Le Midrach rapporte que l’envoi des explorateurs ne constituait pas un ordre divin, mais qu'il ressortait d'une décision de Moché faisant suite à un accord tacite passé à la demande du peuple. C'est qu'en fait, les Enfants d'Israël voulaient savoir si la Terre promise correspondait bel et bien à leurs désirs. Si bien que Moché finit par accéder à cette demande à contrecœur…
Le Maguid rav Chalom Yaffé nous raconte à ce propos la parabole suivante :
Un diamantaire en voyage se vit contraint de faire halte dans une ville pour y passer le Chabbat. Il se fit inviter par l'un des notables et à l’approche de Chabbat, le voyageur demanda donc à son aimable hôte de lui garder la petite fortune qu’il transportait avec lui. Avec un grand sourire affable, le maître des lieux s’empara de sa sacoche pleine de diamants, d’un portefeuille bien garni et d’une bourse remplie de pièces d'or sonnantes et trébuchantes qu’il engouffra aussitôt dans son coffre-fort.
Or, après avoir regagné sa chambre, l’invité fut envahi de remords pour avoir confié si hâtivement tout son pécule, sans même s’être assuré auparavant de l’honnêteté de son dépositaire … Pendant tout le Chabbat, il rongea son frein, attendant avec impatience les trois étoiles annonçant le motséi Chabbat pour pouvoir récupérer son bien.
Après la prière de havdala, il réclama d’une voix fort altérée tout son magot, et à peine quelques instants plus tard, il tenait en main un paquet qui semblait apparemment totalement identique à son dépôt initial.
Sans se soucier de la présence du notable qui l’observait d’un œil amusé, il ouvrit donc d’une main tremblante sa sacoche pour vérifier rapidement si sa « marchandise » était intacte. À moitié rassuré, il referma la sacoche et passa au portefeuille : il en compta fébrilement les billets et laissa s’échapper un premier soupir de soulagement, car aucun ne manquait à l’appel… Il s’empara alors de la bourse pour continuer son inspection, lorsqu’un rugissement de colère l’interrompit tout net !
« Halte ! s’écria son hôte. Toute hypocrisie a des limites... Que vous ne m’accordiez pas votre confiance en ce qui concerne les diamants ou les gros billets, soit… D'une certaine manière, je peux vous comprendre. Mais après avoir vérifié ces valeurs et vous être assuré qu’il ne vous manquait rien, vous osez encore vérifier les piécettes ?! N'avez-vous pas honte… ? »
Après les miracles divins des Dix Plaies, de la sortie d’Égypte, de la traversée de la mer Rouge, de la guerre contre Amalek, de l'octroi de la manne - cette série de merveilles fabuleuses à travers lesquelles D.ieu a confirmé de manière si dévoilée et explicite qu’il est bel et bien le Maître incontestable et absolu de l’Univers -, le peuple d'Israël a encore osé hésiter à Lui faire confiance pour la « petite monnaie » que constituait le lopin de terre d'Eretz Israël… ?
Or, dans notre génération aussi, nous nous conduisons également avec la même effronterie. Ainsi, tous les matins, nous recevons du Créateur l’âme que nous Lui avons confiée la veille en nous couchant. Elle nous est restituée avec fidélité, ainsi que nos sens qui fonctionnent après un sommeil rafraîchissant … alors que pour tout ce qui a trait à notre parnassa (subsistance), nous osons ne pas nous en remettre à Sa bonté et à Sa Générosité pourtant si manifestes. En effet, la grande majorité d'entre nous ne se fie qu’à son « boulot »…