« Il avait coutume de dire : "L'abondance de viande entraîne l'abondance de vermine ; l'abondance de biens multiplie les soucis. L'abondance d'épouses entraîne la profusion de sortilèges ; l'abondance de servantes entraîne la profusion d'impudicité ; l'abondance de domestiques entraîne l'abondance de vol ; mais plus la Torah est présente, plus il y a de vie. Plus il y a d'étude assidue (de la Torah), plus il y a de sagesse. Plus on recueille d'avis, plus on accroît l'intelligence. Plus on fait la Tsédaka, plus on accroît la paix…" »

QUESTIONS

  1. Pourquoi Hillel a-t-il choisi ces domaines en particulier – il y aurait bien d'autres exemples, où une quantité exagérée de quelque chose est négatif ?
  2. Y a-t-il une progression dans les exemples cités par Hillel ?
  3. Y a-t-il un dénominateur commun entre les sections négatives et positives ?

Dans cette Michna, Hillel cite cinq domaines dans lesquels si on en possède trop, cela a des effets négatifs, et cinq choses pour lesquelles il n'y a pas de limite supérieure, et plus on en a, mieux c'est. Les domaines couverts dans le premier groupe sont la nourriture, les biens, les épouses, les servantes et les esclaves en excès. Les domaines évoqués dans le second groupe sont la Torah, la Yéchiva (qui doit être défini), les conseils, la compréhension et la charité.

Avant d'analyser chaque groupe séparément, il est instructif de discuter du dénominateur commun entre les objets de chaque groupe. D'un point de vue général, les cinq premières catégories incluent des plaisirs ou activités physiques, tandis que les cinq dernières catégories sont essentiellement des activités spirituelles.

Hillel nous enseigne qu'il y a une limite à la quantité de jouissance qu'un homme peut tirer des divers plaisirs ou activités physiques. Et dans chaque cas, une fois que la personne a atteint un certain niveau, en consommer une plus grande quantité entraine généralement un déclin dans le bénéfice de cette chose. En effet, le monde physique est limité et fini, et en conséquence, ses bénéfices sont également limités et finis.

En revanche, dans la sphère spirituelle, le concept d'un « excès » de spiritualité n'existe pas. Plus un homme étudie la Torah, par exemple, plus il va en bénéficier. La raison sous-jacente s'explique du fait que le monde est illimité, et de ce fait, il n'y a pas de limite à ses bénéfices.

Il semble y avoir également une gradation dans l'ordre des plaisirs dans le premier groupe.[1] À partir de la naissance, l'être humain a une Taava, un désir de manger et de boire. Lorsqu'il grandit, il développe une Taavat Mamone, un désir d'argent et de biens. À un stade ultérieur, il a des désirs physiques et désire épouser une femme, et lorsqu'il entame la dernière partie de sa vie, il souhaite que des serviteurs s'occupent de lui.

Il est important de remarquer que Hillel n'affirme pas que profiter de ces choses-là est destructeur, elles peuvent être appropriées dans une mesure adaptée. Or, le problème se pose lorsque la personne désire ces choses-là en quantité excessive, elle atteindra un point où elles lui feront plus de mal que de bien.

Il semblerait que les raisons qui motivent une personne jouent un rôle décisif pour déterminer si elle se concentre excessivement sur les plaisirs physiques énumérés par Hillel. Si une personne veut profiter de la nourriture ou de l'argent au point que cela devient une fin en soi, alors il est très probable qu'elle voudra accumuler autant de plaisirs que possible, même lorsqu'il devient évident que les dommages causés surpassent les gains. Mais si un homme veut les utiliser pour lui permettre de servir Hachem convenablement, alors il est bien plus probable qu'il ne les utilisera qu'au niveau où ils pourront l'aider dans sa 'Avodat Hachem, son service divin. Par exemple, si un home mange pour se donner des forces afin de servir Hachem, alors il pourra certainement surmonter toute tentation de manger à l'excès, car cette surconsommation de nourriture ne l'aide pas dans sa 'Avodat Hachem. De même, un homme qui cherche de l'argent comme moyen de subvenir aux besoins de sa famille afin qu'ils servent Hachem correctement, est bien moins en danger de vouloir accroître sa richesse au point où cela entrave sa 'Avodat Hachem. Tandis que si accumuler de l'argent devient un but en soi, il risque de perdre de vue le but de l'argent, et il tombera dans le piège justement relevé par Hillel : Marbé Nékhassim, Marbé Daagot : celui qui a beaucoup de biens a beaucoup de soucis.

Nous avons examiné jusque-là le thème général de cette Michna. Dans les articles à venir, nous nous concentrerons sur les domaines spécifiques mis en valeur par Hillel.

 

[1] Voir Tiféret Israël, Ya'hin 47.