Chaque mercredi, retrouvez les aventures de Eva, célibattante parisienne de 30 ans… Super carrière, super copines. La vie rêvée ? Pas tant que ça ! Petit à petit, Eva découvre la beauté du judaïsme et se met à dessiner les contours de sa vie. Un changement de vie riche en péripéties… qui l’amèneront plus loin que prévu !
Dans l'épisode précédent : Eva vient de passer un premier vrai Chabbath et a été profondément marquée par sa beauté à tel point qu’elle a hâte de recommencer ! Comme par hasard, c’était le moment que David (son ancien copain) avait choisi pour refaire surface....
Les semaines avaient filé et déjà l’hiver touchait à sa fin. Je m’étais mise à observer de plus en plus Paris et ses parisiens. Depuis ce premier Chabbath à la synagogue, c’est comme si mes yeux s’étaient ouverts sur un nouveau monde. Je devenais curieuse de tout. Je m’appliquais aussi à ne pas penser au texto de David que j’avais reçu et que, pour la première fois, j’avais choisi d’ignorer ! Je n’avais pas envie de passer comme d’habitude des heures à me demander : “Qu’est-ce que ce message signifie ? A quoi pense-t-il ?”. Quand je pense qu’il y a encore quelques mois, j’aurais convoqué Karen et les filles pour une réunion au sommet dans notre QG pour analyser-disséquer ces deux malheureux mots : “Tu sors ?”.
Je ne voulais pas passer à côté de ce que je ressentais pour la première fois : comme si je m’éveillais à quelque chose de nouveau. En comparaison, David et ses messages, c’était du réchauffé.
J’étais devenue une “régulière” à la synagogue le Chabbath. J’y allais le vendredi soir et le samedi matin. J’avais maintenant mes repères : mon petit livre de prières en phonétique, ma place habituelle et j’avais même gagné en audace pour aller m’asseoir près des dames qui savaient lire l’hébreu et qui pourraient m’aider à suivre la Paracha de la semaine.
C’était si drôle ! La semaine, j’étais hyper sûre de moi dans mon travail, dans ma façon d’avoir un avis sur tout… et arrivé au Chabbath, je me transformais en une néophyte pour qui chaque chose était une nouveauté incroyable. Et entre les deux, j’avais une préférence pour la “moi” du Chabbath : c’était si rafraîchissant de ne rien connaître ! Je buvais littéralement les paroles du rabbin sur la portion de Torah de la semaine. Ses explications étaient incroyables ! Parce que ce qui est fou, c’est que ce qu’il nous expliquait venait de la Torah… C’est comme si le rabbin lisait le magazine hebdo de ma vie et chaque semaine délivrait un message qui correspondait EXACTEMENT à ce que je vivais… à ce que je ressentais !
Le seul hic, c’est que Guila était ma seule amie de la synagogue. Mais elle est d’origine strasbourgeoise et sa famille vit encore là-bas. Donc de temps en temps, elle partait pour le week-end. J’adorais mes parents, mais Chabbath chez eux, ce n’était pas l’idéal : personne ne prêtait réellement d’attention au Chabbath. Or moi, j’avais vraiment envie de ressentir cette intensité chaque semaine.
Il m’arrivait donc de prendre mes repas en solo et ce n’était pas très fun. Un samedi après-midi où la solitude était plus pesante qu’à l’ordinaire, je me risquai à retourner à la synagogue.
C’est la que je rencontrai la Rabbanite ! Elle devait connaître tout le monde parce que dès qu’elle me vit (un peu hésitante), elle vint directement se présenter à moi en me souhaitant la bienvenue. Quand je lui dis mon prénom, son visage s’illumina : “Mais tu es l’amie de Guila ! Elle m’a parlé de toi. C’est moi qui la prépare pour son mariage. Le Chabbath matin avec les enfants ce n’est pas facile pour moi de venir à la synagogue, mais je suis contente de te connaître. Suis-nous, on va prendre le troisième repas de Chabbath avec la communauté”. Est-ce que j’aurais pu rêver d’un meilleur accueil ? Envolé mon coup de blues du midi. J’étais assise avec des dames souriantes qui papotaient de choses et d’autres dans un joyeux brouhaha.
A la fin de Chabbath quelle ne fut pas ma surprise quand la rabbanite vint me souhaiter une bonne semaine et me dit qu’elle m’attendait Chabbath prochain… à la maison !
