Le titre de cette chronique est une allusion à un livre d’un philosophe du 19ème siècle sur « le crépuscule » des croyances en la Transcendance mais, en réalité, cela invite une réflexion. À un moment où les démocrates les plus fervents utilisent leurs armes CONTRE la démocratie, ne peut-on pas parler d’un crépuscule, c’est-à-dire une fin de lueur des valeurs ? Les idoles ont la vie courte : elles changent d’une époque à l’autre.
Dans son livre « Ikveta dé-Mechi’hah » (Proximité de l’époque messianique), le Rav Elhanan Wasserman, Roch Yéchiva en Lituanie assassiné par les nazis en 1940, ironise sur les « ismes » qui jalonnent les diverses époques, qui apparaissent et disparaissent : nationalisme, socialisme, communisme, fascisme et bien d’autres encore ! Il s’agit ici d’idoles éphémères actuelles pour un jour ; en fait, l’idole est un phénomène passager, que l’on adore un certain temps, pour la remplacer par une autre. C’est ce qu’a voulu prouver Avraham Avinou quand il a brisé les idoles de son père, marchand d’idoles ! Il voulait, par là, montrer le caractère « éternel » du Tout-Puissant, Créateur et Souverain de l’univers face à des idoles inconsistantes.
S’il est question d’un crépuscule, c’est parce que les lumières, apparemment claires, s’éteignent les unes après les autres. Le problème actuel de l’humanité est de s’interroger sur la chute des idoles. Qu’est-ce qui va les remplacer, car après le crépuscule vient la nuit, l’obscurité, l’extinction. Une idéologie semble, aujourd’hui, séduire : le populisme, où l’affrontement personnel du peuple – les manifestations – cherche à remplacer la démocratie. Les voies démocratiques sont menacées. Qui eût cru qu’on oserait, aux États-Unis, bastion de la démocratie, attaquer le Capitole, siège suprême de la démocratie américaine ? En Angleterre, en Suède, en Hongrie, en France, en Israël aussi, au Brésil, des contestations de la démocratie se font jour : « la rue contre la loi », ne serait-ce pas un signe d’une nouvelle idole ? Il ne sert à rien d’extrapoler ou d’imaginer des situations inhabituelles. Il s’agit seulement de prouver que la disparition des repères menace une humanité, dépourvue d’idoles. Pourrait-on supposer que la technologie apporte une réponse, et éclaire l’avenir ? Ce serait de nouveau essayer une nouvelle idole, mais ce serait, cette fois, une idole qui effacerait une présence active de l’homme. Si la machine devait remplacer l’homme, le crépuscule laisserait assurément la place à la nuit.
Le Juif croyant sait qu’il y a une Lumière qui explique et éclaire l’univers. Cette lumière, c’est le Créateur qui S’est révélé au Mont Sinaï, Qui nous a donné la Torah et nous accompagne, sans interruption, tout au long de l’Histoire. Il ne cesse jamais de nous protéger, et d’exercer Sa Providence sur l’humanité. Cette lumière ne connaît pas de crépuscule, car elle brille en permanence. Notre espoir est qu’elle apparaisse bientôt à l’humanité entière, ainsi que nous le proclamons chaque matin dans la prière : « (Puissions-nous mériter que) Tu éclaires Tsion d’une Lumière nouvelle ; et puissions-nous mériter, tous, de jouir de cette Lumière ». Cette prière, nous la formulons juste avant la lecture du Chéma', qui est l’acte de foi du peuple juif. Lumière éternelle qui éteindra les idoles et éclairera l’humanité.