChana 26a). Le Targoum Onqelos le traduit par ‘hourfan, à savoir de bonnes pièces, valables en tous lieux. C’est l’équivalent de : « en monnaie courante chez le marchand » (supra 23, 16)

33,20
Il y érigea un autel qu’il dénomma: "le Seigneur est le Dieu d’Israël."
Qu’il appela : « Qél est Eloqim d’Israël »

Non pas que l’autel ait été appelé « Eloqim d’Israël », mais étant donné que le Saint béni soit-Il avait été avec lui et l’avait sauvé, il a rappelé, en donnant ce nom à l’autel, le miracle dont il avait bénéficié, de manière que l’on proclame la louange de Dieu chaque fois que l’on prononcera le nom de cet autel. C’est-à-dire : Lui qui est Dieu, Lui le Saint béni soit-Il, Il est Dieu pour moi qui m’appelle Israël. Il en est de même pour Mochè : « Mochè érigea un autel. Et il appela son nom : “Hachem est ma bannière” » (Chemoth 17, 15). Non pas que l’autel ait été appelé : « Hachem », mais c’est pour rappeler le miracle qu’il a donné ce nom à l’autel, afin de proclamer la louange du Saint béni soit-Il : « Hachem, c’est Lui qui est ma bannière ! » Le midrach explique que c’est le Saint béni soit-Il qui a donné à Ya‘aqov le nom de él (« le puissant »), [le verset pouvant se traduire par : « le Dieu d’Israël l’appela (Ya‘aqov) él »] (Meguila 18a). Les paroles de la Tora, que l’on peut comparer (Chabath 88b) au « marteau qui brise la roche » (Yirmeya 23, 29), sont susceptibles de maintes interprétations. Quant à moi, je ne suis venu que pour fixer le sens littéral du texte

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