Oh là là, moi à table avec le rabbin et sa famille… Déjà que j’avais l’impression d’avoir fait un pas de géant en venant à la synagogue, mais là c’était carrément une autre étape !
N'empêche…. j’étais très curieuse de découvrir comment se passe un Chabbath chez un rabbin.
Du coup, dès dimanche, je passai un coup de téléphone à Guila pour tout lui raconter ! Elle était morte de rire face à mon enthousiasme ! Elle ajouta : “Tu te rends compte ? Avec ton travail, tu assistes au premier rang des défilés de mode, là où beaucoup de filles paieraient une fortune pour être à ta place, mais toi tu es tout excitée par une invitation à la table de Chabbath du rabbin !”
Ahahah, elle avait raison ! Les défilés, je connaissais. Tout le monde s’emballait, mais je ne comprenais pas l’hystérie. C’était aussi court que superficiel. Alors que là… Ça devait être tout le contraire.
Le vendredi soir suivant, hyper enthousiaste, j’allais directement chez la Rabbanite (merci à Guila de m’avoir donné l’adresse). Bon, un peu nerveuse quand même (chassez le naturel…), je frappais à la porte. Une petite fille avec une magnifique robe verte et un gros noeud doré dans les cheveux m’ouvrit la porte. Dans un grand sourire, elle me dit : “Chabbath Chalom Eva, moi c’est Yéhoudit et là-bas c’est mon petit frère, Méir. Nissim, Daniel et Yossef sont encore à la synagogue avec papa. Moi, j’aide maman à préparer les salades”.
Est-ce qu’il y avait petite fille plus adorable que celle-là ? Au même moment, la Rabbanite arriva et m’embrassa chaleureusement sur les joues en me souhaitant Chabbath Chalom. Elle me fit entrer et, instantanément, je me sentis à l’aise. Presqu'aussitôt, le rabbin et ses fils arrivèrent de la synagogue. D’un coup, le salon se remplit de “Chabbath Chalom !” criés à tue-tête et bébé Méir se mit à taper dans ses mains à la vue de ses frères. On se mit à discuter avec le rabbin et la Rabbanite, mais c’était dur de s’entendre, les garçons ayant décidé de faire un concours de chant sur “Chalom Alékhèm”.
Dans un joyeux vacarme, tout le monde prit place à table. Elle était magnifique ! Il y avait des plats de salades à perte de vue, une vaisselle fine et au centre, un magnifique verre de Kiddouch en argent. On aurait dit une table de roi ! Le rabbin commença les prières... Je m’attendais à entendre le Kiddouch (à peu près la seule prière que je connaissais), mais je fus décontenancée quand tous les enfants et le rabbin se mirent à chanter un chant, pendant que la Rabbanite s’asseyait. Je ne connaissais pas cette prière, mais j’étais captivée par la façon dont le rabbin regardait la Rabbanite en chantant. Il y avait une telle affection qui émanait de part et d’autre...
Et puis, le rabbin fit le Kiddouch avec beaucoup de concentration… Chaque mot était prononcé avec beaucoup d’attention. J’avais entendu beaucoup de Kiddouch dans ma vie, mais là, pour la première fois, je ressentais sa dimension sacrée.
Quel honneur cette table faisait au Chabbath !
La suite du repas était comme magique… Entre les plats succulents et les rires des enfants, c’était une véritable table de fête ! Il y eut des chants entre les plats (et tout le monde chantait en chœur) et chaque enfant tenait absolument à dire son commentaire de la Paracha appris à l’école. Puis, ce fut au tour du rabbin de parler de ce Chabbath et, encore une fois, ses mots me touchèrent en plein cœur !
Ce moment incroyable passa bien trop vite à mon goût. J’avais mangé plus qu’à ma faim, mais je n’étais pas rassasiée de cette atmosphère incroyable. Je quittais cette magnifique famille à regret, en promettant de revenir vite. Et sur le chemin du retour, je me mis à prier Hachem. Il m’avait donné l’opportunité de découvrir un Chabbath en famille et je savais à cet instant que je ne pourrai plus jamais m’en passer. Mais comment reproduire cette atmosphère extraordinaire dans la réalité de ma vie ? C’était un peu comme vouloir à tout prix porter des stilettos taille 36… alors que je chausse du 39 ! Est-ce que je ne rêvais pas un peu trop haut d’une vie qui n’était pas la mienne ?
Si les envies de Eva étaient bien raisonnables, comment allait-elle s’y prendre ?
La suite la semaine prochaine...