Après l’immense émotion du don de la Torah au mont Sinaï relatée dans la précédente paracha, notre lecture hebdomadaire nous invite apparemment cette fois à des choses plus concrètes dans la paracha " Michpatim " qui traite quant à elle des lois sociales et juridiques, ainsi que des dommages et de tous les problèmes pouvant survenir dans une société organisée - en d’autres termes - des relations entre les hommes.

L’enseignement qui s'en dégage est évident, nous explique le célèbre commentateur Rachi : ces lois sociales et humaines ont-elles aussi pour origine le mont Sinaï ! Ce qui veut dire qu’elles ne sont pas l’expression d’une quelconque " logique " ou " nécessité sociale ", mais bien la concrétisation de l’Inspiration divine qui demande à tout un peuple de continuer à faire régner D.ieu… même dans les relations humaines les plus prosaïques et quotidiennes. Car pour la Torah, la relation avec D.ieu n’est pas seulement " verticale " (entre l’homme et le Créateur), mais également " horizontale ", à savoir entre l’homme et l’homme.

 

Je voudrais juste extraire de cet ensemble de textes la première mitsva pratique qui consiste à instituer le grand tribunal national du " Sanhédrin " en tant qu’expression la plus sublime de la justice humaine. Cette instance juridique suprême de la nation hébraïque d'alors était constituée de 71 sages, les plus éminents du peuple d’Israël qui devaient avoir chacun d’innombrables qualités personnelles, dont la connaissance, la probité, mais également la maîtrise de toutes les langues humaines !

Ainsi l'impressionnante série des sujets traités par ces juges ne devait jamais passer par l'intermédiaire d'un quelconque traducteur, mais elle pouvait être comprise et résolue immédiatement par les membres eux-mêmes du Sanhédrin.
De plus, la Torah tient à préciser ici que cette instance supérieure devait absolument être abritée à l'intérieur même de l'enceinte du Temple de Jérusalem, dans la zone du Bet Hamikdach qu’on appela la « Lichkat hagazit » (la Salle de la pierre taillée). Et ce, pour bien affirmer que la justice elle aussi doit se rendre dans un contexte bien précis : celui de la foi, de la confiance et de la reconnaissance de D.ieu ! 

C'est que dans le judaïsme authentique, même quand la justice est humaine, elle a une origine divine, les hommes qui la donnent devant être inspirés par D.ieu et se comporter suivant Son éthique. Et donc le juge hébreu n'est pas seulement un " spécialiste de droit ", il est un homme moral dont la vie, la conduite quotidienne et les qualités personnelles doivent constituer elles-mêmes un véritable exemple.
Notons aussi en passant que le Sanhédrin - selon la Guémara du Traité talmudique Sanhédrin (page 113) - devait siéger avec les Sages installés en demi-cercle : tout le monde voyait tout le monde - ce qui est censé rappeler, comme s’il le fallait encore, l’extrême transparence de la justice hébraïque. En fait, ce tribunal suprême n’est en rien le lieu de quelconques " pressions politiques " et ne saurait donc être soumis à l’influence des uns et des autres, ni de tel ou tel " secteur " de l'opinion publique ou de la société : Il est l’expression d’une réflexion commune et hautement désintéressée guidée par une recherche authentique de la vérité absolue.

Sans nul doute, ce sont là quelques " pistes " susceptibles de permettre à l'Israël d’aujourd’hui de retrouver son chemin et sa vraie vocation ! Une " piste "que l’on évoque directement dans le texte de la prière du " Chemona Esré " (les 18 bénédictions dites debout, trois fois par jour) : « Hachiva choftenou kevarichona [Fais régner nos juges comme autrefois] ! ».

Je crois que l’exigence de cette justice authentique s’impose à présent en Israël pour devenir la référence de tous les citoyens de l'État hébreu contemporain - quelque soit l'engagement " religieux " de chacun - afin d'aboutir à une plénitude et une sérénité reposant chaque fois sur l'évidence, ressentie par tous, que les décisions prises par la justice et ceux qui guident la nation ont bien été les bonnes.
C’est justement le vœu que je formule pour l'État hébreu et son peuple, en faisant référence au Zohar : " Fasse, Hachem, que nous ayons le bonheur de bientôt vivre cette heureuse époque qui verra le retour des exilés de la diaspora en Israël et le rétablissement d’une justice conforme à la Torah ! ". Amen.